Le 28 juin 2013, les Celtics et les Nets organisaient un Blockbuster trade. Le trio de vieux briscards Garnett-Terry-Pierce rejoindra Brooklyn, tandis que plusieurs joueurs de seconde zone et trois tours de drafts firent le chemin inverse. Cet échange devait permettre à la deuxième franchise de New York de s’installer rapidement dans les hautes sphères de la conférence Est, et pourquoi pas jouer le titre.
Mais en NBA, tout ne se passe pas comme prévu. Ce niveau, Brooklyn ne l’atteindra que 8 ans plus tard, en 2021. Entre temps ? Une longue traversée du désert, un renouveau complet dans la franchise et des décisions bien senties. Par la force des choses, la franchise newyorkaise signera Irving et KD pour enfin s’hisser à la place tant espérée des années plus tôt. En 2021, ils attaquent leurs premières séries de playoffs en tant que favori depuis bien longtemps. Et quel pied-de-nez de débuter cette campagne par une confrontation contre ces mêmes Celtics, qui les ont roulés dans la farine des années auparavant.
Dynamiques de la fin de saison
Comme souvent lorsqu’un seed #2 est opposé à un seed #7, les dynamiques sont diamétralement opposées. D’un côté, Brooklyn a vécu une saison plutôt particulière. Difficile de définir si celle-ci était calme ou agitée. Surmédiatisé par le retour de KD et son association avec Kyrie, la régulière (et le futur) des Nets prendra un nouveau virage le 13 janvier 2021. Exit Levert, Allen, welcome James Harden.
Depuis ? Difficile de se faire un avis. Le trio n’a joué que 414 possessions ensemble sur le parquet. A titre de comparaison, Tatum-Smart-Brown, qui ont également loupé pas mal de matchs cette saison ont quand même joués 1384 possessions ensemble. Pourtant, ce peu de mécanismes mis en place entre les deux guards et le forward n’a pas gêné Brooklyn dans sa défense de la seconde place de la conférence. Depuis le trade, les Nets sont en 41-18, alors que Harden, KD et Irving ont respectivement manqués 23, 33 et 12 matchs. Cette réussite est le fruit d’un collectif extrêmement profond, qui ne cesse de se renforcer depuis le début de la saison. Entre Jeff Green, Blake Griffin, Joe Harris ou Mike James, la liste de rôle players pouvant sortir de leurs boites chacun dans leur rôle est longue.
Depuis le All Star break, Brooklyn a le 11è net rating de la ligue, malgré le 6è offensif et le 4è % au shoot. La faute a des largesses défensives (20è rating défensif) que devront utiliser Boston s’ils veulent s’en sortir. En effet, sur leurs sept dernières défaites de la régulière, la moyenne de points encaissées dépasse les 118. Pour aller au bout, il va falloir quelques stops de plus. Mais tout est a nuancer, tant nous avons l’impression de n’avoir vu que par bribes les possibilités qu’offraient le groupe de Steve Nash.
De l’autre côté du parquet, la saison n’aura pas du tout été la même. Loins des standards imaginés par les médias (notre preview tablait autour des 49 victoires), les verts se sont enlisés dans une saison galère. A l’instar des Nets, les joueurs majeurs de l’effectif ont manqués beaucoup trop de matchs : 14 pour Brown, 24 pour Smart, 29 pour Kemba. Sauf que pour Boston, le banc n’est pas aussi fourni qu’à Brooklyn. Résultat : une saison en dent de scies, conclue de la pire des manières. Mais dès février, le tableau était sombre (cf : cet article de @LouisQiBasket). Et le bateau s’enfonça dans les méandres de la ligue. Un jeu stéréotypé, un manque profond de talent, une raquette exposée et explosée.
Dans les faits, Boston s’en sortira avec un bilan tout juste à l’équilibre (36-36) et une qualification obtenue sur le fil grâce à un match à 50 points de Tatum en play-in. En terme de chiffres, la saison des C’s est moyenne dans tous les sens du terme : 10è rating offensif, 13è au net et au défensif. La fin de saison n’aide vraiment pas dans la dynamique du groupe. Sur les 15 derniers matchs, seulement 5 victoires au compteur (hors playin), dont de sales défaites (2x Chicago, OKC ou Cleveland). Comme si cette mauvaise dynamique (s’est-t-elle véritablement lancée ?) ne suffisait pas, Jaylen Brown a été annoncé out pour toute la fin de saison. A souligner, l’arrivée d’Evan Fournier, qui joue titulaire depuis 10 matchs en l’absence de JB.
Le temps semble donc bien sombre pour ces Celtes, et lorsque l’on fait une rétrospective sur les premières rencontres face aux Nets, le ciel se s’éclaircit pas.
Affrontements de la saison régulière
Boston et Brooklyn jouent dans la même division, ils ont donc eu le droit de s’affronter à 3 reprises lors de cette saison. C’est un cinglant 3-0 que les hommes de KD ont infligés aux C’s. Au vue de l’évolution des effectifs, il est forcément difficiles d’en tirer quelque chose à l’aube des playoffs. En effet, la première rencontre s’est déroulée avant l’arrivée de James Harden.
La suivante a tout d’abord vu KD et Griffin être mis au repos, avant que ce ne soit le cas de Kemba, Brown, Harden et de nouveau ce bon Durant. Dur d’en tirer des conclusions, en sachant que le monstre à trois têtes devrait bien être présent. Mais des petits enseignements qui impacteront toute la série peuvent déjà être mis en évidence.
Le premier ne sera une surprise pour personne : en l’absence de Brown (ce qui sera le cas) ou lors d’un non match de ce dernier, la victoire repose exclusivement sur Tatum et ses capacités à prendre feu. Et même lorsque c’est le cas, les C’s restent plus ou moins loin des Nets. Lors de la deuxième confrontation directe, Tatum scorera 31 points en 22 tirs, soit 59% au shoot : défaite de 11 points au bout. Lors de la rencontre suivante, en l’absence de Brown, Jayson tirera 27 fois, pour 38 points à 51%. Seule la présence de Kyrie suffira pour la victoire.
Sur les trois rencontres, sans jamais être au complet, les Nets inscriront à deux reprises plus de 120 points. Du côté de Boston, on a jamais inscrit plus de 109 points (95, 109 et enfin 104). Très mauvaise nouvelle à priori lorsque l’on sait que Boston inscrit en moyenne plus de 112 points et que Brooklyn en encaisse 114.
Vous l’avez donc compris, ces rencontres n’auront servis qu’à asseoir la supposée autorité des Nets sans pour autant pouvoir en tirer des enseignements.
Match-up & clés de la série
Les automatismes des Nets ; une course contre la montre
Derrière ce titre alarmiste se pose une vraie question. Certes, sur le papier, les Nets semblent se diriger tout droit vers les demis-finales de conférence sans trop avoir à se soucier des verts balayés en passage. Mais la régulière et les playoffs sont deux choses différentes. Dans une saison particulière, l’expérience commune des C’s ne pourrait-elle pas jouer des tours aux hommes de Nash ? Le groupe formé autour de Tatum, Smart ou Kemba sort d’une finale de conférence perdue face au Heat l’année passée et pourrait compter sur ces automatismes créés pour jouer des tours aux Nets. En poussant le bouchon encore plus loin, ne serait-il pas préférable pour les Nets que Boston prenne un ou deux matchs afin de laisser le temps à l’effectif de s’acclimater à jouer ensemble dans des rencontres de hautes importances ?
Bien sûr, cette question est de la pure provocation, d’autant plus lorsque l’on voit déjà les chiffres du clutch en NBA, difficile d’imaginer les Nets craquer par manque d’automatisme. L’effectif est rempli de vétérans habitués des joutes printanières. D’après NBAStats, KD et consorts sont la troisième équipe la plus clutch de la ligue avec plus de 67% de victoires et 46,9% au shoot en 40 matchs, alors que les Celtics sont 27è de ce même classement (39% de victoires sur 43 échéances). Pour rappel, le clutch est défini statistiquement par un écart de moins de 5 points à moins de 5 minutes du terme de la rencontre. Et à ce petit jeu, les trois têtes d’affiche semblent déjà rodés : entre 3,3 et 3,7 points inscrits par en moyenne par les trois sur cette période, tout cela a plus de 47% au shoot. En plus de cela, Kyrie dépasse les 40% à trois points également. Jayson Tatum est dans la même veine de joueurs, mais ce dernier sera forcément ciblé, et surement pris à deux.
Tatum (trop) seul au monde ?
Comme indiqué plusieurs fois depuis le début de cette preview, une série ne serait-ce que moyenne de Jayson Tatum enterrerai définitivement les espoirs des celtes. Heureusement pour eux, après un début de saison un peu poussif, Jayson est de retour au très haut niveau. Depuis le All-Star break, l’ancien dukie tourne en quasi 28/8/4, à 47% au shoot et plus de 40 à 3 points. Il nous a même gratifié de plusieurs performances de très très haut vol (60 points vs San Antonio, 53 vs Minnesota ou encore 50 face à Washington lors du playin).
Sauf que face à lui, Jayson aura fort à faire. Qui peut être un plus mauvais match-up pour lui que Kevin Durant ? Réputé pour son two-way profil, Durantula devrait se coltiner Tatum, en alternance avec Jeff Green. Deux gros morceaux donc. De plus, il ne sera pas aidé par sa sélection de shoot, qui, sans remettre en cause son talent, n’est pas la plus simple. Sur cette saison, 59,2% de ses shoots inscrits ne proviennent pas d’une passe décisive, 46,6% sont des pulls-up. A titre de comparaison, Stephen Curry est a 49,8% de shoots inscrits sans passe le précédent et 40,9% sont des pulls-up. En plus d’être isolé, le playbook de Tatum n’est donc pas le plus simple. Son talent suffira-t-il à maintenir la tête de sa franchise hors de l’eau ? Pourra-t-il compter sur ses coéquipiers ?
Quid des autres options de Boston ?
Par autres options, nous sous-entendons Kemba Walker et Evan Fournier. Les deux guards auront fort à faire et devront soutenir à minima Jayson Tatum s’ils espèrent ne pas craquer trop tôt. Arrivé en cours de saison et immédiatement blessé, le français n’a pu réellement se mettre en jambes qu’en cette fin de saison. La blessure de Jaylen Brown a forcé Brad Stevens a le titulariser, et il lui a plutôt bien rendu : sur les sept dernières rencontres de saison régulière auquel il a participé, l’ex-Magic tourne en 19,9pts-4,7asts-4rebs, à plus de 54% au shoot et 56 longue distance. Des statistiques qu’il devra réitérer en post-season s’il veut donner de l’espoir à sa nouvelle franchise, en remplaçant statistiquement les points manquants de Brown.
Du côté du meneur celte, la saison ne fût pas facile, surtout d’un point de vue physique. Seuls 43 petits matchs joués, et la moitié des rencontres loupées sur les 20 dernières. Malgré les statistiques qui restent toujours dans sa moyenne (plus de 19pts, quasiment 5 passes et 4 rebonds), son impact semble ne plus être celui d’antan. Cette série doit être celle du renouveau pour lui, d’autant plus que la défense extérieure des Nets n’est pas la plus effrayante du paysage. Le duo Kyrie-Harden n’a jamais été réputé pour ses exploits défensifs, et seul Bruce Brown semble être un expert du domaine. De quoi donner quelques lueurs d’espoirs aux guards verts ?
La (non) bataille des banc
Pour cette partie, nous devons définir des cinq de départ afin de comparer ce qu’il restera sur le banc. Pour les new-yorkais, les starters devraient être sans trop de surprise Harden – Kyrie – Harris – KD – Jordan, même si ce dernier a commencé une petite quinzaine de matchs sur le banc cette saison. Du côté C’s, Smart, Walker, Fournier et Thompson devraient accompagner Tatum. Dans cette situation, difficile de voir le banc vert exister. Aujourd’hui, les premières rotations en sortie de banc sont Pritchard, Robert et Grant Williams et Semi Ojeleye. Un rookie, un prometteur intérieur et deux joueurs à vocation plutôt défensive.
Au même moment, de l’autre côté du terrain, les Nets feront entrer sur le terrain Landry Shamet, Bruce Brown, Blake Griffin,, Jeff Green, Nicolas Claxton ou Mike James. Dans l’ordre, nous avons un catch & shooteur, un défenseur sur les lignes extérieurs, un ancien All-NBA joueur bourré d’expérience, deux rotations à l’intérieur apportant défense et scoring et un joueur calibré MVP d’Euroleague.
Pas besoin de vous faire un dessin, Steve Nash a bien plus d’armes à sa disposition que son collègue. Maintenant, en play-offs, les rotations se resserrent. Le coach rookie arrivera-t-il à faire les bons choix sur les éléments à utiliser ? Et surtout, le fera-t-il au bon moment ? Parce qu’à ce stade de la compétition, chaque détail compte, et quelques rotations aléatoires peuvent coûter chères.
Le no man’s land dans la raquette
Le talon d’Achille des Nets est surement sa raquette. Comme le direz un certain marseillais fan des Knicks, il manque d’un vrai “tonton dans la raquette”. Même si Claxton a rendu de bons services, le joueur n’a aucune expérience de ce niveau et devrait peu être utilisé. A côté de lui, seul le vieux Deandre Jordan tiendra le rôle de “vrai pivot”. Face à des joueurs comme Embiid, ce manque pourrait être problématique. Coup de chance pour eux (ou malchance pour leurs adversaires), la raquette des C’s est peut être encore plus vide que celle de Brooklyn. Derrière un Tristan Thompson qui n’a jamais été une bête offensive, seul Robert Williams peu apporter des problèmes à la défense des Nets sur de courtes séquences à forte intensité. Et encore, il apportera surement plus en rim protection que de l’autre côté. Le non remplacement de Theis en mi-saison pourrait coûter cher.
Pronostic & mot de la fin
Cette série devrait être intéressante en plusieurs points : comment jouera un Kyrie Irving surement surmotivé à l’idée d’affronter ses ex-coéquipiers ? Quelle première série de play-offs pour les Nets et détecteront nous des failles dans le système Nash ? Tatum passera-t-il encore un step ? Fournier comblera-t-il le manque en scoring de Brown afin de donner une chance aux C’s ? Tant de questions sans réponses à l’heure actuelle sur lesquelles nous serons plus avancé dans quelques jours.
Au sein de la rédaction, cette série n’a fait aucun débat. Seule une petite question subsistait : les Celtics réussiront-ils à prendre un match ? Jayson fera-t-il un Tatum game ? De mon côté, j’ai opté pour un gentleman sweep, en voyant les Celtics sortir une performance au dessus de leur moyenne face à des Nets endormis dans le game 3 ou 4.
Boston sortira-il de PO dès le 1er tour pour la première fois depuis 2016? Les Nets accéderont-ils au second tour pour la première fois depuis 2014 ? Rendez-vous à 2h dans la nuit de samedi à dimanche pour avoir un début de réponse.