Il y a un an, Russell Westbrook et les Los Angeles Lakers partageaient une bataille dans la bulle. Alors chez les Houston Rockets, Brodie était passé de l’espoir au coup de balais après avoir arraché la première rencontre pour mieux se faire éliminer par une paire LeBron-AD en quête d’un premier titre ensemble. Les dernières minutes du mach 5 filent, et la gifle paraissait déjà administrée, quand Russell Westbrook choisissait cet étrange timing pour hurler l’étonnante phrase : “Vous feriez mieux de me doubler !“.
Il reste alors 9min30 au compteur, Houston à 29 points de retard, et la remarque fait rire un LeBron James l’esprit déjà tourné vers les Finales de conférence. Preuve de son intensité à toute épreuve ou de son manque de perspective, le moment reste comme une image de ce parcours avec les Rockets. La dernière, puisque le joueur demandera à être échangé durant la courte intersaison. Direction Washington aux côtés de Bradley Beal pour tenter d’accrocher le wagon des playoffs dans une conférence Est très ouverte.
Pourtant, à peine un an après son arrivée dans la capitale fédérale, le meneur autrefois si attaché à la franchise qui l’a drafté ne semble toujours pas satisfait. Il faut dire que malgré une saison Westbrookienne dans la forme, les Wizards ont accroché le wagon des Playoffs dans la douleur, mais doivent faire définitivement face à un constat assez brutal : le duo Westbrook-Beal ne suffit pas à compenser la légèreté de l’effectif. Malgré un Beal de gala toute la saison, le roster mis en place par la franchise est bien loin des armadas que Russell a connu durant ces années au Thunder ou sa saison de transition à Houston.
Aussi, c’est avec une surprise toute relative que nous avons appris hier soir que Westbrook tentait de forcer sa sortie de Washington. En revanche, c’est beaucoup plus étonné que nous avons appris la nouvelle suivante : les rumeurs d’une venue à Los Angeles étaient bien sérieuses. Et pour cause, les discussions entre LeBron James et Russell Westbrook auraient donné des envies au meneur d’un trio avec le King et Anthony Davis…
Résultat, l’échange tombe officiellement durant la draft, Russell Westbrook débarque dans la Cité des anges accompagné de deux 2è tours de draft contre Kentavious Cadwell-Pope, Kyle Kuzma, Montrezl Harrell et le 22è choix de la draft 2021. Quelles conclusions tirer à chaud ? Quels challenges semblent l’accompagner ?
Russell Westbrook, une réponse à la LeBron-dépendance ?
Si l’on doit rapidement expliquer pourquoi Rob Pelinka et ses équipes se sont tournées vers Brodie, c’est probablement un peu plus que les envies du King qui ont dû les motiver. En réalité, ceci part d’un constat assez simple : les Lakers sont incapables de proposer de belles copies offensives dès lors que James sort du terrain. Si la problématique fut visible pendant son absence, elle le fut surtout en sa présence. Quand les Lakers souhaitent reposer leur franchise player, le problème se répète : l’attaque commence à bégayer et n’a plus rien de celle d’un champion en titre.
Si la défense élite affichée ces deux dernières saisons a permis de faire des Lakers une équipe très dure à manier, la saison 2021-21 reste une déception. Pas dans le sens où, diminués, il se sont fait éliminer au premier tour, mais plutôt car malgré les efforts consentis pour améliorer l’équipe en attaque lors des sorties du King, le constat est resté le même :
- En 2019-20, les Lakers possédaient un offensive rating de 112,1 avec LeBron. Dès que le King sortait, l’équipe chutait à 105,2 points pour 100 possessions. Une baisse d’efficacité qui s’expliquait notamment par le manque de création offensive au relais de James. C’est pour cela qu’à l’intersaison, Rob Pelinka a fait l’acquisition de Dennis Schroëder, Marc Gasol et Montrezl Harrell pour apporter de la faculté à distribuer mais également un scoreur prolifique dans la peinture.
- En 2020-21, pourtant, les Lakers ont connu une trajectoire semblable. Avec LeBron, ils affichent un offensive rating de 112,4 points pour 100 possessions. Sans ce dernier, ils retombent à 105,8 points pour 100 possessions. Autrement dit, le problème reste le même. Sauf que cette saison, LeBron a manqué plus de matchs et n’est pas revenu à 100%. La même chose pour Davis qui a finalement, en prime, manqué une partie des Playoffs pour une élimination précoce du champion en titre.
- Les Lakers ont donc eu une identité bien définie. Avec James, ils proposent une attaque dans la moyenne NBA. Sans lui, ils tombent dans les bas fonds (29eme en 2020, 27eme en 2021) – et doivent donc s’appuyer sur leur défense pour faire la différence.
Si Russell Westbrook débarque chez les Lakers, c’est pour proposer le volume de jeu qui est le sien et permettra de décorréler au maximum ses minutes de celle de LeBron afin d’avoir tout le temps, l’un ou l’autre sur le terrain. A Washington, le joueur a ressemblé trait pour trait au RW que l’on connaissait à OKC. Présent dans tous les compartiments offensifs du jeu, il a d’ailleurs bouclé la deuxième partie de saison avec des chiffres surréalistes : 23pts, 14asts et 13rbds par match. Un triple double particulièrement salé, même selon ses standards.
Une condition toutefois…
Si Westbrook solutionne une partie du problème, il convient d’émettre un bémol basé sur l’expérience. Les Wizards, tout comme les Rockets possédaient des effectifs taillés pour maximiser le jeu offensif de Westbrook. Certes, Washington était de talent moindre, mais dans les deux cas, les profils autour du joueur correspondaient à ce qui était nécessaire pour le faire briller. C’est à dire, beaucoup de shooteurs capables de profiter de ses espaces, des intérieurs capables de joueur le pick&roll. La différence se trouvait là : les Rockets pouvaient être élite en défense, là où les Wizards étaient incapables de contester une attaque même pour sauver leur vie.
En revanche, et c’est sûrement là que le bas blesse; l’attaque de Washington connaissait généralement une chute drastique lorsque Bradley Beal quittait le terrain. L’inverse n’étant pas vrai : à savoir que quand RW sortait et que Beal était la seule star en lice, l’attaque continuait d’évoluer avec fluidité.
Dès lors, il semble capital de faire évoluer Westbrook avec Anthony Davis tant que faire se peut. D’autant que nous n’avons à ce stade, aucune vision sur le rendu final de l’équipe. Nous ne savons pas, donc, comment seront entourées les stars des Lakers, mais nous savons déjà que cela sera probablement fait avec les moyens du bord. Qui seront faibles tant la marge de recrutement est légère.
Des profils… compatibles ?
La stratégie des Suns fasse aux Lakers fut d’ignorer les non-shooteurs et de concentrer l’effort sur James et Davis. Un plan de jeu qui est devenu bien plus payant en l’absence de Davis, mais qui laissait néanmoins attendre qu’un effort devrait être fait pour amener dans l’équipe des tireurs d’élite qui seraient moins suceptibles de disparaître que KCP ou Kuzma.
Dès lors, il ne semblait pas naturel de faire venir Westbrook, qui s’apparente à l’un des pires shooteurs de l’histoire. Si l’on considère le volume de tirs à distance pris et sa réussite en carrière, RW est le pire joueur possible dans l’optique d’obtenir du spacing. D’ailleurs, dans la bulle, pour contrer le five-out des Rockets, les Lakers avaient fait le choix d’ignorer Westbrook pour maximiser leur défense sur les autres joueurs. une stratégie payante qu’ils pourraient subir en retour cette saison. Exemple :
Or, Rob Pelinka et LeBron James, à en croire le travail réalisé en coulisse, semblent penser que le trio peut fonctionner, mais également que la faculté du meneur – toujours parmi les plus athlétiques de la ligue à l’aube de ses 33 ans – à créer du jeu est capital pour le succès de l’équipe. Grâce à ses capacités athlétiques, sa puissance en transition et son potentiel à porter une attaque par séquence, ils voient en Westbrook l’opportunité de créer un effectif si athlétique qu’il puisse faire un effet rouleau-compresseur.
L’objectif est toujours le win-now à Los Angeles, la venue de Brodie ne fait que le confirmer. Et si la compatibilité offensive entre Westbrook – James – Davis (particulièrement les deux premiers), n’a rien d’une évidence, cela peut fonctionner en attirant les bons joueurs. Tout porte à croire que le staff de LA a donc un plan. En revanche, il est également tout aussi clair que le “fit” de ce groupe, n’a rien de l’évidence qu’était le trio Curry – Thompson – Durant ou celui qu’est Irving – Harden – Durant. Autrement dit, la somme de talent ne sera pas suffisante pour garantir le succès de ce projet… Et la suite de l’intersaison sera cruciale.
Un été chargé
LeBron James (44M), Russell Westbrook (44M) et Anthony Davis (38M) sont donc désormais coéquipiers. A eux 3, ils envoient les Lakers au-dessus du salary cap. Avec ces 126M cumulés, les Lakers ont un avantage, ils peuvent absorber aisément des contrats puisque, étant au-dessus du salary cap, ils errent dans une zone où leur seule limite est leur volonté, ou non, de payer la luxury tax (et à quel montant). Toutefois, ils n’ont plus grand monde sous contrat… en dehors de leur trio.
En revanche, ils ont plusieurs cas sur lesquels se pencher en vue de cet été. Dennis Schroëder est là et la franchise va devoir trouver un accord avec ce dernier. A savoir, se séparer, lui donner le contrat qu’il souhaite ou tenter de l’aider dans sa destination et recevoir un petit quelque chose dans un sign&trade. Autrement dit, les chances de le voir en pourpre & or sont maigres, et le joueur a complètement la main sur son avenir. Il est fort probable que rien ne se produise.
Le cas Alex Caruso est probablement le plus important pour cette équipe. Le meneur semble heureux à LA et fait tout ce que l’on peut attendre de lui : défense, énergie, shooting, prise d’initiative. Caruso est probablement le joueur à conserver de cette équipe, même si ses velléités en termes de montant seront forcément suivies de près.
Enfin, viennent les cas Marc Gasol, André Drummond, Wes Matthews et Markieff Morris qui seront suivis de près. Dans tous les cas, il faudra de toute évidence prioriser les joueurs à même d’amener du tir longue distance et de la défense. Le spacing autour du trio sera capital pour la réussite de l’équipe.
Néanmoins.
Il faut noter que le socle de l’équipe a toujours été sa défense et que cet été pourrait compliquer le maintien de cette dernière. L’équipe a perdu beaucoup de joueurs constituant cette identité et les joueurs à même d’apporter du tir et de la distance sont en général coûteux. Restera donc à déterminer quelle est l’attractivité de cette équipe (et la faculté à obtenir des baisses de salaire) mais également quels profils disponibles choisiront les Lakers plutôt que, par exemple… les Nets.
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Source : https://theathletic.com/2740089/2021/07/30/what-russell-westbrook-means-for-the-lakers-title-hopes-in-2022/