La nuit est passée et l’information est toujours là : Kyrie Irving est bel et bien un joueur des Dallas Mavericks.
Il faut dire que l’histoire semblait bouger en faveur de cet échange. D’un côté, l’ex-meneur des Nets qui faisait savoir qu’il ne resterait pas cet été et poussait sa franchise à obtenir une contrepartie. De l’autre, des Mavericks dont le front-office était mis sous pression par Luka Doncic, désireux d’obtenir un renfort de poids.
Si Kyrie se voyait bien jouer aux Lakers, il est finalement envoyé à Dallas. Et ce n’est pas un moindre détail de l’histoire. Alors qu’il ne lui reste que quelques mois de contrat, les Mavericks ont trouvé de quoi palier au départ de Jalen Brunson. Mais en ce faisant, ils entrent dans un sprint pour valider leur projet.
Dans une saison déjà bien entamée, la franchise s’offre un prêt pour convaincre Kyrie Irving de rester. Un prêt coûteux puisqu’il a fallu abandonner des ressources importantes pour l’acquérir : Dorian Finney Smith, élément vital de sa défense, Spencer Dinwiddie qui s’est avéré un créateur capital pour Dallas, un 1er TDD (2029) et deux 2eme TDD.
Aux côté de Kyrie, arrive le seul Markieff Morris, dont les années en NBA semblent comptées et le défi sera donc double.
Créer une entente globale avec Kyrie, ce qui n’est pas chose aisée au vu de son historique. Rendre l’équipe fonctionnelle pour pouvoir terminer solidement la saison. Deux choses probablement liées, mais dont le futur de la franchise semble désormais dépendre.
Un échange non sans risque
Nous le disions il y a quelques temps, les Dallas Mavericks étaient toujours en position d’obtenir une star. S’il était difficile de savoir laquelle serait disponible la première, toujours est-il que Mark Cuban a une fois de plus fait parler son goût du risque. Aller chercher une star désormais perçue comme instable (demande de départ d’une équipe des Cavaliers triple finaliste ; engagement à prolonger avec les Boston Celtics avant de s’en aller quelques semaines plus tard ; diverses demandes d’échanges à Brooklyn) avec seulement quelques semaines garanties, ce n’est pas une mince affaire pour la franchise.
D’une part, car le coût n’empêche certes pas nécessairement Dallas de se repositionner sur une star en cas d’échec (la franchise possède encore ses picks entre 2024 et 2028), mais cela affaibli de futurs packages à proposer.
En laissant son 1er pick 2029 et 2 second TDD, ce sont donc des ressources en moins pour enrichir son effectif ou bouger plus tard. En raison de la Stepien rule, il n’est pas possible de transférer des 1er tours de draft 2 saisons consécutives.
Ce qui signifie qu’en cas d’échec, Dallas n’aura que 2 1er TDD à proposer en brut (2025 et 2027), et pourrait donc perdre complètement la main sur son futur en laissant la main à un partenaire d’échange sur ses picks (2024 et 2026).
Mais surtout, la franchise se lance dans un échange qui n’est pas gratuit pour l’équilibre de son groupe.
Si le départ de Spencer Dinwiddie est largement compensé par l’ajout de Kyrie Irving, celui de Dorian Finney-Smith est lui lourd de sens pour les Mavericks. Dallas s’offre 2 stars hautement compatibles offensivement, qui vont pouvoir aussi bien se relayer qu’évoluer ensemble sur le terrain. En revanche, elle se constitue un back-court peu réputé pour sa défense et laisse le poste d’ailier titulaire vacant.
Or, “DFS”, était un joueur capital pour rendre la défense texane viable. Le problème ? Seul Josh Green semble avoir le profil pour remplacer Finney-Smith dans le 5 de départ, mais le joueur est moins abouti que son aîné tant offensivement que défensivement. Une question se pose donc nécessairement, est-ce que ce trade en appelle un suivant, alors que la “trade deadline” approche ?
Intégrer Kyrie Irving offensivement, une formalité ?
Luka Doncic est le pilier de l’attaque des Mavericks.
Tout passe par le Slovène, cela ne date pas d’hier. Dans ces conditions, jouer à ses côtés peut se révéler être un véritable défi, si l’essentiel de votre jeu passe par le fait de porter la balle. Avec 42,7% d’USG cette saison et déjà 42,4 l’an passé, il est nécessaire d’être capable de s’adapter pour exister à son contact.
La force Kyrie Irving dans ce contexte est double. Tout d’abord, c’est un joueur capable d’évoluer aussi bien avec que sans la balle. Rares sont les stars qui excellent autant dans le jeu “on-ball” que “off-ball“. Kyrie fait partie de celles-là et on peut sans aucun doute imaginer que cela fait partie des raisons qui ont poussé les dirigeants de Dallas à tenter le pari.
En outre, rien de mieux pour s’adapter rapidement que d’avoir déjà été mis dans cette position. Quand LeBron James a décidé de revenir à Cleveland, Kyrie a du s’adapter à la présence la plus dominante de la ligue à ses côtés.
Une transition qui a semblé sans effort pour l’ex-meneur des Cavaliers. Pourtant, s’il est parti pour avoir son équipe, il a encore réussi à s’adapter à un nouveau contexte potentiellement compliqué à Brooklyn. Lorsque James Harden a rejoint les Nets à la trade deadline 2021, formant un impressionnant trio d’attaquant avec Kyrie Irving et Kevin Durant, Irving a une nouvelle fois prouvé sa faculté à s’adapter sans difficulté. Bien sûr, cette adaptation est à prendre avec des pincettes tant les blessures ont limité le nombre de match réalisés ensemble.
Toutefois, décalé de sa fonction de meneur de jeu, il a su se repositionner en l’espace de quelques matchs tout en gardant une place primordiale dans l’attaque de Brooklyn. Or si James a lui-même fait ses ajustements en arrivant aux Nets, il va sans dire que le jeu de Luka Doncic possède énormément de similarités avec celui d’Harden.
De quoi laisser présager une adaptation immédiate avec le slovène ?
Probable, au fond, Kyrie Irving n’est pas un meneur au sens classique du terme. Plus orienté scoring que création pour autrui, ce rôle est finalement celui qui lui incombe le plus naturellement en attaque.
C’est pour cette raison que ses associations avec LeBron ou Harden paraissaient si logiques. En atteste son profil via Cleaning the Glass.
Efficacité élite au scoring (PSA), forte tendance à opter pour le tir ou à provoquer une faute (Usage élevé), tendance à préférer une autre issue que la passe (faible taux AST:USG) :
En principe, à quoi s’attendre ?
Si on devait résumer rapidement de quoi devraient être fait cette association, il suffira en réalité de reproduire ce qui était fait avec Jalen Brunson.
Quand les deux joueurs partageront le terrain, Luka Doncic restera le principal initiateur. Kyrie Irving est suffisamment actif off-ball pour tirer son épingle du jeu, et comme par le passé, il agira en tant que second porteur de ballon. Soit quand Doncic sera obligé de lâcher la balle car la défense l’y obligera, soit quand le décalage sera créé.
Irving agira probablement de manière assez dynamique, recevant la balle en sortie d’un écran off-ball ou tout du moins, en étant déjà en mouvement. De quoi profiter de la gravité de Luka Doncic et se rendre plus dangereux en étant déjà une menace dès la réception (et en laissant moins de temps à la défense pour s’adapter).
Les Mavericks possèdent un spacing de qualité avec énormément de shooteurs naturels à apposer à leurs stars.
Ils ont de quoi jouer un spead pick & roll optimal pour offrir à leurs meneurs une attaque facile du panier. Tout comme avec Jalen Brunson, il faut s’attendre à voir Dallas faire en sorte que Irving soit donc déjà “lancé” lorsque la balle lui arrivera :
L’autre élément clé de cette association sera le “stagger“. Si posséder un second joueur capable d’orchestrer le jeu à un niveau élite pour les Mavericks est une clé pour complexifier la défense sur Doncic, notamment en Playoffs, c’est également clé pour gagner les minutes sans Doncic.
Par définition, le stagger est l’agencement des rotations de manière à ce que des titulaires restent avec des joueurs de banc en permanence.
Pour Dallas, cela signifie posséder un joueur avec un niveau de création et d’efficacité de haut niveau en permanence sur le terrain afin de limiter les temps faibles.
En la matière, Kyrie représente une option de luxe : scoreur élite en termes d’efficacité, à l’aise en tant que meneur principal ou secondeur, force majeure en isolation et passeur solide.
Pour les Mavericks, reste à défendre
Nous le disions en introduction, si l’échange est séduisant, il possède néanmoins une lacune majeure : la défense.
Cette saison, les Dallas Mavericks possèdent le 24eme defensive rating de la ligue. Cette place moribonde ne semble pas en passe de s’améliorer.
D’une part parce que la paire Irving – Doncic représente une cible potentielle si vous possédez un extérieur capable de les attaquer. D’autre part parce que le départ de Dorian Finney-Smith a de quoi être critique s’il n’est pas remplacé.
Évidemment, il s’agira de suivre la trade deadline des Mavs pour savoir si la version actuelle de l’effectif sera celle qui terminera la saison. Cependant, une absence de défenseurs extérieurs compétents peut mettre une énorme pression sur un secteur intérieur en manque d’une protection d’arceau capable de jouer plus de 30 minutes par match.
Or, pour séduire Irving, être capable d’être compétitif sur cette fin de saison est un véritable plus. Pour cela, atteindre la post-saison et réaliser une performance prometteuse est nécessaire.
Alors que Doncic fait pression sur le front-office pour être capable de viser haut rapidement, il faudra pouvoir mettre en place une défense viable d’ici la fin de saison. A ce stade, Dallas semble être à 2 joueurs solides de pouvoir proposer des rotations vraiment convaincantes défensivement.
Pourtant, les Mavs jouent gros sur cette période d’essai. Et gagner en post-saison avec une des pires défenses de la ligue peut vite être hors de portée.
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Mark Cuban reste Mark Cuban. Et si quelqu’un était prêt à tenter le pari Kyrie Irving sans engagement de prolongation, c’était bien lui.
Un coup de poker a l’image du personnage et qui va ouvrir des semaines cruciales. Si Irving venait à partir cet été, ce qui semble tout à fait faisable pour le meneur, les Mavericks auraient abandonné plusieurs tours de draft et deux joueurs clés de la rotation pour quelques mois du fantasque, mais génial, meneur.