La saison des Bulls aura véritablement été tortueuse. Pas promis à une année de tout repos, ils ont démarré pied au plancher, avant de rater quelques virages, connu des hauts et des bas, fait quelques sorties de routes, pour finalement accrocher les Playoffs au dernier match de la saison. D’ailleurs, même en post-saison, ils ont fait les choses en dents de scie : d’abord vainqueurs dans les 2 premiers matchs à l’extérieur, ils sont ensuite tombés 4 fois. Consécutivement. Une fin à l’image de leur saison : difficile à comprendre.
Il y a un un peu plus d’un an, j’avais écrit sur la nécessité absolue de laisser partir Derrick Rose, pour que Jimmy Butler puisse enfin prendre les commandes, et le débarrasser du fantôme de l’ex-MVP. Finalement, cet été, le staff des Bulls s’est décidé à prendre une décision crève-cœur, mais ô combien nécessaire. Échangé contre Robin Lopez en pièce principale, on s’attendait à voir le Front-Office de Chicago prendre le tournant de la jeunesse, ou du moins, entourer tranquillement Jimmy Butler de joueurs dans la fleur de l’âge. Que nenni ! Le staff a en effet fait l’acquisition de Rajon Rondo et Dwyane Wade. Forcément, le 5 de départ inquiétait dans une ligue en quête de toujours plus de spacing derrière l’arc, et on se retrouvait avec un 5 majeur bien incapable de dégainer régulièrement derrière la ligne des 7m23. Résultat, le groupe à alterner l’excellent et le médiocre, et le groupe a finalement coulé, malgré des fulgurances qui auraient pu laisser présager une sortie plus glorieuse.
Mais voilà, la saison des Bulls est terminée, et il convient maintenant de se demander à quoi ressemblera l’avenir. Et l’avenir à Chi-Town semble imprévisible en raison des tergiversations, de l’avarie et d’éternels allers-retours entre la logique et l’hérésie dans le staff de Chicago. Du coup, nous allons essayer de nous attarder un moment sur le futur potentiel des Bulls. Une tâche bien périlleuse qui pourrait encore nous réserver des surprises.
Contrats & Finances
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Au premier coup d’œil, on pourrait se dire que la situation des Bulls semble au point mort, dans la mesure où il ne leur resterait que 7M sous le salary cap pour la saison à venir, plafond qui devrait se situer autour des 102 Millions. Lorsque l’on regarde de plus près, la situation pourrait être bien différente : première chose, on n’a aucune idée du choix que fera Dwyane Wade qui possède une player option et pourrait choisir de mettre fin à son contrat. La saison n’a pas forcément été reluisante, mais il n’est pas certains que le vétéran décide de mettre un terme à son passage chez les Bulls. Il a déjà annoncé ne pas chercher le titre à tout prix et pourrait choisir de rester dans sa ville natale, surtout qu’il est détenteur d’un contrat avoisinant les 24M de dollars pour 2017-2018. Difficile à ce jour de prédire son choix, mais sa décision orientera fortement le reste de l’été pour son équipe.
Autre situation compliquée, celle de Rajon Rondo. L’ex-meneur des Celtics a encore fait parler de lui : bon en début de saison, il a ensuite fait des sorties de presses remarquées qui laissaient sous-entendre une rupture totale avec le reste du vestiaire, mais a déclaré pendant les Playoffs vouloir continuer à Chicago l’an prochain. Alors que la franchise empile les meneurs sans shoot, et que la situation sur ce poste semble un bourbier sans nom, on se serait attendu à voir le staff mettre fin à la collaboration avec le joueur, en coupant son contrat non-garanti, mais attention aux décisions de Gar Forman et John Paxson, toujours atteints de schizophrénie.
Dans le même temps, la franchise aura quelques dossiers chauds à gérer : Nikola Mirotic qui arrive à la fin de son contrat au termes d’une nouvelle saison frustrante : 10,6pts/5,5rbds (41,3% au tir, dont 34,3% à 3 points) aura probablement une offre de la part de ses dirigeants, qui s’aligneront si les contre-propositions ne sont pas trop élevées. On trouvera également la situation de Michael Carter Williams, dont la valeur a chuté d’année en année, mais qui pourrait partir selon la décision autour de Rajon Rondo. Enfin, Joffrey Lauvergne et Cristiano Felicio ont également une Qualifying offer, mais ils ne seront probablement pas des priorités, même si le pivot Brésilien fera certainement parti du “projet” de Chicago à moyen termes. Enfin, vient Isaiah Canaan qui sera probablement conservé l’an prochain, à 1,5M l’année, autant faire des économies.
Du coup, en distribuant les qualifying offers, et en admettant que Wade & Rondo sortent de leur contrat, la franchise aurait seulement 50,4M de cap occupé. Si Wade reste, il y aura 74,2M d’occupés, si les 2 restent 87,6M. Le tout avec potentiellement des joueurs à renouveler. Une situation qui serait bien complexe, mais qui donne une idée sur la situation de l’équipe. Difficile à ce jour d’imaginer quel sera le roster cet été, donc difficile de se pencher sur les agents libres disponibles, mais tout cela semble bien compliqué, et surtout, difficile d’imaginer les Bulls sortir de cette période vraiment grandis, ou avec un cap stratégique plus clair.
Qui à la barre ?
Fred Hoiberg vient de terminer sa seconde saison à la tête de la franchise, et son coaching laisse toujours aussi pantois. Incapable d’afficher des rotations régulières, ni de vraiment transcender un groupe, il n’a certes pas eu l’effectif idéal pour jouer le jeu universitaire qu’il prônait, mais force est de constater que sa force d’adaptabilité est proche du néant. Bien sûr, tout n’est pas à jeter, mais obtenir un nouveau coach pourrait être à l’ordre du jour dans le but de rassurer de potentiels agents libres. De même, l’effectif des Bulls n’est certes pas un incontournable de la ligue, mais il possède suffisamment de talents pour en faire un solide prétendant pour les Playoffs, ce que la franchise a été sur le fil, et en finissant derrière des équipes plus jeunes et inexpérimentées.
Hoiberg obtiendra peut-être une saison supplémentaire, mais il serait temps pour les dirigeants de remettre un peu d’ordre dans la franchise, et dans ces situations, un coach en échec est une première cible pour donner un nouvel élan à un groupe. On a vu cet été, avec Houston, comment un coach peut transformer une franchise lorsqu’on fait le bon choix, et qu’on lui donne les clés dont il a besoin pour construire quelque chose. En tout cas, les semaines doivent être compliquées pour l’actuel coach de Chicago.
Quelles opportunités à la draft ?
La draft a gagné en visibilité hier, et nous savons désormais que les Bulls drafteront en 16eme position, et derrière quelles franchises ils seront.
La première questions que l’on peut se poser, est que cherche la franchise ? A priori, la draft doit être cruciale pour eux, puisque le groupe a pris en âge là ou la direction annonçait un rajeunissement autour de Jimmy Butler. En faisant partir Doug McDermott et Taj Gibson, elle s’est par ailleurs privée d’un shooteur à 3 points et d’un intérieur solide. Dans une équipe qui manque de spacing, et avec un All-Star qui a besoin d’espace, la priorité semble néanmoins d’obtenir du tir longue distance.
Si les Bulls restent à la 16eme place, on peut s’attendre à les voir drafter Luke Kennard. L’ex-joueur de Duke a prouvé cette saison qu’il pouvait être un excellent tireur à 3 points, et s’intégrer dans un collectif.
Toutefois, la bonne nouvelle pour Chicago, est qu’ils peuvent finalement drafter à presque toutes les positions. Les seuls titulaires incontournables sont Wade, Butler et Lopez. Pourtant, seul Butler semble un joueur sur qui la franchise peut construire, ce qui laisse l’opportunité de prendre le meilleur joueur disponible, peu importe son poste. Les priorités auraient pu être les postes 1 et 4, malheureusement la draft remplie de meneurs de premier ordre risque d’entraîner un rush sur ce poste. Difficile hélas pour Chicago de remonter dans cette dernière sans mettre Butler dans un échange, et donc en relançant un processus de reconstruction.
Du coup, là encore l’orientation de la franchise semble dépendre de la vision peu tranchée du front-office.
Quel choix faire ?
La réalité, c’est que la franchise tient à ce jour sur les épaules de Butler. Si les dirigeants croient en ses chances d’être le visage de l’équipe pour les 5/7 ans à venir, et donc leur capacité à le conserver au termes de son contrat actuel, alors ils vont chercher à s’améliorer pour l’an prochain. Dans ce cas, Jimmy restera, et Wade pourrait prolonger l’aventure, lui qui semble avoir lié son destin à celui de la star des Bulls.
Néanmoins, si construire autour de Butler semble une position solide, tant le joueur est complet dans sa production des deux côtés du terrain, difficile de trouver cette équipe de Chicago attractive en l’état, et il semble que le groupe possède peu de joueurs susceptibles d’exploser dans les années à venir. Bien sûr, on a vu l’an passé que la franchise peut attirer des éléments via le marché, mais ce fut une année exceptionnelle. Elle est trop forte pour espérer un choix de draft élevé dans les saisons à venir, mais trop faible pour qu’on voit en elle une équipe à qui il manque un élément pour prendre une ampleur supérieure. En effet, les situations aux postes 1,2,4 sont des solutions court-termistes voire vacantes et le banc ne possède pas une hiérarchie claire, ni d’éléments de premier ordre.
Il est délicat de lancer une reconstruction en l’état, toutefois cette option doit sérieusement être envisagée, avant d’encombrer le cap space de contrats longue durée dans une situation désespérée. A l’heure actuelle, le staff a pour mérite d’avoir conservé une flexibilité et des finances saines, mais si aucun gros poisson ne mord cet été (Kyle Lowry, pourquoi pas), alors il faudra envisager de repartir de la base. Avec ou sans Butler, mais difficile de l’imaginer accepter des années de disettes, surtout pour des dirigeants avec qui les relations sembleraient être tendues.
Malheureusement, la franchise a raté le tournant l’an passé, en décidant d’obtenir des vétérans aux profils peut complémentaires. S’ils ont probablement des années devant eux, ils ne correspondaient pas au basket que voulait prôner le coach, le staff, ni à l’envie de rajeunir et construire autour de qualités athlétiques, et d’un jeu en phase avec la tendance actuelle en NBA : plus de spacing. L’avenir semble s’assombrir pour une franchise qui paraissait avoir toutes les cartes pour opérer un tournant, mais qui a enterré sa culture en laissant partir ses cadres et son coach (Thibodeau), qui s’il avait montré ses limites, avait le mérite de donner une identité à la franchise et d’obtenir l’adhésion de son vestiaire.
Toujours est-il qu’à l’heure actuelle, l’embarquement vers le futur possède peu de perspectives très excitantes pour les Bulls. Pour un voyage “vers l’infini et au-delà”, on repassera.