L’été prochain, une poignée de joueurs espèrent signer un contrat max. Qu’ils soient vétérans ou jeunes basketteurs à la recherche de leur premier gros contrat, cette saison sera déterminante pour leur prochain salaire. Zoom sur huit cas à suivre.
La saison 2017-18 débute à peine et pour beaucoup, c’est la priorité. Après quelques matchs, l’heure est aux premières impressions et aux conclusions un peu trop précoces. Dans les bureaux des General Managers cependant, on pense aussi à l’avenir et notamment à la prochaine période de signature des agents libres.
En juillet 2018, de nombreux basketteurs très convoités seront sur le marché. Tout le monde parle déjà des éventuels départs de LeBron James et Paul George. Ces deux All-Stars, de même que Kevin Durant s’il ne lève pas son option de joueur pour 2018-19, se verront proposer des contrats max à coup sûr. Mais rares sont les basketteurs qui bénéficient d’une telle certitude. J’analyse ici le cas de huit joueurs qui devraient ou pourraient signer un contrat max l’été prochain, quatre vétérans et quatre jeunes joueurs qui sortent de leur contrat rookie. Certains signeront très probablement un tel contrat, d’autres ont encore beaucoup à prouver.
Les vétérans
DeMarcus Cousins (Pivot, New Orleans Pelicans)
Statut en fin de saison : agent libre sans restriction
Cousins joue déjà sa huitième saison de NBA en 2017-18. Son talent est établi sans nul doute et il est sûr à 99,9% qu’il signera un contrat max en juillet prochain, avec New Orleans ou non. Pourtant, certains dirigeants de franchise ou coachs hésiteraient sans doute avant de s’engager sur le long terme avec le pivot. La faute à une réputation de joueur difficile acquise à Sacramento avant que les Kings ne décident de s’en séparer pour repartir de zéro.
Sur le parquet, DeMarcus Cousins est un des tout meilleurs de la NBA. Sa palette offensive en fait une force dans la raquette mais aussi à distance, en particulier depuis qu’il a développé son tir à 3 points depuis la saison 2015-16. Il affiche une efficacité correcte, sans plus, à ce titre : 36,1% la saison dernière sur cinq tentatives par match, 34,1% sur 7,3 tentatives sur les six premiers match de cette saison. Son tir à distance n’en demeure pas moins un atout indéniable. Sa capacité à attirer les intérieurs adverses loin de la raquette est précieuse et la progression de son tir primé s’est faite en grande partie au détriment des tirs à mi-distance moins efficaces. Cette tendance s’est d’ailleurs accentuée depuis son arrivée en Louisiane, dans un souci de trouver de l’espace avec Anthony Davis.
Cousins est une des présences les plus imposantes de la ligue dans la peinture. Il figure parmi les joueurs les plus efficaces au poste par exemple, se situant au-delà du 80ème percentile sur les deux saisons précédentes d’après NBA.com. Bien que les tirs au poste soient dévalués dans la NBA moderne, le jeu de Cousins dos au panier reste une force, notamment parce qu’il y attire énormément de fautes adverses lui permettant de tirer des lancers-francs sur près d’un quart de ses possessions au poste.
Malgré cela, il n’est jamais parvenu à tirer à plus de 60% de réussite près du panneau depuis 2014-15, ce qui le classe parmi les intérieurs les moins bons de la NBA à cet égard selon Cleaningtheglass.com. La faute au recours fréquent à des post-ups qui ne sont pas les situations de tir les plus létales mais aussi à son inefficacité dans le pick&roll lorsque Cousins obtient la balle après un écran. Sur les deux dernières saisons, il se situait en dessous de la moyenne dans ces situations avec moins de 50% de réussite au tir.
Cette déficience surprend pour un intérieur de son calibre et reflète son style de jeu atypique. Autre facette inattendue de sa palette offensive : le pivot est un des joueurs les plus doués de la ligue pour les tirs à l’arrêt (spot-up) et en sortie d’écran. En d’autres termes, Cousins affiche de bonnes qualités offensives traditionnellement associées avec les arrières. Je vous renvoie à ce propos à une analyse très intéressante publiée sur Basket-infos.com pour approfondir ce sujet.
De l’autre côté du parquet, Cousins sait peser sur la défense et limiter l’attaque adverse près du cercle. En 2014-15 et 2015-16, la réussite au tir des adversaires de Sacramento près de l’arceau chutait ainsi de 5,4 et 4,5% respectivement lorsqu’il était en jeu selon Cleaningtheglass.com. Mais son effort n’est pas toujours au rendez-vous et ses adversaires avaient davantage de réussite l’année dernière lorsqu’il était présent.
Bonne nouvelle pour les Pelicans, il a toutes les chances de se montrer plus actif cette année, motivé par sa nouvelle association avec Davis mais aussi son futur contrat. Cousins s’est préparé sérieusement durant l’été et joue à un très haut niveau pour débuter la saison, y compris en défense. De quoi donner envie à plus d’un recruteur même si la question peut se poser : est-il dans de meilleures dispositions car il entame sa première saison loin des Kings ou parce qu’il sera agent libre dans quelques mois ?
Pour les franchises qui souhaiteront signer Boogie, il faudra lever cette inquiétude. Et ne pas trop se focaliser sur un autre gros point noir sur son profil : il n’a encore jamais joué un match de Playoffs dans sa carrière.
DeAndre Jordan (Pivot, Los Angeles Clippers)
Statut en fin de saison : agent libre sans restriction s’il n’active pas son option de joueur
Le pivot des Clippers est-il toujours à la hauteur d’un contrat max ? En 2015, la question ne s’était pas posée pour Doc Rivers et Los Angeles, pas plus que pour les malheureux Mavericks qui pensaient l’avoir subtilisé aux Clippers avant la saga du kidnapping.
Jordan peut redevenir un agent libre dès l’été prochain s’il choisit de ne pas lever son option de joueur pour une année supplémentaire. Tester à nouveau le marché juste avant ses 30 ans serait sans doute sa meilleure opportunité de signer un nouveau contrat juteux.
L’avantage avec DeAndre, c’est que ses qualités et défauts sont très bien identifiés. Il est un monstre défensif dans la raquette et figure parmi les meilleurs pivots dans ce domaine avec Rudy Gobert. Sur les deux dernières saisons, les adversaires de Los Angeles ont tenté significativement moins de tirs près du cercle en sa présence (plus de 6% de différence) d’après Cleaningtheglass.com. Qu’il s’agisse de défendre le pick&roll, en isolation ou sur des post-ups, il domine la concurrence (Andre Drummond, Hassan Whiteside, Dwight Howard) dans tous les domaines et seuls le pivot français ainsi que Myles Turner lui tiennent la dragée haute d’après NBAMath.com.
Son impact est également consistant dans le temps : il a sauvé au moins 150 points en défense sur chacune de ses quatre dernières saisons selon les analyses de NBAMath.com. De même, il est un des meilleurs rebondeurs et contreurs de la ligue parmi les intérieurs depuis 2013-14, excédant systématiquement le 85ème percentile dans ces catégories d’après Cleaningtheglass.com. Au-delà des stats, Jordan est devenu au fil de sa carrière un véritable patron, communiquant avec ses coéquipiers pour organiser la défense et entraver les possessions adverses.
En attaque, Jordan termine les actions avec talent près du cercle. Il a marqué 1,40 et 1,52 point par possession jouée en situation de pick&roll sur les deux dernières années selon NBA.com. Sa réussite effective au tir est la meilleure de la ligue sur les cinq dernières saisons. Même en prenant en compte ses problèmes aux lancers-francs, sa réussite véritable au tir se situe dans le top 10 sur cette même période. Bien sûr, Jordan ne prend pas de tirs loin du panier mais au moins il connaît ses limites et sait exploiter ses forces, ce qui est une qualité notable.
Pour autant, proposer un contrat max à DeAndre l’été prochain présente deux types de risques, l’un théorique, l’autre plus concret. Pour la théorie, il faut noter qu’il aura 30 ans au début de la prochaine saison et son futur contrat pourrait se terminer dans quatre ou cinq ans. On peut imaginer que ses qualités athlétiques puissent se dégrader sur ce laps de temps et qu’il soit davantage sujet à des blessures.
S’il est toujours compliqué de s’avancer sur l’avenir du physique d’un joueur, il faut rappeler que jusqu’ici, Jordan répond systématiquement présent. Sur les cinq dernières saisons, il n’a raté que six matchs. Il n’a jamais présenté de souci physique particulier durant sa carrière. A moins d’une catastrophe imprévisible, Jordan a toutes les chances de continuer à jouer à haut niveau sur la majorité de son prochain contrat.
L’autre enjeu à peser pour les Clippers ou une autre franchise qui souhaite s’attirer ses services est celle de la place accordée à un tel joueur dans la NBA moderne. Les pivots imposants doués en défense et près du cercle ont sans aucun doute leur rôle dans la ligue, malgré le mouvement small ball et la priorité donnée au tir à distance et à la vitesse. Mais consacrer une large partie de son cap salarial (35% dans le cas de Jordan après sa dixième saison dans la ligue) à un tel joueur peut rebuter plus d’un front-office. Il deviendrait difficile de constituer un effectif compétitif pour jouer le titre avec une telle charge salariale pour un joueur sujet aux fautes volontaires qui ne crée pas ses propres tirs et n’est pas un franchise player au sens classique du terme.
Cela pourrait faire hésiter les Clippers. Ils ont par ailleurs envisagé de l’échanger contre Clint Capela de Houston l’année dernière. Et une possible prolongation de contrat avant la fin de cette saison a été évoquée mais semble peu probable. De quoi laisser la porte entrouverte à un déménagement de Jordan cet été, si toutefois une équipe décide de mettre le paquet pour s’attirer ses services.
Chris Paul (Meneur, Houston Rockets)
Statut en fin de saison : agent libre sans restriction
CP3 a surpris la NBA en obtenant son transfert des Clippers aux Rockets en juin dernier. Dans le processus, le meneur de 32 ans a levé son option pour remplir sa dernière année de contrat. Il deviendra donc un agent libre l’été prochain à l’issue de cette première saison aux côtés de James Harden et Mike D’Antoni.
A certains égards, parier sur Chris Paul et lui proposer un contrat max pour s’attacher ses services, ou le retenir dans le cas de Houston, tombe sous le sens. Le Point God continue d’afficher des statistiques phénoménales après 12 saisons. Son PER se situe à 26 ou mieux depuis 2011. Sur les paniers rentrés par ses anciens coéquipiers de Los Angeles la saison dernière, 44,5% ont bénéficié d’une passe de Chris Paul (96ème percentile parmi les meneurs d’après Cleaningtheglass.com).
Paul joue avec une efficacité rarement atteinte dans l’histoire de la NBA en termes de réussite au tir, de passes décisives et de pertes de balle. Il se distingue dans la majorité des types d’actions offensives, qu’il s’agisse du pick&roll, des isolations, des post-ups ou des tirs à l’arrêt après une passe. Il excédait le 80ème percentile de la ligue dans ces domaines la saison dernière selon NBA.com.
En plus d’être un meneur hors pair, sa défense est de qualité, une rareté parmi les meilleurs meneurs de la ligue. Cette faculté le distingue des Damian Lillard, Russell Westbrook et autres Kyrie Irving, plus jeunes, plus rapides et plus spectaculaires en attaque mais souvent dépassés en défense. Sur sa dernière année aux Clippers, leurs adversaires réussissaient moins souvent leurs tirs, obtenaient moins de lancers-francs et marquaient moins de points avec Paul sur le terrain, tandis qu’ils perdaient davantage la balle. En dehors de sa première saison à LA (2012-13), l’évaluation défensive des Clippers était systématiquement meilleure lorsque Paul était sur le parquet.
Juger la performance défensive de CP3 reste difficile. D’une part, les stats (générales et analytiques) peinent souvent à distinguer l’impact défensif d’un seul joueur. Et pour toutes ses qualités, Paul est désavantagé par sa taille, qui ne lui permet pas de contenir à lui seul les arrières les plus explosifs de la ligue. D’autre part, Paul a très peu joué sans DeAndre Jordan (moins de 200 minutes l’année dernière). Il est donc compliqué de mesurer précisément la qualité de la défense de Paul, indépendamment de qui protège la raquette derrière lui. Mais ce n’est pas cette imprécision qui fera douter les Rockets ou une autre franchise au moment de lui proposer un nouveau contrat cet été.
Son âge et son état de santé en revanche vont les interpeller. L’été prochain, CP3 aura 33 ans et 13 saisons dans les jambes. Il sera en mesure de se voir proposer un contrat max de quatre ou cinq ans, en raison notamment d’une modification de l’accord collectif régissant la NBA qui permet désormais à un joueur de signer un tel contrat dès lors qu’il n’atteint pas l’âge de 38 ans au 1er octobre d’une des années du contrat (Paul est le président de l’association des joueurs NBA qui a négocié l’accord avec la ligue). Mais est-ce le bon pari pour porter une équipe au sommet, qu’il s’agisse de Houston ou d’une autre franchise ?
CP3 est un des meilleurs meneurs de l’histoire de la NBA mais le payer plus de 40 millions par an à 35, 36 et 37 ans semble diablement risqué. Il subit régulièrement des blessures ces dernières années, la dernière en date l’ayant écarté pour le début de la saison. En outre, Paul n’a pas exactement les caractéristiques physiques d’un joueur à même de bien vieillir en NBA.
Enfin, Paul n’a jamais trouvé le succès en Playoffs. Si les échecs répétés de ces équipes ne sont pas imputables au seul meneur, son impact est souvent amoindri lors du tournoi final, face à la meilleure compétition du monde, comme l’a détaillé Jonathan Tjarks de The Ringer cet été (en anglais).
In fine, Chris Paul se verra sans doute proposer un contrat max l’été prochain, à moins que ces soucis de santé ne dégénèrent. Qu’il s’agisse de Houston après une expérience réussie avec Harden ou d’une autre franchise, les candidats ne devraient pas manquer. Même si aller dans cette direction pourrait les empêcher de tutoyer les sommets en fin de saison.
Isaiah Thomas (Meneur, Cleveland Cavaliers)
Statut en fin de saison : agent libre sans restriction
Le camion de la Brinks va-t-il faire un détour par la maison d’Isaiah Thomas ? La situation du nouveau coéquipier de LeBron James est certainement l’une des plus intrigantes à suivre cette année. En matière de jeu, son retour de blessure est particulièrement attendu, pour savoir s’il peut toujours jouer à un haut niveau et s’il peut apporter un plus dont les Cavaliers semblent avoir besoin en ce début de saison, même s’il n’aidera pas en défense.
Son retour sur les parquets aura également une incidence sur son futur contrat. L’idée de proposer un contrat max à Thomas n’était pas choquante en mai dernier, alors qu’il terminait une saison d’anthologie avec les Celtics. Son transfert par Boston a toutefois mis en avant une question qui tourmentait les fans des Celtics et leurs dirigeants : est-ce vraiment une bonne idée de tout miser sur un meneur d’1m75 après ses 30 ans, alors que ses qualités athlétiques risquent de se dégrader et de limiter son impact ?
Danny Ainge a trouvé une échappatoire en l’échangeant contre Kyrie Irving. Désormais, le prochain contrat de Thomas est le souci de Cleveland ou d’une autre équipe à la recherche d’un meneur talentueux. Plusieurs scénarios se profilent. Si Thomas ne parvient pas à revenir à son meilleur niveau, peu de franchises mettront un contrat max sur la table, si ce n’est aucune. S’il montre que ses pépins de santé sont derrière lui en revanche, il y aura certainement un pari à tenter.
Reste à savoir si le jeu en vaut la chandelle. Depuis ses débuts en NBA, Thomas est un scoreur hors pair. Son ratio Plus/Moins offensif ramené à la moyenne a toujours été de qualité depuis sa saison rookie selon Basketball-reference.com. En termes de points marqués sur 100 tirs tentés, il se situe systématiquement au-delà du 85ème percentile des meneurs les plus efficaces d’après Cleaningtheglass.com.
Le risque avec Thomas est de penser que sa dernière saison avec Boston est représentative de ce qu’il va produire au cours de son prochain contrat. Concrètement, il y a de fortes chances que celle-ci soit une exception sur l’ensemble de sa carrière. Son nombre de points marqués par match (28,9 en 2016-17) a excédé sa meilleure saison de 6,7 points. Sa réussite effective au tir de 54,8% le classait dans le 86ème percentile des meneurs. Auparavant, il n’a jamais dépassé le 75ème percentile, à l’exception de sa saison rookie (52,1%, 84ème percentile).
Il ne s’agit pas de dire que Thomas a eu de la chance la saison dernière bien sûr. Et il est tout à fait possible qu’il ait passé un palier avant de quitter les Celtics. Mais il y a de bonnes chances pour que sa sixième saison de NBA à l’âge de 28 ans soit l’apogée de sa carrière, à la fois en termes de physique et de jeu. Dès lors, il aura du mal à rééditer une telle saison à 30 ans et plus. Cela ne signifie pas que ses performances chuteront drastiquement par la suite mais simplement qu’il ne sera pas aussi bon.
Les jeunes joueurs à la recherche d’un premier gros contrat
Aaron Gordon (Ailier, Orlando Magic)
Statut en fin de saison : agent libre restreint
Le quatrième choix de la draft 2014 n’a pas eu l’opportunité de signer une extension de contrat avant le début de cette saison. Sur ses trois premières saisons, l’ailier explosif n’a pas exactement justifié sa sélection à un aussi haut niveau, bien que la gestion hasardeuse du Magic y soit pour quelque chose.
Les performances de Gordon sur les premiers matchs prêtent à l’optimisme, autant pour Orlando que pour le portefeuille du joueur. Au-delà de son explosion face à Brooklyn (41 points à 14/18 dont 5/5 à 3 points et 14 rebonds), Gordon donne l’impression qu’il peut passer un palier cette saison. La rotation clarifiée d’Orlando, qui lui permet de jouer désormais comme un poste 4 et non plus comme un ailier shooteur, y est sans doute pour beaucoup. Le Magic semble vouloir lui donner plus de place pour exprimer son potentiel cette année, sans doute pour identifier au mieux son potentiel et la pertinence d’une extension coûteuse.
Il est encore beaucoup trop tôt pour tirer des conclusions hâtives sur Gordon. Ses minutes ont légèrement progressé jusqu’ici, dépassant les 30 minutes. Dans le même temps, son usage a décollé, passant d’un taux de 20,1 à 24,8% selon Basketball-reference.com. Reflet logique de cette prise en main du jeu offensif d’Orlando, il tente bien plus de tirs que la saison dernière (14,2 contre 10,8). Et pour le moment, l’efficacité est au rendez-vous, sa réussite véritable au tir atteignant 66,2% (53% en 2016-17).
Bien entendu, il faut raison garder. Gordon a connu un maximum de succès sur ses premiers matchs. Il a marqué 59,1% de ses 3 points sur les cinq premiers matchs, alors que son pourcentage de réussite n’a jamais dépassé les 30% sur ses trois premières années. Clairement, Gordon n’est pas subitement devenu le meilleur tireur à 3 points de la ligue et sa réussite va redevenir réaliste. Il ne faut pas s’attendre à ce qu’il continue à rentrer les pull-ups à 3 points en transition avec régularité.
Par ailleurs, Orlando a mieux performé en attaque comme en défense sans Gordon lors de la poignée de matchs joués par le Magic en octobre. Cette tendance permet également de relativiser l’impact du joueur formé à l’université d’Arizona, même si là encore, il faut tenir compte de l’échantillon d’analyse limité. Orlando était une meilleure équipe la saison passée avec Gordon sur le parquet : d’après Cleaningtheglass.com, l’impact de Gordon sur la performance du Magic était évalué à 16 victoires supplémentaires sur 82 matchs, grâce notamment à un jeu offensif bien plus efficace.
A l’inverse, l’ailier n’a jamais pesé dans le bon sens sur la défense d’Orlando. Cet aspect de son jeu sera également une clé déterminante pour son futur contrat. Son replacement à l’intérieur lui a permis de renouer avec ses qualités de rebondeurs pour le moment. En cinq matchs, il a capté 15,3% des rebonds disponibles lorsqu’il était sur le parquet, une proportion en ligne avec sa deuxième année et bien supérieure à la saison dernière (9,6%) selon Basketball-reference.com.
Mais Gordon doit faire plus que prendre des rebonds pour mettre ses qualités athlétiques au service de la défense. Il a les outils pour être un bon défenseur mais peine encore à les exploiter, que ce soit en un contre un (44ème percentile de la ligue en défense d’isolation la saison dernière selon NBA.com), en couverture de joueur faisant écran dans le pick&roll (31ème percentile) ou en défense du meneur dans cette situation, même s’il s’en sort mieux (60ème percentile) dans ce domaine. Cela n’est pas négligeable car Gordon est fréquemment confronté à ce type de situation, plus qu’à celle de la couverture du roll man. Autre point positif, il est meilleur pour couvrir les attaquants en sortie d’écran (83ème percentile), un type de stratégie offensive de plus en plus utilisé, y compris par des intérieurs shooteurs.
Il sera plus aisé d’analyser les perspectives de Gordon pour son futur contrat plus tard dans la saison, lorsqu’on en saura plus sur son niveau de jeu véritable sur le long cours et son potentiel de Most Improved Player. Pour le moment, on peut quand même signaler que l’ailier a réussi son entrée en matière. Pour obtenir un contrat max cet été de la part d’Orlando ou d’un concurrent, il devra toutefois prouver qu’il ne s’agit pas d’un simple feu de paille.
Jabari Parker (Ailier, Milwaukee Bucks)
Statut en fin de saison : agent libre restreint
Jabari Parker veut un contrat max, à en croire les médias américains. Malheureusement pour lui, sa situation est très compromise. Il a subi une seconde rupture des ligaments croisés du genou la saison dernière, après une première blessure similaire durant sa saison rookie. De quoi refroidir les Bucks ou une autre franchise au moment de lui proposer un tel engagement.
Outre ses soucis de santé, Parker n’a pas nécessairement convaincu Milwaukee depuis son arrivée en 2014. Les Bucks cherchaient d’ailleurs à le transférer début 2017 avant que sa blessure ne le mette définitivement sur la touche.
En apparence, Parker a pourtant montré de bonnes dispositions en attaque. Il est un scoreur talentueux bien que moyennement efficace (56,3% de réussite véritable sur 51 matchs la saison dernière selon Basketball-reference.com) et s’avère tout à fait capable d’écarter le jeu grâce à son tir à 3 points (36,5% sur 3,5 tentatives l’année dernière) pour laisser de l’espace à Giannis Antetokounmpo. Il a également développé son sens du partage en étant passeur décisif sur 13,8% des paniers de ses coéquipiers en 2016-17 (84ème percentile parmi les ailiers d’après Cleaningtheglass.com).
Malgré cela, les Bucks sont meilleurs en son absence qu’avec lui sur le parquet depuis ses premiers pas en NBA. Sur sa dernière saison, son impact sur leur attaque n’était que marginal, malgré ses 20 points par match. Pour arriver à ce total, il tentait 16 tirs par match. Parallèlement, les adversaires marquaient avec plus de facilité en sa présence. En somme, ce qu’il apporte individuellement en attaque (54,43 points ajoutés sur la dernière saison d’après NBAMath.com) est largement contrebalancé par ses déficiences défensives (-44,23 points sauvés de ce côté du parquet). En 2016-17, les Bucks affichaient leur pire évaluation défensive (109,3 points encaissés sur 100 possessions) avec Parker sur le terrain d’après Behindthebuckpass.com (en anglais).
Il faut néanmoins remettre ces statistiques dans un contexte plus global. En premier lieu, Parker n’aura que 23 ans à la fin de la saison prochaine. Il est donc tout à fait possible, voire probable, qu’il s’améliore dans les années à venir si son physique le lui permet. De plus, il faut se souvenir qu’il a joué la saison dernière sans Khris Middleton dans le 5 de départ, puisque l’arrière est revenu peu de temps avant qu’il ne se blesse. De même, Thon Maker n’a pas été titularisé avant la dernière partie de la saison et Parker était aligné le plus souvent avec John Henson ou Greg Monroe. Il n’a donc pas beaucoup joué avec deux des titulaires, actuels et futurs, des Bucks.
Ces paramètres ne font rien pour lever les doutes sur le physique de Parker. Il aura à cœur de revenir à son meilleur niveau mais aucune date de retour n’a été annoncée pour le moment. Initialement, les Bucks avaient évoqué un délai d’un an avant qu’il ne retrouve les parquets. Cela lui laissera très peu de temps avant l’été et il a beaucoup à faire pour convaincre les dirigeants de Milwaukee. Si Parker compte bien signer un contrat max, il devra sans doute espérer qu’une autre franchise ne tente un pari risqué sur lui.
Jusuf Nurkic (Pivot, Portland TrailBlazers)
Statut en fin de saison : agent libre restreint
En trois saisons à Denver et Portland, le pivot bosnien a montré beaucoup de choses. Du bon, comme sa fin de saison dernière à Portland où il a aidé Damian Lillard et C.J. McCollum à rejoindre les Playoffs grâce à un double-double de moyenne (15,2 points, 10,4 rebonds en 29 minutes de jeu sur 20 matchs). Et du moins bon, à l’image de son manque d’investissement à Denver une fois placé sur le banc ou de sa condition physique pas toujours optimale lors de son passage dans le Colorado.
Si l’on se concentre uniquement sur ce qu’il a affiché à Portland, Nurkic est certainement candidat à un contrat max. Mais son œuvre ne se résume pas à la poignée de matchs joués avec les Blazers. Nurkic est clairement un risque en termes d’harmonie dans un vestiaire et d’investissement, sur le terrain et en dehors. Il vise une place importante dans un effectif et réagit mal lorsqu’il n’obtient pas ce qu’il veut.
Dès lors, la solution semble évidente : il suffit de confier les clés à Nurkic et d’en faire une option prioritaire dans l’équipe. Si cela peut fonctionner en théorie, ce n’est probablement pas la chose à faire pour porter une franchise vers les sommets. En attaque, le pivot est peu efficace. Son pourcentage de réussite véritable l’année dernière atteignait 52,8% d’après Basketball-reference.com. Pour situer les choses, Michael Kidd-Gilchrist affichait la même marque. En écartant les lancers-francs, sa réussite effective au tir le classait dans le 32ème percentile des intérieurs selon Cleaningtheglass.com. Cette inefficacité s’avère problématique puisqu’il utilise plus d’un quart des possessions des Blazers lorsqu’il est sur le terrain et tente plus de 14 tirs en 36 minutes.
Nurkic ne fait pas que tirer et sait distribuer le jeu lorsqu’il donne le meilleur de lui-même (16,3% de passes décisives à Portland en 2016-17). Un atout précieux pour aider Lillard et McCollum et compenser le manque d’espace autour des deux arrières stars. Mais il perd également beaucoup la balle (plus de 17% de pertes chaque saison).
Le pivot bosnien a toutefois montré sur 20 matchs qu’il pouvait apporter beaucoup à son équipe malgré ses déficiences. Avec lui, Portland a remporté 14 de ses 20 derniers matchs pour accrocher sa qualification en Playoffs devant les Nuggets. Mais il faut se demander si cela ne reflète pas davantage la performance d’un joueur à l’orgueil blessé ayant gagné beaucoup de temps de jeu après son transfert (11 minutes par match) que le niveau véritable d’un pivot titulaire de NBA.
Les qualités de Nurkic sont plus claires en défense, même si là encore, sa motivation y est pour beaucoup. Il affichait des stats sur 36 minutes de 2,3 contres et 1,5 interception sur sa fin de saison avec les Blazers, le genre de performance rarement réalisée par un joueur aussi grand comme l’a expliqué Zach Lowe en début de saison (en anglais). C’est arrivé 30 fois dans l’histoire de la NBA d’après Basketball-refrence.com et 23 de ses saisons sont l’œuvre de David Robinson, Hakeem Olajuwon et Vlade Divac. Plus largement, ses adversaires marquent plus difficilement lorsqu’il est sur le parquet depuis le début de sa carrière, notamment près de l’arceau.
Bien que l’échantillon soit encore limité, il semble également qu’il s’intègre bien dans le dispositif défensif de Portland qui le pousse à attendre le porteur du ballon dans le pick&roll plutôt que de l’attaquer derrière la ligne à 3 points : la défense des Blazers est devenue plus efficace en sa présence dans tous les domaines à l’exception des tirs à mi-distance. Plus globalement, la réussite effective au tir des adversaires est significativement moins bonne avec Nurkic sur le parquet, et ce depuis ses débuts.
Nurkic a les cartes en main pour continuer sur sa lancée de la fin de saison dernière et tirer le gros lot l’été prochain. Mais il doit d’abord prouver que le potentiel affiché à Portland peut être répliqué sur le long cours. S’il y parvient, une franchise, qu’il s’agisse des Blazers ou d’une autre, mordra certainement à l’hameçon et mettra l’argent sur la table pour s’attacher ses services.
Nikola Jokic (Pivot, Denver Nuggets)
Statut en fin de saison : agent libre restreint si Denver n’active pas son option d’équipe
Au vu de sa production offensive, Jokic est un des meilleurs contrats de la NBA. Le pivot serbe ne touche que 1,47 million de dollars cette saison et Denver a une option pour l’année prochaine à 1,60 million. En dépit de cette bonne affaire, les Nuggets ont tout intérêt à refuser leur option et à proposer un nouveau contrat juteux à leur joueur dès l’été prochain.
En agissant ainsi, Jokic sera un agent libre restreint et Denver pourra s’assurer qu’il restera dans l’équipe même si un concurrent lui propose un contrat max. Dans le cas contraire, il deviendra agent libre non restreint en 2019 et pourrait quitter le Colorado plus facilement. Dans ce scénario, il ne serait pas improbable de voir le pivot lâcher les Nuggets après avoir été sous-payé une saison de trop.
Jokic est en effet déjà un des meilleurs joueurs de la NBA en attaque. Son PER de 26,3 points le classait 11ème de la ligue la saison dernière. Scoreur talentueux capable de finir dans la raquette mais surtout de tirer à distance, il fait preuve d’une efficacité rare : sa réussite véritable au tir de 64% en 2016-17 n’a été dépassée que par Kevin Durant, DeAndre Jordan et Rudy Gobert parmi les joueurs ayant accumulé plus de 2.000 minutes de temps de jeu d’après Basketball-reference.com.
Surtout, le joueur de 22 ans est connu pour son sens de la passe. Aucun autre pivot n’a contribué davantage à faire marquer ses coéquipiers l’an dernier (28,8% de passes décisives). Au-delà des stats, Jokic fait preuve d’un flair spectaculaire pour distribuer les offrandes à ses partenaires. Ses qualités offensives en font le chouchou de nombreux observateurs qui lui prêtent un avenir de All-Star voire de joueur All-NBA.
Mais le jeune serbe n’est pas un joueur complet. Le Joker est également connu pour sa défense en-dessous de la moyenne, ce qui est toujours un problème pour un pivot censé incarner la dernière ligne de défense de son équipe. L’an passé, les adversaires des Nuggets marquaient plus facilement depuis toutes les zones du parquet, hormis les 3 points en dehors des coins, lorsqu’il était en jeu. Il ne s’en sort pas mal sur les post-ups (80ème percentile de la ligue d’après NBA.com) mais se montre particulièrement vulnérable en pick&roll lorsque le joueur qui fait écran termine l’action (30ème percentile). Il est encore pire lorsque son adversaire tire à l’arrêt après une passe (29ème percentile) ou l’attaque en un contre un (13ème percentile).
La saison 2017-18 devrait permettre d’en savoir plus sur la défense de Jokic et sa marge de progression. Ses statistiques de l’année dernière s’inscrivent dans le contexte d’une équipe avec la deuxième défense la plus poreuse de la ligue. Cette année, les Nuggets espèrent s’améliorer sur ce plan, notamment avec la venue de Paul Millsap. Le début de saison difficile de Denver ne prête pas à l’optimisme mais il est encore trop tôt pour tirer des conclusions définitives sur le niveau défensif de Jokic. Néanmoins, il semble peu probable qu’il devienne un jour un grand défenseur en NBA.
Le pivot n’a toutefois pas besoin de devenir un des meilleurs défenseurs de la ligue pour se voir proposer un contrat max. Sur la seule base de ses qualités offensives, il y a fort à parier que les Nuggets ou une autre équipe lui fera une telle offre. Mais Denver compte très certainement sur une progression de mauvais et confus à moyen et solide sur les fondamentaux dans ce registre pour justifier plus tranquillement un tel investissement.
Cela permettrait de construire plus facilement un effectif taillé pour aller loin en Playoffs. C’est d’autant plus vrai qu’il est difficile de trouver le complément parfait à un pivot qui ne défend pas : il faudrait qu’il s’agisse d’un poste 4 mobile et shooteur mais aussi capable de défendre la raquette et le cercle. A moins de persuader Draymond Green de rallier le Colorado ou de toucher le jackpot lors d’une future draft, un tel scénario ne devrait pas se réaliser.
Avec Millsap, Denver et Jokic ont une approximation de très bonne facture de ce modèle de joueur. Désormais, le Serbe doit prouver qu’il est capable d’élever son niveau de jeu défensif.