Ce n’est pas de gaieté de cœur que nous titrons cet article, surtout quand on a conscience d’être assez généreux dans la formulation. Après presque deux mois de compétition, l’heure est aux premières conclusions pour les franchises et les joueurs, avec des tendances claires qui commencent à se dégager. Nos joueurs français n’y échappent pas, eux qui sont encore cette année nombreux dans la grande ligue. Focus sur leur début de saison, pour la plupart quelque peu délicat.
Tony Parker (Charlotte Hornets / 10.3 pts, 1.7 rbds, 4.3 passes)
Non, ce n’est pas “honneur aux anciens” qui place TP en tête de cette liste, mais bien “honneur au plus fort”. Car en ce début de saison, le meilleur français à fouler les parquets, c’est lui. Après une année délicate dans sa franchise de toujours, Tony a décidé d’arrêter l’aventure avec les Spurs. Bien lui en a pris, car si les blessures ont entaché sa saison dernière, le meneur retrouve aujourd’hui une seconde jeunesse avec les Hornets. Remplaçant de Kemba Walker à Charlotte, il excelle dans son rôle de vétéran, et apporte plus qu’attendu sur le terrain. C’est simple, TP a retrouvé sa production numérique affichée il y a deux ans (avant sa blessure), en jouant 5 minutes de moins (19.6 min en moyenne). Surtout, il fait un bien fou à son meneur titulaire, qui n’hésite pas à clamer son bonheur d’être accompagné par la légende française.
Étonnant de propreté dans son jeu, en bonne forme physique, Tony montre qu’il est encore capable de scorer, de gérer le tempo, et surtout d’être décisif dans les moments chauds. Il l’a fait à plusieurs reprises cette saison déjà : Miami, Detroit ou plus récemment Denver peuvent en témoigner. Sous les ordres d’un homme qu’il connaît bien, James Borrego, et aux côtés de son pote Nicolas Batum, Parker s’éclate de nouveau sur les parquets, et ça fait plaisir à voir. Pour le plus grand bonheur des Hornets.
Nicolas Batum (Charlotte Hornets / 9.0 pts, 5.5 rbds, 3.5 passes)
A côté de TP en revanche, Nico Batum est malheureusement loin de faire l’unanimité à Charlotte. Avec des statistiques à nouveau en baisse, notamment à la passe, l’ailier cristallise les critiques. Dans la lignée de sa saison précédente, certes perturbée par des blessures, Nico est à la traîne sur ce début de saison. Moins incisif, moins agressif, il a même été pointé du doigt par son coach James Borrego, l’invitant à être plus impliqué en attaque. D’autant que contrairement à l’année passée, Batum a retrouvé des pourcentages au tir satisfaisants, affichant ses plus belles marques depuis plusieurs années. Alors, qu’est ce qui retient le français de prendre plus de risques et d’être plus actif offensivement?
On le sait, son rôle est capital dans le jeu des Hornets, qui tournent plutôt bien en ce début de saison. Borrego en a conscience, et concédait récemment que son joueur devait monter d’un cran car il peut potentiellement changer la face de l’équipe. Son activité des deux côtés du terrain est primordiale, Nico étant un véritable joueur all-around lorsqu’il est en forme. De son propre aveu, il n’est pas du tout dans sa meilleure forme, et dit avoir du mal à s’adapter et à trouver sa place dans le nouveau système. Un refrain déjà entendu chez le français, mais on lui souhaite d’y parvenir rapidement, car son contrat fait de plus en plus grincer des dents du côté de Charlotte…
Frank Ntilikina (New York Knicks / 6.4 pts, 1.8 rbds, 2.6 passes)
Situation différente, mais tout aussi épineuse pour le jeune meneur des Knicks, actuellement dans la tourmente. Difficile de comprendre ce qu’il se passe pour Frank, et de démêler le vrai du faux dans toutes les informations qui circulent à son sujet. Très utilisé en début de saison, il a de nouveau fait preuve de ses qualités défensives très au-dessus de la moyenne, mais n’a pas su élevé son niveau de jeu attaque. Résultat, un temps de jeu en baisse, le joueur n’ayant pas passé 30 minutes sur les parquets depuis début novembre et une victoire à Dallas. Jugé pas assez agressif offensivement, le French Prince s’est éteint de ce côté du terrain, ne prenant presque plus de tirs et ne contribuant que très peu à la distribution du jeu.
Dès lors, les rumeurs de trade ont commencé à circuler, et se sont renforcées lorsque le coach David Fizdale a décidé de se passer de Ntilikina pendant trois rencontres consécutives (Bucks, Wizards, Celtics), soldées sur une courte victoire et deux défaites. Difficile alors de jauger la volonté du coach et de la franchise, quand le marché semble s’agiter. Avec les joueurs rendus plus ou moins disponibles par leurs équipes, John Wall en premier lieu, la place de Frank chez les Knicks semblaient chaque jour un peu plus compromise. Pendant ce temps, Fizdale affirmait que les DNP infligés au joueur n’avaient aucune signification de ce genre, et qu’il attendait simplement un réveil de son meneur. Un sursaut qui aura finalement eu lieu face aux Hornets de Parker et Batum. En 20 petites minutes, Ntilikina a retrouvé des couleurs, tapant son career high avec 18 pts (7/11 à 4/4 de loin), et une performance de choix face à son aîné. En l’absence d’Allonzo Trier qui lui fait de l’ombre depuis le début de saison, Frank a-t-il eu le déclic dont il avait besoin? Réponse dans les prochaines semaines. Une chose est sûre : il va devoir répéter ce genre de performances s’il veut goûter fréquemment au parquet.
Rudy Gobert (Utah Jazz / 14.9 pts, 12.2 rbds, 1.9 passes)
Le Défenseur de l’année 2018 continue de mener les siens, si bien qu’on pourrait le considérer aujourd’hui comme le franchise player du Jazz. Le pivot avait d’ailleurs bien commencé sa saison, avant de connaître un coup de mou sur le mois de novembre. Le bilan d’Utah s’en est ressenti, avec une période compliquée pour les joueurs de Quin Snyder. Mais si les stats du français sont en hausse (hormis aux contres), avec plus de réussite en attaque notamment, le bilan du Jazz reste aujourd’hui négatif, et l’on attendait plus d’eux après leur superbe saison dernière. Gobert est solide, étincelant sur les premiers matchs, et ses performances décident souvent de l’issue du match pour les siens. Lorsque leur pivot brille, les joueurs du Jazz l’emportent.
Le bémol se situe sur le rendement de l’équipe dans son ensemble. Très solide défensivement la saison passée, Utah n’affiche aujourd’hui que le 12è Defensive Rating de la ligue. Et si le mois de novembre les a mis à l’épreuve avec de nombreux matchs à l’extérieur, Rudy se doit d’emmener les siens et de les faire gagner dans les moments chauds. Difficile de lui reprocher quoique ce soit concernant ses performances individuelles, mais le pivot doit être celui qui remet les siens sur les bons rails, en tant que patron de la franchise – Donovan Mitchell bénéficie encore un peu de l’excuse de la jeunesse. Attention également à rester calme dans les moments difficiles, lui qui a largement pété les plombs face aux Rockets en étant expulsé après moins de 3 minutes de jeu, s’emportant après une deuxième faute sifflée contre lui. En connaissant la solidarité du corps arbitral, attention à ne pas devenir un homme à abattre… Gobert reste néanmoins l’un, si ce n’est le meilleur français en NBA aujourd’hui.
Evan Fournier (Orlando Magic / 15.1 pts, 2.9 rbds, 3.8 passes)
Evan ne propose pas sa meilleure saison, clairement. Au sein d’un Magic qui a manqué son début saison, Fournier n’a pas su tirer les siens vers le haut pour éviter les défaites. Et lorsque Orlando est entrée dans une spirale de victoires au mois de novembre (10 victoires contre 7 défaites), Vavane ne s’est pas montré particulièrement à son avantage. Moins présent au scoring, la faute à des pourcentages plus que douteux (ses plus mauvais en carrière, à 41.9% dont 31.9% du parking), il n’a pas l’impact attendu sur son équipe sur le plan individuel. Steve Clifford sous-entendait en sortie de défaite face aux Warriors que Fournier jouait blessé, lui qui achevait avec cette rencontre trois prestations plus que mitigées.
Pourtant, Orlando est aujourd’hui 7è à l’Est, à deux victoires seulement d’un bilan équilibré (poke la Conférence Ouest au passage). Collectivement, la saison d’Evan est donc satisfaisante. Mais la franchise attend plus d’un de ses leaders, pour le moment dans l’ombre d’un grand Nikola Vucevic. On notera d’ailleurs une propension légèrement plus importante pour Evan à donner des passes décisives à ses coéquipiers, un axe sur lequel il peut toujours progresser. Une progression qui va de paire avec son rôle toujours plus important de leader dans le vestiaire du Magic, une donne confirmée par ses jeunes coéquipiers. Nul doute que s’il retrouve plus de propreté au shot, Orlando n’en sortira que meilleur.
Joakim Noah (Memphis Grizzlies / 7.7 pts, 4.3 rbds, 1.3 passes)
Elle est peut-être ici la belle histoire de la saison pour nos joueurs français. En grandes difficultés du côté de New York, Jooks s’attendait à être coupé par les Knicks, lui qui ne jouait plus une seule minute. Rapidement remercié par la franchise, le pivot s’en est allé dans le cadre d’un buy-out, se retrouvant libre de tout contrat. La vraie question qui se posait alors : qui voudrait d’un Noah aux oubliettes depuis 2 ans ? L’ancien Bull ne lâchait pourtant pas le steak, s’affichant à la salle à s’entraîner et même à travailler quelque chose qui ressemble presque à du shoot. Résultat, après quelques semaines, une franchise venait toquer à la porte du bonhomme. Déjà monstrueux en défense, les Memphis Grizzlies décidaient alors de tenter le pari Jooks, en le signant pour 1.73 millions sur un an. Destiné à soulager Marc Gasol en apportant de la présence dans la raquette, et une défense toujours plus étouffante, la destination a tout de suite suscité l’intérêt de la communauté.
Car si Noah semblait perdu pour le basket il y a encore quelques semaines, le voir intégrer les Grizzlies redonne espoir. Difficile d’imaginer une franchise plus adaptée à son jeu et à ses possibilités, pour le relancer après des mois de galère (dernier match le 23 janvier 2018). Jooks a donc fait son retour sur les parquets face aux Clippers, dans une équipe plus que surprenante en ce début de saison, et inscrit ses premiers points sur un rebond offensif et… un jumper à 6 mètres. La mécanique est originale dira-t-on, mais la joie est belle à voir, avec un hurlement de soulagement bien senti. Le départ d’une belle aventure peut-être, toujours est-il que Noah a confirmé avec un deuxième match plus que solide face aux Pelicans (13 pts, 5 rbds, 3 passes en 16 minutes). Jaren Jackson Jr a désormais deux anciens DPOY pour l’encadrer, et on espère pour Noah que ce n’est que le début d’une renaissance !
Elie Okobo (Phoenix Suns / 6.9 pts, 2.1 rbds, 2.5 passes)
17 rencontres jouées, dont 4 en tant que titulaire, Okobo apprend doucement en NBA. Au sein d’une équipe de Phoenix qui sert de punching-ball à l’ensemble de la ligue, le jeune meneur affiche un temps de jeu plus que variable, et des performances mitigées. Il nous a gratifié de belles prestations, notamment un gros match face au Thunder au mois d’octobre. Problème, ses pourcentages sont clairement insuffisants pour un scoreur, et il se doit de faire de meilleurs choix sur le parquet. Après un aller-retour en G-League, le français a de nouveau eu la chance de se montrer suite au départ d’Isaiah Canaan, avec notamment sa meilleure marque face aux Clippers (19 pts). A lui de continuer à bosser, pour montrer à son coach qu’il faut lui garder une place dans la rotation à l’avenir. Bonne nouvelle pour lui : les Suns n’ont pas l’air décider à se pencher plus sérieusement que ça sur le poste de meneur, qui devrait revenir à Devin Booker une fois celui-ci de retour. Il y aura des minutes à prendre alors Elie, fonce !
Ian Mahnimi (Washington Wizards / 3.6 pts, 3.4 rbds, 0.4 passes)
Les saisons sont de plus en plus compliquées pour Mahinmi, englué dans une situation délicate à Washington. Dans une équipe minée par les problèmes de vestiaire, le pivot avait pourtant de quoi faire valoir son leadership, lui qui avait montré de belles choses en pré-saison. Pourtant, il ne semble aujourd’hui plus faire partie des plans de son coach et de la franchise, avec seulement 14 matchs disputés. L’arrivée de Dwight Howard a fait mal à Ian, qui a vu son temps de jeu fondre comme neige au soleil. Et même si l’ancien Pacer est aujourd’hui éloigné des parquets, Mahinmi reste une option très peu utilisée par Scott Brooks. Il a seulement joué 14 minutes dans un blow-out concédé face aux Cavs. La situation semble sans issue pour lui, qui devra peut-être espérer un départ des Wizards pour se relancer. Mais là encore, la chose n’est pas évidente avec son contrat très costaud…
Guerschon Yabusele (Boston Celtics) & Timothée Luwawu-Cabarrot (Oklahoma City Thunder)
Impossible de juger correctement les deux garçons, qui jouent trop peu avec leurs franchises respectives.
Yabusele a pu se montrer face à Chicago dans un blow-out historique, mais s’est blessé à la cheville et suscite l’inquiétude quant à sa potentielle absence. Malheureusement, le début de saison compliqué des Celtics ne lui a pas permis de profiter de garbage time et donc de faire ses preuves. On espérait mieux pour lui cette saison, mais on ne désespère pas de voir Yabu grappiller des minutes au fil de la saison.
Concernant Luwawu-Cabarrot, il ne dispose tout simplement pas de la confiance de son coach, et doit se contenter de quelques minutes à droite à gauche. Toujours en délicatesse avec son shoot, il n’a pas le temps de jeu pour se mettre en confiance, et n’est pas assez en réussite pour faire changer d’avis Billy Donovan. L’avenir en NBA s’assombrit pour Timothée, du moins du côté d’OKC…
Fortunes diverses et bilans mitigés pour nos frenchies, dont certains vont devoir élever leur niveau de jeu pour retrouver leurs standards ou passer un cap. La situation de chacun est à surveiller, et nous regarderons les performances de chacun avec attention dans les mois à venir, notamment du côté de New York. Rendez-vous dans quelques semaines pour un nouveau bilan.