Le feuilleton avait bousculé la préparation des Timberwolves, et n’a connu son dénouement que le 10 novembre dernier, après presque un mois de compétition. Les envies de départ de Jimmy Butler auront finalement eu raison de son avenir à Minnesota, et l’ailier prenait la direction de Philadelphie, accompagné de Justin Patton. Robert Covington, Dario Saric et Jeryd Bayless faisaient le chemin inverse et rejoignaient une meute en difficultés après cinq défaites consécutives et un bilan largement négatif (4-9). Depuis, 18 matchs se sont écoulés, l’occasion de dresser un premier bilan sur l’impact du trade tant attendu.
Une nouveau départ
Les effets positifs de ce transfert ne se sont pas fait attendre. Le vestiaire, visiblement libéré du poids de l’affaire, retrouve le sourire et le jeu des Wolves un second souffle. S’il n’en devient pas spectaculaire et reste souvent frustrant offensivement, la défense de Minnesota passe en revanche un véritable palier, s’affirmant comme une forteresse imprenable. Une surprise, lorsque l’on connaît les problèmes de l’équipe de ce côté du terrain depuis plusieurs mois, et ce malgré la présence d’un défenseur élite en la personne de Butler. L’arrivée de Covington a grandement contribué à ce progrès, l’ailier s’affirmant tout de suite comme le pilier de la défense, et appliquant une méthode différente pour emmener ses nouveaux coéquipiers derrière lui. Résultat, le niveau défensif global augmente, et les individualités montrées du doigt dans ce secteur passe un cap, particulièrement Towns et Wiggins.
De cancres de la ligue, les Timberwolves en sont devenus les meilleurs élèves, en grimpant sur le podium des meilleures Defensive Ratings pendant un petit mois. Ces grandes performances défensives leur permettent d’effectuer deux runs de 3 et 4 victoires consécutives, entrecoupés de deux défaites face à Memphis et Denver. Et si Boston met donc fin à la deuxième série, Minnesota enchaîne avec deux nouvelles victoires, dont une probante face aux Rockets. Le 5 décembre, 12 matchs après le trade, les Wolves affichent un bilan de 9 victoires pour 3 défaites, leur permettant de passer en positif pour la première fois de la saison (13-12). Symbole du renouveau défensif, sur ces 12 matchs, seuls le premier face à Brooklyn et la défaite face à Boston ont vu les adversaires scorer 104 points ou plus.
Le groupe vit mieux, les recrues sont bien intégrées, et ça se voit dans les efforts collectifs et individuels. Certains joueurs, notamment Jeff Teague, se sont d’ailleurs permis de critiquer ouvertement les schémas défensifs de Thibodeau, notamment le manque de switchs autorisés. Il semble alors que le coach laisse plus de libertés à ses hommes, pour un résultat positif, et des victoires à la clé. Le jeu offensif reste parfois pauvre, souvent dépendant d’un Derrick Rose retrouvé ou de la domination intérieure de Towns (lorsqu’il reçoit des ballons), mais le succès est de retour à Minnesota.
Des individualités au rendez-vous
Saric est plutôt bien intégré, et même s’il est un peu irrégulier et que la réussite au tir le fuit parfois, il apporte du mouvement de balle et son intelligence de placement est la bienvenue. D’autant qu’en défense, il se montre à son avantage, avec une vraie activité à l’intérieur. Andrew Wiggins peine à retrouver son niveau offensif depuis le départ de Butler, lui qui doit renouer avec son style de jeu en isolation et en pénétration. On le sent parfois perdu lorsqu’il va au cercle, comme s’il avait perdu l’habitude de jouer ses phases pourtant caractéristiques de son jeu à ses débuts. En revanche, lui qui évolue désormais au poste 2 se montre capable de rentrer des tirs longue distance importants, malgré des passages à vide. On se souvient évidemment de la performance catastrophique au tir de Wiggins et Covington face aux Bulls (1/30 combiné). Pourtant, la victoire était au bout de ce match, et cela confirmait d’ailleurs le nouvel élan collectif : plus d’équilibre, une meilleure cohésion, et la capacité à se reposer sur certains joueurs lorsque d’autres sont en dedans.
Au cours de cette période faste, deux joueurs se sont nettement mis en avant pour mener le collectif. De son côté, Derrick Rose poursuit son incroyable retour au plus haut niveau. Il faut tout de même se rappeler qu’il envisageait de prendre sa retraite il y a de cela un an. Aujourd’hui, il fait clairement partie des favoris pour le titre de 6ème homme de l’année, et ses performances ont souvent contribué aux victoires des siens. Et s’il peut encore se montrer croqueur, Rose affiche des pourcentages records, tout simplement les meilleurs de sa carrière, avec 49.3% dont un énorme 46.9% derrière l’arc ! Le meneur est tout simplement parmi les joueurs les plus adroits de la ligue à 3 pts, pas un mince exploit lorsqu’on connait le joueur et son style. Un retour au premier plan plus que bienvenu dont, avec une capacité à prendre les choses en main lorsque l’attaque des Wolves déraille.
Surtout, celui qui profite le plus du départ de Butler se nomme bien Karl-Anthony Towns. Le pivot a clairement pris le leadership de la franchise, reconnu par ses coéquipiers comme le mâle alpha sur le terrain comme dans le vestiaire. KAT a d’ailleurs sorti de grosses performances depuis un mois, et a nettement progressé en défense, protégeant mieux son cercle en étant plus attentif et concentré. Toujours friand des gros double-doubles, il s’est surtout montré en leader par son comportement envers ses coéquipiers, notamment les recrues, avec des gestes forts et des prises de parole révélatrices. Un nouveau statut qu’il doit désormais assumer, pour emmener la franchise derrière lui. Problème, il reste sous-utilisé sur le parquet, toujours aussi peu servi au poste. Pourtant, Towns a laissé entrevoir ses capacités de passeur, alors qu’il pouvait souffrir des prises à deux, il a montré son aptitude à lâcher la gonfle à l’extérieur pour un coéquipier démarqué, de manière parfois spectaculaire.
Un road-trip compliqué
Au sortir de cette bonne période symbole du renouveau, un premier vrai défi se dresse devant les Wolves, avec la perspective d’un road-trip compliqué à l’Ouest. Au programme, deux premiers matchs face aux gros que sont Portland et Golden State, pour finir avec une visite chez des Kings en grande forme et des Suns ayant déjà lancé leur opération tanking. On se dit alors qu’un bilan équilibré serait un excellent signal envoyé par les Wolves, mais il n’en sera rien. La première défaite face aux Blazers après un quatrième quart-temps lâché donnera le ton d’un road-trip difficile. Les Warriors n’ont eu aucun mal à se défaire de Minnesota, qui n’a donc pas su résister aux deux adversaires les plus forts sur le papier. A Sacramento, le rythme infernal imposé par les Kings aura raison de la défense des hommes de Thibodeau, avec 141 points encaissés ! Incapables de poser un stop, les Wolves subissent une troisième défaite consécutive, et doivent achever leur voyage à Phoenix. Bien sûr, il est facile de supposer que l’occasion est belle de sauver les meubles face à une équipe qui semble déjà désireuse de finir au fond du classement. Le retour de Devin Booker a cependant douché les espoirs des Timberwolves, avec une ultime défaite en fin de compte dans ce road-trip à l’Ouest.
Peu de satisfactions sont d’ailleurs à tirer de cette série pour sauver les apparences, tant l’équipe est apparue fragile. Manque d’envie ou d’énergie, les explications ne manquent pas, et aucun joueur n’a su sortir l’équipe de cette mauvaise passe, Towns en premier lieu. Les critiques se sont par ailleurs cristallisées sur Jeff Teague, qui agace de plus en plus par son jeu stéréotypé et contre-productif en attaque. Le meneur s’est pris pour habitude de tenir la gonfle jusqu’en bout de possession, avant d’envoyer la patate chaude à un coéquipier, sa cible privilégiée étant Andrew Wiggins. Moins incisif au scoring, plus lent dans ses déplacements et ses prises de décision, Teague doit sérieusement se remettre en question, car ses performances affectent grandement l’équipe. Par ailleurs, les Wolves n’ont pas été aidés par l’absence de Covington en tout début de road-trip face à Portland, blessé à l’épaule. L’ailier a par la suite mis plusieurs rencontres pour retrouver son impact, notamment en attaque avec une adresse longue distance en berne. Au final, 4 défaites consécutives à l’extérieur, et Minnesota se montre toujours incapable de prendre le moindre match hors de ses bases.
Il aura fallu que les Wolves retrouvent le Target Center pour renouer avec la victoire, par un large succès pour se venger des Kings. Leur dernier match s’est en revanche soldé sur une défaite concédée face aux Pistons, dans une rencontre que Minnesota tenait pourtant bien en mains à l’issue du 3ème quart. Mais les loups ont encore montré leur incapacité à tuer un match, aspect sur lequel ils devront progresser s’ils veulent espérer décrocher une place en Playoffs.
Les recrues, Robert Covington et Dario Saric
Nous en avons parlé précédemment à travers les résultats collectifs, l’intégration des deux hommes est une véritable réussite du côté de Minny. Le cas Jeryd Bayless ne peut être traité, le joueur étant blessé et de toute façon peu susceptible d’être utilisé à l’avenir. Les deux hommes en provenance de Philly ont donné satisfaction pour leurs premiers matchs, particulièrement Covington qui est d’ores et déjà un chouchou des fans. RoCo a fait étalage de ses qualités défensives, et s’affiche également en leader par son énergie débordante. Parfaitement dans son rôle, il ravit par son activité incessante, et son intelligence de déplacement en défense. Une superbe recrue à moindre frais pour Minnesota, qui espère déjà en profiter le plus longtemps possible. Preuve de ses qualités, s’il en est encore besoin, ses adversaires directs voient leurs pourcentages au tir diminuer de 10% en moyenne face à lui. Monstrueux.
Quant à Saric, la question était de savoir s’il débuterait sur le banc ou s’il intégrerait le cinq de départ. Thibodeau a choisi la seconde option, et Dario se retrouve donc au relais de Taj Gibson. Le croate a du talent plein les mains et ça se voit, notamment dans sa capacité à faciliter le jeu des siens en attaque. Bon shooter, il fait également preuve d’une bonne agressivité, et ne lâche jamais rien à l’adversaire sur le terrain. Une qualité qui lui permet notamment de fournir des prestations correctes en défense. Son intelligence de placement et dans ses mouvements en font un élément déjà indispensable.
Le coup de coeur Okogie
D’une certaine manière, la trajectoire de Josh Okogie est liée au trade de Butler. Les Wolves ayant récupéré deux joueurs à gros temps de jeu contre un seul, les principes (insérer l’adjectif qui vous semble le plus appropriés) de Thibodeau ont fait sortir le rookie de la rotation. Pourtant, Okogie avait montré de très belles choses depuis le début de saison, particulièrement sur le plan défensif. Et s’il est assez frustre en attaque, son énergie débordante font de lui un joueur intéressant des deux côtés du terrain, notamment lorsque l’équipe s’enlise dans des périodes compliquées. Car oui, Josh Okogie ne vient clairement pas de la même planète que nous autres. Si vous ne l’avez jamais vu sur un parquet, remédiez à cela rapidement, car cela vaut le détour. Capable d’arracher un rebond sur la tête de Drummond et Griffin réunis en finissant au sol, ou encore de taper un coast-to-coast achevé sur un dunk avec réception sur une demi-jambe, le garçon ne laisse pas indifférent. Nouveau chouchou de la fanbase des Wolves, il a vécu une période compliquée en n’étant plus utilisé ou presque par Thibodeau. Il faut des circonstances telles que des blessures (Covington ou Teague) pour le voir obtenir un temps de jeu raisonnable, et le voir sur les parquets est souvent un pur plaisir. Un élément à développer et à suivre de très près, qui pourrait bien se révéler être un steal de la dernière Draft.
Quel bilan ?
Difficile bien sûr de tirer un bilan définitif depuis le départ de Jimmy Butler. Minnesota a perdu un énorme joueur, capable de porter une équipe sur ses épaules et de réaliser des exploits sur le terrain comme peu en sont capables, mais sort finalement très heureux de ce trade. Les Wolves affichent un bilan positif de 10 victoires pour 8 défaites depuis le trade, avec l’intégration de deux joueurs majeurs dans la rotation. Towns prend plus de responsabilités, et les assument de mieux en mieux, pendant que les joueurs autour de lui font le boulot. Le pivot doit malgré tout continuer ses efforts, et se montrer moins prompt à sortir de ses matchs, que ce soit par les fautes ou le manque d’adresse.
Il ne manque pas grand chose aux Timberwolves pour trouver un rythme victorieux, notamment plus de régularité et de maturité dans les fins de match. Un problème récurrent pour Minnesota, qui ne se résoudra qu’avec l’enchaînement des matchs. Certaines individualités doivent également passer un cap, particulièrement à la mène, où Teague et Tyus Jones ne proposent pas de performances suffisantes. Tom Thibodeau, très décrié en début de saison, a logiquement été épargné, voire loué pendant la série de victoires, notamment pour les performances défensives de l’équipe. Evidemment, les critiques sont de retours avec les défaites, et le problème reste éternel avec le Pingouin : un manque d’adaptation cruel, qui pénalise les Wolves dans les moments difficiles.
Et si certains continuent de tirer à boulets rouges sur Andrew Wiggins en regardant seulement ses statistiques, difficile de lui en vouloir lorsque l’on analyse le contenu de ses matchs. L’ailier a retrouvé l’énergie et l’envie qui lui faisaient défaut et qui lui ont valu de nombreuses critiques (souvent à juste titre, notamment de la part de Butler), et donne tout sur les parquets. En attestent ses progrès en défense, et son agressivité retrouvée en attaque. Son mois de décembre est d’ailleurs tout à fait correct, lui qui atteint presque la vingtaine de points de moyenne avec des pourcentages proches de 50%. Surtout, c’est son attitude qui parle pour lui, et même si on aimerait toujours le voir plus productif en attaque, il faut savoir reconnaître sa bonne période actuelle.
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Un bilan plutôt positif donc pour les Wolves depuis le départ de Butler, mais des progrès toujours évidents à réaliser. Le collectif retrouvé doit poursuivre ses efforts, gagner en maturité, et savoir tuer les matchs lorsqu’ils en ont la possibilité. Ce n’est qu’à cette condition qu’ils pourront espérer décrocher un spot en Playoffs au terme de la saison régulière. Pas une mince affaire lorsqu’on regarde la Conférence Ouest et sa cadence absolument dingue.