La saison régulière de la NCAA vient à peine de se terminer que se profile un des évènements les plus excitants que peut nous offrir le basket moderne. Si la COVID-19 nous prive de ses foules déchaînées, de ses stades mythiques, véritables chaudrons prêts à imploser au moindre game winner ou à se déchirer au moment de régler des années de rivalité entre universités rivales, la March Madness conserve bel et bien son aura mythique, même dans un contexte aussi unique qu’est la saison 2020-2021.
Qui sont les combattants dans l’arène ? Quel joueur va exploser sa côte quelques semaines avant la draft ? Si nous avons déjà présenté le cas de Luka Garza chez les Iowa Hawkeyes et de l’université des Bulldogs de Gonzaga, QiBasket vous propose 5 profils de joueur à découvrir, à suivre. Entrez dans l’arène, fils de Mars, que les jeux commencent et que le meilleur gagne !
At the shooting guard, from Centreville Illinois, number 0 : Jordan Goodwin !
Attention OVNI, attention coup de cœur. Jordan Goodwin, arrière de 1m90 est un joueur unique en son genre.
Sous son masque et ses épaules larges se trouvent un joueur avec un cœur et une envie qui transcendent son équipe des St Louis Bilikens. Fort défenseur, meilleur rebondeur de sa conférence pour la seconde saison consécutive (15 doubles doubles en 31 matchs la saison précédente, il a conclu sa saison 2020-21 avec 10 rebonds de moyenne), tout ce que Goodwin fait, il le fait à fond. En bon centurion il s’engage à corps perdu dans les raquettes adverses, où son physique et son agressivité forcent les défenses à s’adapter à ce profil de jeu si hors du temps.
15pts, 10 rebonds, 3,8 passes : des statistiques dignes d’un intérieur, rarissime pour un guard. Dans un basket moderne qui prône le shoot à outrance, Goodwin est un slasher explosif qui s’appuie sur une rapidité, une puissance et un coffre sans limites dans un jeu collectif où les dunks, alleyoops et coast to coast sont nombreux. Tel le minotaure, laisser un mètre d’élan à Goodwin c’est s’assurer d’être empalé d’un dunk ravageur ou d’envoyer son intérieur face à une bête assoiffée de sang. Nombreux ont été les intérieurs qui ont eu l’audace de penser qu’ils arrêteraient le guerrier masqué… Nombreux furent aussi les égos brisés.
En défense ? Une teigne, un roc, un monstre. Grand adepte de la presse tout-terrain, Goodwin fait un parfait usage de son niveau d’athlétisme élevé pour empoisonner la vie des arrières adverses. L’affronter, c’est devoir faire face à un chien enragé pendant 30 minutes, ses bras tentaculaires arrachant sans cesse les ballons des bras adverses. Une contre-attaque facile ? Pas de ça ici, pas de lay-up facile avec Goodwin. L’arrière bondissant est d’une exemplarité sans faille dans tout les aspects défensifs, et s’est affirmé cette saison comme l’un des meilleurs défenseurs de sa conférence. Vous avez dit Gary Payton ?
S’il manque parfois de lucidité en attaque à cause de l’immense énergie dépensée en défense, il est un floor general qui contrôle le tempo et le jeu plein de force des Bilikens, parfait relais de son coach sur le terrain et dans le vestiaire. Goodwin a une capacité naturelle à rallier ses coéquipiers à sa cause, à renverser un match d’un coast-to-coast ravageur ou d’une steal rapide comme l’éclair. Portant avec courage un effectif excitant et bodybuildé aux côtés de Jemerrio Jones et Hasahn French, il est devenu au fur et à mesure de la saison une des sensations de NCAA, au point de voir une réelle hype se créer autour de lui.
Son défaut criant reste malheureusement son shoot, que ce soit aux lancers francs ou à 3pts. Goodwin ne coche pas les cases du basketball moderne dans le secteur, ce qui risque de le pénaliser fortement à la draft. De fait, il y a très peu de chances de le voir être drafté, mais un passage par la G-League ou l’Europe semble tout à fait envisageable. Goodwin le sait, son rêve de NBA n’est pas inaccessible, mais devra passer par une grande March Madness. Ca tombe bien le joueur masqué a à cœur de boucler son cursus universitaire en menant au front son équipe, si possible en s’offrant le scalp d’une grosse équipe dans un upset en antenne nationale.
At guard, from Arlington Texas, number 2 : Cade Cunningham !
Par où commencer avec le prospect Cunningham ? Ce meneur au gabarit d’ailier, à l’envergure immense (2m14, pratique pour changer les ampoules chez mamie) est LA sensation de cette saison 2020-21.
Star à Oklahoma State, il a illuminé la planète basket universitaire en proposant une palette de compétences riche et variée. Sorte d’hybride entre Ben Simmons et Lebron James (toute proportion gardée pour l’instant), Cade appartient à cette espèce de playmakers qui utilisent leur physique pour créer des décalages et punir le moindre mismatch, capable de porter un effectif limité en talent et en profondeur jusqu’à la March Madness.
Ses forces ? Sa polyvalence globale qui lui permet de peser dans l’ensemble des composantes du jeu. Bouclant une saison sur des stats de 20 pts, 6 rebonds et 3,6 passes, Cunnigham affiche une vraie maturité dans sa vision de jeu, un playmaking et un leadership rare pour un première année de 19 ans. Autant à l’aise sur les attaques en isolation que sur des cuts pleins de puissance ou au alley oop, Cunnigham peut rendre de très, très nombreux services.
Ses seuls défauts ? Un shoot longue distance encore à travailler (mais son 83% de réussite aux lancers francs est très encourageant), et une étrange lacune dans la finition près du cercle. S’il n’a aucun mal à utiliser son corps pour dunker et se démarquer de son adversaire, il peine à terminer des deux mains et à varier ses appuis lors de ses drives. Encore une fois, rien d’inquiétant tant le joueur est jeune, encore en formation, et déjà plein de promesses. Sans aucun doute un calibre NBA ready depuis le premier jour, et candidat très sérieux, voire indiscutable au first pick de la draft 2021.
Peu importe ses résultats de fin de saison (bien que passer un tour serait une belle récompense pour cette équipe des Cowboys), drafter Cunnnigham, c’est drafter un très jeune joueur au très haut potentiel, NBA ready, parfaitement adapté au jeu moderne. Il saura s’adapter peu importe le type de jeu développé, et l’équipe qui aura la chance de l’accueillir, idéalement une franchise en reconstruction complète (coucou Washington, Sacramento, Orlando et autres équipes de bas de tableau) où il sera responsabilisé immédiatement. Cunningham a toutes les armes pour devenir l’un des futurs cracks de la grande ligue.
At Center, from Alexandria Virginia, number 1 : Hunter Dickinson !
Impossible de parler de NCAA sans évoquer la superbe saison des Wolverines de Michigan, coachés par un Juwan Howard de retour sur le banc de l’université où il a connu des saisons mythiques. L’ancien membre du Fab Five a totalement relancé la faculté du Michigan, dépassé toutes les attentes malgré pléthores de blessures. S’appuyant sur une défense étouffante incarnée par Franz Wagner et une présence au rebond collective (7 joueurs avec plus de 5 rebonds par match), Michigan s’est appuyé en grande partie sur son intérieur dominant Hunter Dickinson. Hunter est un pivot à l’ancienne, qui joue principalement dos au panier. Rappelant sur de nombreux points le Kevin Love époque UCLA, il propose le même mélange de fondamentaux, footwork, puissance et vision du jeu qui lui permettent de s’imposer au poste bas sans tomber dans le Bully Ball incessant.
Dickinson score la majorité de ses points dès la réception de la balle, ses bons placements et son jeu de jambe annihilent son défenseur et il n’a très souvent qu’à terminer d’un lay up. Simple mais terriblement efficace. Si la défense se resserre, il s’applique au rebond offensif et ouvre la voie à ses guards via ses écrans et son placement qui force la défense à toujours le surveiller. Il montre une très bonne capacité d’adaptation sans consigne qui fluidifie le jeu de son équipe qui compte 4 shooters.
En défense ? Pas le plus athlétique ou le plus vertical, choses qu’il compense avec un très bon sens du placement et une communication constante. Michigan est une des meilleures défenses à 2pts de la NCAA et cela est en bonne partie du à l’apport non numérique de Dickinson.
Une comparaison NBA ? Il y a du Marc Gasol en lui (même si son shoot à 3pts n’a pas encore été mis à contribution). Il est encore jeune et peut espérer être sélectionné au second tour s’il se présente cette année.
At shooting guard from Houston Texas, number 24 Quentin Grimes !
Comment rebondir après une saison freshman ratée ? Demandez à Quentin Grimes et vous aurez la réponse. Freshman en difficulté à Kansas dans une équipe en pleine reconstruction, il a pris le risque de quitter une université prestigieuse pour se relancer chez les Houston Cougars. Grand bien lui a fait alors qu’il boucle sa saison avec des moyennes de 18 points et 6 rebonds.
La clé du succès ? Une liberté quasi totale accordée de la part de son coach dans une équipe qui a besoin de son apport offensif. Grimes est un véritable feu follet, aussi capable de sanctionner à 3pts que de driver aisément, Il s’adapte constamment à la physionomie du match et pèse à chaque instant. Bon défenseur, bon rebondeur avec un niveau athlétique au-dessus de la moyenne, il lui manque cependant un premier pas rapide pour se démarquer de son adversaire et doit encore progresser sur sa défense individuelle.
Sa meilleure utilisation est celle d’un arrière libre de zigzaguer sur le terrain entre les écrans et les mismatchs pour bombarder l’adversaire derrière la ligne à 3pts. Il dispose de cet avantage propre aux arrières modernes d’être capable de contribuer offensivement sans avoir un Usage Rate élevé.
Les Cougars appliquent un jeu up tempo avec 3 guards et deux forwards polyvalents, dans lequel Grimes peut exploiter son potentiel de sharpshooter à pleine puissance. Houston a davantage cherché cette saison à remporter le match offensivement que défensivement (coïncidence ?) et le rendement défensif (collectif et individuel) ne reflète pas vraiment pas le potentiel de cet effectif. Actuellement annoncé au second tour de la draft, Grimes devra adapter son rôle en NBA en s’inspirant de joueurs comme Josh Hart ou Donte Divicenzo ; des arrières hybrides, très bons rebondeurs et shooters qui peuvent par séquence poser la balle au sol et driver .Grimes fait partie de ces belles rédemptions que nous offre la NCAA. Il a tout les outils en main pour faire une carrière de role player solide dans une équipe qui a de l’ambition.
Nous allons terminer cet article sur une note de brutalité, de force brute, d’athlétisme et de vélocité
Attachez vos ceintures car voilà AIR FRANCE !
Yves Pons est LE phénomène athlétique des Tennessee Volunteers et vient de conclure sa saison Senior avec des stats de 9 points, 5 rebonds et 2 contres par match. Elles ne sont pas énormes, surtout venant de la part d’un 4ème année, mais elles ne traduisent pas l’impact que Pons a sur la défense des Volunteers. Tennessee est une des meilleures défenses de toute la NCAA et cela provient en grande partie de l’apport de Yves Pons dont les contres ravageurs terrifient les joueurs qui ont l’audace de le défier ou de s’aventurer dans sa raquette. Besogneux, agressif et avec un physique hors norme, il a toutes les caractéristiques du défenseur moderne. Bonne envergure, vitesse latérale élevée, haut du corps qui lui permet de repousser la plupart des gabarits et surtout une verticalité absolument dingue (si vous en avez l’occasion allez voir ses highlights au contre).
Il doit cependant composer avec un niveau technique offensif très faible. Un handle limité, une vision du jeu encore très perfectible et un shoot encore beaucoup trop irrégulier. Tout ceci fait qu’Yves Pons peine à augmenter sa côte à la draft. Tout cela reste perfectible mais le chantier est conséquent. Il semble souvent perdu et peu à l’aise dans une attaque de Tennessee qui peine déjà à scorer et marque ses maigres points sur des rebonds offensifs ou des alley oop. Mais son profil défensif si rare et recherché par la Grande Ligue peut lui permettre d’obtenir un précieux contrat Two Way ou à minimum dans une équipe de G League.
En somme, Yves Pons est un projet avec peu de risques et des gains potentiels élevés.
Il saura parfaitement épauler un pivot dominant offensivement en faisant la sale besogne défensive, en couvrant le second rideau et en étant un très bon dans la dissuasion. On lui souhaite une carrière à la Taj Gibson à savoir celle d’un role player apprécié dans la Grande ligue et reconnu pour sa très bonne défense intérieure et extérieure. S’il développe un jeu offensif ne serait-ce que correct, on peut même espérer de voir en lui un nouveau Gerald Wallace.
La March Madness commence ce jeudi soir et s’étend jusqu’en avril. Si cette saison NBA capte peu d’intérêts en raison des restrictions dues au Covid, à l’absence des fans et aux nombreux matchs décalés, le championnat NCAA est une expérience à vivre, avec son vent de fraicheur, ses promesses de grande carrière pour certains et la conclusion de belles histoires pour d’autres. Force à la jeunesse !