Dans le paysage NBA, les Knicks font vraiment figure de franchise à part. La franchise est dotée d’une réputation sans borne malgré des décennies de déceptions, d’un public de feu, qui tend trop souvent à s’enflammer et d’un poids médiatique qui en fait une plaque tournante de la ligue même pendant de longues années de disettes.
La disette justement, c’était le programme attendu pour cette saison, encore. La trajectoire fut pourtant toute autre. Si l’on a longtemps été nombreux à tempérer, à rappeler régulièrement que la réussite de l’équipe pouvait s’essouffler, il n’en fut rien. Tout au long de la saison, cette équipe a su repousser l’échec, trouver de nouvelles ressources pour arracher les playoffs au milieu d’une conférence où nombreuses étaient les franchises habitées par le doute. Mieux, en fin de compte, les Knicks se sont battus jusqu’au bout et ont arraché l’avantage du terrain.
Une série de bonnes nouvelles qui a trouvé son couronnement quand les fans découvraient leur adversaire attitré : les Atlanta Hawks. La satisfaction s’ajoutait au milieu des multiples autres de cette saison : Julius Randle qui porte l’équipe, Tom Thibodeau qui monte une défense d’élite, Immanuel Quickley qui s’avère un des meilleurs picks de draft de la franchise depuis longtemps, R.J Barrett qui continue de tracer sa route… et le MIP pour Randle. Bilan positif, avantage du terrain, trophée individuel, rien ne voilait le grand ciel bleu qui trônait au-dessus de la Grosse Pomme. Alors quand votre adversaire s’avère être les Hawks, il n’y avait pas de quoi ternir le tableau, n’est-ce pas ? A fortiori quand l’alternative était le dernier finaliste, le Miami Heat.
Pourtant, à peine 10 jours que les playoffs ont commencé et le cœur des fans semble déjà mis à rude épreuve. Peut-être parce que l’enthousiasme autour de la franchise est toujours décuplé. Peut-être parce que tant de victoires quotidiennes ont fait tourner les têtes. Peut-être parce qu’on dit que la défense fait gagner en playoffs, et que la défense, ça, les Knicks en ont une.
En quelques jours, l’enthousiasme est devenu rancœur et défaitisme. Malgré l’avantage du terrain, les Hawks dominent de la tête et des épaules cette série. Atlanta mène 3-1, Julius Randle est l’ombre du joueur qu’il a été cette saison et la troupe de Tom Thibodeau est ni capable de stopper Trae Young, ni capable d’exploiter sa faiblesse en défense. Pourtant, alors que le précipice s’approche, il est important de rappeler deux choses. Tout d’abord, les Knicks n’étaient pas les favoris de cette série. Ensuite, cette défaite au premier tour n’aurait rien d’un échec, puisque cette saison est probablement la plus belle depuis 2013, à plus forte raison lorsqu’on se souvient que, comme il y a 8 ans, personne n’attendait l’équipe à pareille fête.
New-York n’a pas à rougir …
La tête qui tourne, New-York a pu oublier certains éléments. Certes, l’appétit vient en mangeant et on s’habitue vite à la victoire. Tant est si bien que les difficultés rencontrées face à une équipe qui fait également ses premiers pas en playoffs peut rendre la pilule particulièrement dure à avaler. Que la joie et l’enthousiasme qui soufflait avec le vent de la post-saison, a vite été remplacé par un climat plus maussade sur les réseaux et autour de la franchise.
Pourtant, quelques jours avant la saison, durant nos previews annuelles, nous avions affiché comme tant d’autres deux objectifs clés pour la franchise : développer la jeunesse et établir une culture. Si le premier point n’est pas une réussite évidente, le second est en revanche allé au-delà des attentes. Les Knicks sont redevenus une équipe qui connaît ses valeurs ; 4è défense de la Ligue, les hommes de Thibodeau ont su devenir intraitables dans la protection de la raquette, véritable sésame en NBA. Cela, le coach et sa troupe l’ont établi avec un manque de profondeur évident, avec des joueurs qui, pour beaucoup, se sont retrouvés très (trop ?) haut dans la hiérarchie de l’équipe. Doit-on préciser qu’Elfrid Payton n’a rien à faire en tant que titulaire à la mène d’une équipe ? Faut-il revenir sur le cas Reggie Bullock qui, s’il est un soldat, n’est pas l’ailier dont tout le monde rêve dans son 5 de départ ? N’omettons pas que l’équipe a tiré sur la corde de ses titulaires, dans l’antique tradition de Thibs, pour pouvoir perdurer. Gardons également en mémoire que la très belle pioche “Derrick Rose”, véritable réussite du front-office à la mi-saison, a permis à l’équipe de maintenir ce rythme insensé quand Immanuel Quickley percutait de plein fouet le rookie wall. Si, au sein de nos previews de la saison, nous avions énoncé deux objectifs majeurs : rêver de Playoffs voire d’un second tour semblait sincèrement impensable.
Pour cela, fan des Knicks, il n’y a que du positif à retenir de cette saison. Alors oui, être mené 3-1, sans la manière, au cours de se premier tour est décevant. Tout comme voir certains joueurs très en l’aise en régulière imploser est rageant. A la fin toutefois, tout cela était prévisible : les Hawks sont plus talentueux, leur saison fut bien plus contrariée par les blessures et en playoffs… le talent offensif est indispensable. Et dans ce compartiment, les Knicks étaient à la traîne sur leur adversaire.
… ni Julius Randle
Si les médias et les fans cherchent un bouc-émissaire à cette débâcle, le coupable semble déjà tout trouvé. La série n’est certes pas terminée, mais rattraper 4 matchs aussi ratés semble d’ores-et-déjà impossible. La vérité, c’est que Randle n’a pas été à la hauteur des attentes des fans, ni à ce qu’il démontre match après match depuis le 22 décembre.
L’autre vérité, plus dure à entendre, c’est que la saison régulière et les playoffs sont deux mondes différents ; Julius Randle n’a jamais été un franchise player, ce que les derniers mois ont eu tendance à faire oublier. Il y a moins d’un an, beaucoup de fans espéraient que l’ailier-fort soit échangé afin de récupérer quelques jeunes joueurs prometteurs ou des picks de draft. Sa précédente saison était incomparable à celle-ci et avait même pris une tournure véritablement désastreuse. Et quoi qu’il en soit, on n’a jamais réellement vu en en lui une première option capable de porter une franchise tout au long d’une saison.
Pourtant, il a travaillé très dur toute l’intersaison, ne profitant pas de la crise sanitaire et de la bulle dont il était exclu pour voguer à d’autres activités. Il a perfectionné son jeu de passe, travaillé comme un bourreau sur son tir à 3 points, sur son dribble et a fini par saisir l’opportunité offerte par Tom Thibodeau. Pour cela, il a été érigé comme l’une des sensations de la saison. Si cela ne fait pas de lui une option viable pour la post-saison, à fortiori avec un manque de profil suffisamment polyvalents pour compenser ses faiblesses, il n’a pas à rougir d’avoir fait l’inattendu ou d’avoir échoué dans une tâche pour laquelle il n’est pas taillé.
L’important est ailleurs
S’il y a beaucoup de chose à tirer de cette saison, la déception ne semble pas en faire partie. L’essentiel semble être ailleurs, et il faudrait apprécier ce qui est encore en jeu, à savoir un 3eme match (au moins) au Madison Square Garden, la qualification pour les joutes printanières, cette première expérience pour la jeunesse new-yorkaise (Barrett, Quickley, Toppin), voire même les magnifiques flash d’un Derrick Rose qui n’a plus été vu à ce niveau depuis belles lurettes.
Dans le même temps, il conviendra peut-être de se dire que beaucoup d’enseignements sont à tirer pour la suite. Effectivement, il faudra quelqu’un devant Julius Randle pour rêver plus grand, élément crucial pour éviter de jeter ses finances trop vite dans l’espoir de retrouver les sommets. Ce risque pourrait résulter de la victoire potentielle face aux Hawks. Les Knicks ont sûrement trouvé un coach autour duquel construire une équipe, puisque Thibs a ramené une identité au sein de la franchise, ce qui ne sera pas pour déplaire à la ville. Désormais, la franchise voit plus clair, tant sur les profils qu’elle doit ramener dans les années à venir que sur les places disponibles pour y arriver. Car si New-York a fait une grande saison, elle l’a fait avec un nombre réduit de joueurs et des vétérans amenés à partir. Mais le blueprint de ce qui est à construire est à disposition.
Ne reste plus qu’à choisir la manière. Et avoir un peu de chance.