Vous le découvrez de plus en plus avec Sport en France, vous suivez ses aventures sur Twitter, ou tout simplement vous avez écouté ses conseils sur Winamax TV autrefois : Lukas Nicot devient de plus en plus le visage d’une nouvelle génération de commentateurs du basket. Au travers des époques, les fans de basketball Français ont toujours pu compter sur plusieurs générations de commentateurs passionnés : de la naissance de Canal avec George Eddy, la seconde vague avec les Monclar, Reverchon, la troisième avec les plateformes sociale où l’on y retrouve First Team, Trashtalk, avec le développement de la communauté en ligne, il y a désormais une porte ouverte à l’arrivée de nouvelle figures pour compléter l’éventail de ceux qui nous racontent le jeu. Lukas est à l’image de cette nouvelle génération, avec un parcours et un profil auquel tout fan de basket pourrait s’identifier. Avec des péripéties, des douleurs et des leçons de vie qui doivent nous inspirer. Mais Lukas est aussi porteur d’un message moderne : celui qui rappelle qu’il n’y a pas que de l’autre côté de l’Atlantique que la légende de la balle orange s’écrit, une vision que nous partageons profondément.
QiBasket est allé à sa rencontre !
Salut Lukas, commençons par le commencement : parle-nous de ton parcours
Par où commencer ! Je suis passé par des trucs classiques. Au collège et lycée, j’ai grandi à Villejuif (94), et mes parents voulaient un cursus un peu « safe », donc je suis parti dans le 13e pour rejoindre une école privée.
Mais déjà à ce moment-là je savais où je voulais aller dans ma vie. J’hésitais entre deux idées : cinéaste et commentateur sportif. Je faisais mes propres films depuis le primaire. Vu que mon père était monteur, j’invitais mes potes à la maison et je faisais l’acteur sur des films de sport faits maison !
« J’ai fait une recherche en ligne « NBA » et « Pierce » »
Et le basket entre dans ta vie !
Au collège, je commence à y goûter après un échange scolaire en Irlande en 2007. Je suis alors passé du foot au basket. La fille avec qui j’ai fait l’échange était très sport et avant mon départ, elle a souhaité me faire un cadeau : elle m’a offert un sac de sport. Sauf que quand je l’ouvre, je découvre un maillot des Celtics de Paul Pierce.
Mais la réalité, c’est qu’elle ne savait pas ce que c’était la NBA ! Elle a simplement vu les symboles celtes ! En rentrant j’ai fait une recherche en ligne « NBA » et « Pierce ». Et là, ça ne m’a plus lâché. Je regardais tous les highlights, avec une connexion pas si top à l’époque, sans pouvoir regarder les matchs la nuit. Du coup, je suis tombé complètement fous des top 10. Je me suis dit « on peut tellement bien vendre un sport » en quelques minutes à peine.
Comment ça te lance dans ton parcours après ?
Je finis mon baccalauréat série L et là, c’est bon, je sais où je veux me lancer. Je regardais où devenir journaliste ou commentateur. J’ai d’abord fait les prépas science po, mais au final je me suis lancé sur une licence d’histoire à Paris I… Et je n’y fait que trois mois. Ok, j’adorais parler histoire, mais tu ne sentais pas que tu allais en faire quelque chose d’utile.
Qu’est-ce qui a débloqué la situation ?
Pendant cette période, je passais sur un playground dans le 13e. Je m’y suis fait quelques potes, au point d’y passer plus de temps que sur les bancs de la fac ! Sauf que… Ces potes venaient d’une école : l’ESJ de Paris. Et cette école, je n’en avais jamais entendu parler, mais aussi je n’avais pas trop cherché dans ces établissements qui coûtaient juste trop cher. J’ai donc pris le temps de regarder les opportunités et là… On me dit qu’il faudra attendre avant de pouvoir prétendre m’y lancer. Je n’aime pas faire du sur-place, alors du coup…j’ai réussi à négocier de quoi me payer l’IEJ Paris ! Je fais une première année en rush, mais je m’éclate totalement ! Surtout que pendant ce temps, j’enchaîne les montages sur YouTube, sur la NBA, je fais des podcasts.
« C’est à toi de t’ouvrir les portes et les perspectives »
Et le plus important : ton carnet d’adresse se remplit.
Oui ! Car le piège, de ces écoles, c’est qu’elles te fournissent le bagage, les compétences techniques sur un métier, c’est très bien, mais derrière, c’est à toi de t’ouvrir les portes et les perspectives. Sur ce point, j’avais un avantage : mes différents stages de journalisme, à Canal, au Grand Journal, chez Infosport, chez France TV, à la rédac’ sport d’Itélé (ancêtre de Cnews). Ces différentes missions, elles te donnent un réseau. Mais l’école m’avait aussi permis de faire un stage chez Yahoo Sport pour l’Euro de foot en 2016, et chez France TV juste après, pour les Jeux de Rio. Ce fut un mois, d’articles, de Facebook live. Tout ça, ça a remplis le CV, « Bel été sur France 2 » comme on dit !
Mais je n’arrive pas à me reposer sur ces minis aventures, et je n’ai pas encore trouvé la vraie porte vers le sport. Du coup j’enchaîne, je vais sur « Thé ou Café » sur France 2 de septembre 2016 à janvier 2017, je fais les dossiers invités, les questions d’émissions, ça m’apporte énormément sur le volet culturel parce qu’on rencontre des personnalités très variées. Mais là encore, c’est une mission qui s’arrête dans le temps.
« Un gars capable de parler basket tous les jours »
Le moment décisif dans ta carrière c’est Winamax, là où on s’est rencontré !
Tu te dis « enfin un CDI » où tu peux taffer t’éclater, avoir plus de sécurité. J’ai fait 3 ans sur leur web télé, mais avec un objectif pas seulement basket, mais Coupe du Monde 2018. En parallèle, je voulais mettre en valeur d’autres sports et bien entendu la NBA. Côté Winamax, c’était ce qu’ils voulaient : un gars capable de parler basket tous les jours. Je me suis donc retrouver au quotidien avec des consultants XXL (Rémi Reverchon et Jacques Monclar) et une équipe jeune et surtout une hiérarchie qui voulait nous laisser les mains libres. J’y rencontre Marion Santiago, et c’est là effectivement qu’on se rencontre avec QiBasket !
Mais il n’y a pas que ça…
A partir de 2017, je commente aussi pour la FFBB et quelques-unes de leurs compétitions ! Au départ, Winamax m’a laisser faire sans soucis, mais à partir de 2020, le classique remplacement par un autre manager a apporté des changements, dans lesquels je me suis senti totalement mis de côté.
Mais ça t’ouvre la tête à des opportunités !
La première vague COVID passe, et durant l’été 2020, voilà la FFBB qui me propose de commenter la finale de la Coupe de France Bourges vs ASVEL à Bercy ! Je suis hyper motivé, je travaille à fond, je rentre de vacances plus tôt et me voilà à Bercy pour commenter avec la légende Céline Dumerc. Tout est en place, le public est présent, mais les joueuses se mettent en grève. Réunion de crise à la FFBB, la Ministre Roxana Maracineanu s’en mêle, histoires de jauges, de tests, bref… La rencontre est annulée. Et au lieu de commenter avec Dumerc, je suis face à mon sandwich triangle dans une ambiance bien plombée.
« Mon CV a parlé pour moi »
On comprend la frustration… Mais le réseau finit par payer !
Un contact d’Eurofilms était présent ce soir-là. Eurofilms c’est une boite de production qui bossait notamment avec RMC. Il m’a vu, un peu dans le dur, et il est venu me parler, m’expliquer que l’Equipe allait prendre les droits de la Jeep Elite, et que Sport en France allait aussi prendre un match par semaine.
Là je me suis dit, la Jeep Elite, c’est le top en France. C’était mon opportunité ! Et après, c’est allé super vite. Mon CV a parlé pour moi mais aussi mes passages de commentateur pendant le championnat de 3×3 de l’Open de France à Nantes en 2020 que j’avais aussi réussi à obtenir. Alors j’ai rejoint l’équipe, qui m’a tout de suite demandé ma liste de consultants. J’ai proposé une sacrée liste, mais c’est Fred Weiss et Angelo Tsagarakis qui ont finalement été les lauréats !
« Le pire moment de ma vie ».
Le rêve ! Mais le COVID s’en mêle encore.
J’ai fait toute la saison (compliquée) de Jeep Elite. C’est beaucoup de chance quand on sait que ce secteur ne roule pas non plus sur l’or. Puis nouvelle vague, l’interruption de la saison de Jeep Elite… Mais là encore, c’était une porte ouverte pour trouver quelque chose.
Et là… On me proposé d’aller à la bulle de Bourges pour l’Euroleague féminine. Comme pour 2020, j’ai bossé à fond pendant 2-3 semaines, comme pour 2020, j’étais prêt. Juste avant Bourges, je fais un match de Jeep Elite à Pau. Le matin même qui suit, je vais au train pour rejoindre Bourges, et là, un résultat de test arrive : je suis positif.
Le pire moment de ma vie, un grand moment de tristesse, de larmes, et tout ça sans avoir de symptômes. J’avais acheté une caméra, j’avais préparé un blog, j’avais prévu des reportages. J’étais dévasté.
Difficile à vivre, encore une fois. Tu te projettes comment désormais ?
Là, je vois les JO qui s’envolent (Lukas avait annoncé le matin de l’interview qu’il ne commenterait pas les jeux, ndlr). Donc la prochaine étape c’est septembre, mais avant ça, il y aura encore les Women Series du 3×3 et plusieurs événements. Après les Jeux, il y a aussi la Coupe d’Europe de 3×3 qui aura lieu devant la Tour Eiffel ! Ça me donne énormément envie et ça dépendra bien sûr de qui aura les droits, mais c’est un événement de dingue. Et puis bien sur la Jeep Elite la saison prochaine, avec plus de régularité, sans COVID !
« J’ai envie d’être une génération de la nouvelle décennie ».
On voit arriver cette nouvelle génération de commentateurs. En France, le basket a ses têtes identifiées dans les divers médias, comment tu vois l’arrivée de nouveaux profils ?
On a les grandes figures, les Monclar, les Cauzette, les Eddy. Puis il y a la génération Trashtalk, First Team qui est bien installée aussi. J’ai envie d’être d’une génération de « la nouvelle décennie ». Mais je ne suis pas seul ! Hoopsidia, par exemple, est de cette génération. Je pense aussi à Brisco, Jeremy Iseult etc, ils créent du nouveau contenu !
Cette génération veut mettre le basket en valeur et ils ont tous eu le même réflexe : d’abord parler de la NBA, mais petit à petit, basculer dans quelques chose d’important : parler du basket français. Hoopsidia le fait, je pense à Eddy David aussi qui s’intéresse de plus en plus au féminin français, et c’est comme ça qu’on va gagner, en parlant de ce qui se passe chez nous.
Mon histoire par rapport à ça, c’est mon professeur d’école de journalisme. Alors que j’avais un podcast NBA à l’époque, il m’a fait comprendre que je n’avais même pas une vision du basket français. Il m’a dit « Lukas, il y a toujours un moment où se détache du basket US ». Je l’ai cru fou à l’époque ! Je ne m’en détache pas forcément, mais en France, on peut être sur le terrain, exposer, raconter une ligue et une histoire qui sont sous-médiatisées. Aujourd’hui, je n’ai jamais aussi peu regardé de NBA. Il y a des milliers d’histoire à raconter autour de ces garçons et ses filles.
« On n’a jamais eu autant de talent à chaque poste »
On te comprend ! Et d’ailleurs, comment tu sens les équipes de France pour les échéances qui arrivent ?*
Pour les filles, on n’a jamais eu autant de talent à chaque poste et dans les rotations. J’ai pu les rencontrer lors des matchs de préparation à l’Eurobasket contre l’Italie. Sandrine Gruda est inusable et elle à faim, Marine Johannes sort d’une saison avec un fort potentiel, Gaby Williams va apporte de l’athlétique, on a aussi la MVP Chartereau. Pour les Jeux qui arrivent, l’objectif semble être la médaille, je dirais d’argent.
Pour les garçons, on ne les a pas vu jouer depuis longtemps ensemble et tout le monde n’était pas là les dernières fois. On ne peut se baser que sur le mondial 2019 et les nouveaux leaders : Fournier et Gobert. Rudy est énorme, il a manqué de peu les finals. Fournier, les Jeux c’est son rêve. Il n’y a pas de raison qu’on n’aille pas loin, même si la Serbie sera très dure dans notre groupe ! En plus, on a Heurtel qui va revenir. En tout cas, c’est pas aussi défensif qu’en 2019, mais on aura, avec Heurtel, un talent en plus à la mène et si tu as Andrew Albicy et Frank Ntilikina pour apporter la « grinta » défensive, on peut faire du lourd !
*L’interview a eu lieu avant le début des jeux.
« Le COVID nous a donné une sacrée leçon : rien n’est acquis ».
Quel est ton point de vue sur le basketball français dans l’après-covid ?
Le problème, c’est qu’on ne sait pas quand c’est, l’après-COVID. Il faut se rappeler l’été dernier, on prenait des verres en terrasse sans masque. On est marqué mentalement, et on ne sait pas forcément si on va s’en sortir. Le COVID nous a donné une sacrée leçon : rien n’est acquis, du jour au lendemain tout peut partir. Mais je veux être positif : on peut aller mieux. On a une ouverture sur le digital qui se développe, une diffusion qui grandit, et malgré le COVID, le basket français n’a jamais été aussi visible !
Pour suivre Luka, rejoignez sa chaîne youtube : https://m.youtube.com/channel/UC_u8uwUaVf34vOjTlrsDiEA
Et suivez-le aussi sur Twitter ! https://twitter.com/LukasNicot