Une seule victoire sépare ces deux équipes à l’issue de la régulière. Pourtant sur le papier, cette confrontation semble être plus déséquilibrée que le bilan ne le laisse croire…
Après une sortie de route très remarquée face aux Mavs l’an passé, les Phoenix Suns sont repartis sur de nouvelles bases. En février le front office a décidé de faire passer un cap à cette équipe. Exit Cam Johsnon et Mikal Bridges et bonjour Kevin Durant, un trade qui pourrait bien changer l’histoire de la franchise d’ici quelques semaines. Phoenix termine 4ème, mais pour une fois le classement n’est pas un indicateur très viable. S’il y a bien une équipe qui est armée pour n’importe quelle confrontation cette année, ce sont les Suns.
De l’autre côté, les Los Angeles Clippers sont en courant alternatif dès que Kawhi Leonard ou Paul George se trouvent écartés des terrains. Malheureusement, la série devrait se jouer sans PG13, ou au moins une partie de la série si les Clippers parviennent à faire durer le plaisir. L’inverse aurait été plus embêtant pour LA lorsque l’on voit les récentes performances de Leonard qui sont étonnamment passées sous les radars. Mais on le sait, en playoffs, les défenses se resserrent et Los Angeles devra composer avec une menace offensive en moins. On risque donc de voir Kawhi beaucoup plus ciblé défensivement avec cette absence.
Le meilleur attaquant de sa génération comme facteur X
Si Kevin Durant n’a joué que 8 matchs sous les couleurs de Phoenix depuis son arrivée, la faute à un sol glissant, et une inclination très prononcée pour les blessures à répétition : les Suns ont remporté ces 8 matchs. L’intégration semble donc s’être bien passée. KD sur son passage à Phoenix jusqu’à maintenant c’est 26 points, 6,4 rebonds et 3,5 passes à 57% au tir et 54% à 3pts. En d’autres termes : « c’est pas mal. »
En face se pose donc la faculté à défendre des Clippers. Et le moins que l’on puisse c’est que c’est assez poreux, depuis la signature de Westbrook, les Clippers ont le 20è defensive rating de la ligue, de quoi donner des sueurs froides à Tyronn Lue pour préparer ses systèmes face à l’hydre à 4 têtes de Phoenix.
Via Cleaning the glass
Pour ceux qui auraient oublié ce que c’est Kevin Durant : c’est ça. L’échantillon de ses matchs à Phoenix est très faible, mais nous donne une idée assez convaincante de son poids dans le jeu. La seule équipe qui a tenu tête dernièrement à KD dans l’exercice des playoffs est Boston. Le seul problème pour les Clippers c’est que le potentiel défensif des Celtics est très loin de leur portée, et que les Suns ont bien plus d’armes offensives que les Nets de l’an passé.
Comment défendre Kevin Durant ?
Le constat peut sembler fataliste, mais les faits sont là, l’efficacité redoutable de KD rend l’équation très compliquée.
Le problème est que le Kevin Durant de Brooklyn a muté. Son jeu off ball est beaucoup plus important aujourd’hui. Il joue beaucoup moins d’iso qu’à Brooklyn, 21,6% de ses actions, contre 13% à Phoenix, mais il les joue mieux. Le laisser seul en attaque relève de l’hérésie, le Durant version Phoenix est le joueur le plus efficace de la ligue en isolation avec 1,46 points par possession. Encore une fois l’échantillon de 8 matchs est faible mais il met en lumière l’étendue de la dangerosité du roster des Suns. Il prend également plus de tirs off screens, en d’autres termes, ce qui avait fait la réussite collective de Boston, ne marchera pas. Vous n’allez pas doubler agressivement un joueur qui joue moins d’iso, car derrière Durant il y a d’autres attaquants sérieux…
Car on parle de KD, et à juste titre, mais derrière lui on retrouve un Devin Booker au sommet de son art en 28-5-5 à 50% de réussite au tir. Et dans la raquette Deandre Ayton sait se faire oublier avec l’armada offensive qui gravite autour de lui, mais signe une meilleure saison individuelle que l’an passé. Il culmine cette saison à 18 points et 10 rebonds par match, le tout à 60% de réussite au tir. C’est dire le danger offensif perpétuel que représente cet effectif de Phoenix.
Difficile de dire ce que prévoit Tyronn Lue pour tenter de ralentir cette attaque de feu, mais de grands ajustements sont à prévoir au cours de cette série et le match 1 nous donnera de bonnes indications. Est-ce que Kawhi va commencer à défendre sur Durant dès le G1 ? Sinon, qui d’autre ? Le coach des Clippers n’est pas du genre à laisser les choses lui échapper des mains sans rien faire, il pourrait bien nous réserver quelques surprises dans les 5 qu’il alignera. Réponse dans quelques jours.
Quelles perspectives en attaque pour LA ?
Westbrook time
Depuis le All star break, LA est l’une des équipes les plus performantes à longue distance, avec une efficacité de tir de 39 % à trois points. Cela a été l’un des piliers de leur jeu offensif, mais avec la perte de Morris et PG, c’est-à-dire de deux de leurs joueurs les plus prolifiques en matière de tirs à longue distance, ils devront trouver de nouvelles options pour maintenir cette efficacité.
Cependant, les Clippers ne seront pas dépourvus d’armes pour faire face à la solide défense des Suns. Ils pourraient notamment tirer parti de leur capacité à attirer les fautes adverses, l’équipe étant l’une des meilleures de la ligue en matière de lancers francs obtenus. Les Suns sont également une des équipes les plus laxistes en termes de fautes commises, ce qui représente une opportunité pour les Clippers. On sait par exemple à quel point, les problèmes de fautes avaient coûté cher à Ayton en Finales NBA face aux Bucks.
Dans cette optique, Russell Westbrook pourrait avoir son quart d’heure de gloire face à celui qui semble être le défenseur le plus faible du 5 de départ de Phoenix. C’est un excellent meneur slasher, avec une bonne vision du jeu qui peut monter au drive sans problème grâce à sa vitesse et son dribble, qui se présente face à un CP3 plus tout jeune. Dans plusieurs systèmes de jeu, RW peut utiliser ce différentiel pour aller au drive. Ce qui lui permet ou bien de finir facilement, ou alors d’obtenir des fautes.
Avec Zubac en point d’ancrage et Gordon dans les corners qui tourne à 43% de réussite, Russ aura de quoi faire dans les situations de pick and roll. Là encore, il faudra tenter des choses, essayer de nourrir Zubac pour mettre Ayton en foul trouble devrait être le premier objectif des Clippers en attaque. Ou encore, essayer de forcer les switchs pour mettre Kawhi ou Westbrook face à Paul, et jouer l’iso.
Jouer les contre-attaque à tout va
En ce qui concerne les contre-attaques, les Clippers ont vu leur jeu s’accélérer depuis l’arrivée de Westbrook, bien que le joueur soit souvent critiqué pour son taux de pertes de balles élevé, à juste titre puisqu’il perd 40% des ballons de son équipe, soit environ 3,5 turnovers par match. Malgré tout les Clippers ont été capables de capitaliser sur les occasions de contre-attaques, avec un pourcentage de réussite de 51 % lorsqu’il est sur le terrain. Les Clippers pourraient donc trouver des opportunités pour des tirs faciles en contre-attaque.
Les Clippers ont donc tout intérêt à accélérer le jeu et prendre Phoenix à défaut. Et en cela, Westbrook sera le facteur X de Los Angeles. S’il peut assurer un rythme élevé et ne pas laisser un jeu de de demi-terrain s’installer, sans perdre trop de ballons, alors l’attaque des Clippers pourra prendre le dessus sur certaines phases. Les Clippers sont depuis l’arrivée de Russ l’une des équipes les plus prolifiques pour les points marqués en “fast break”, là où les Suns sont dans la deuxième moitié de la ligue sur les points encaissés.
Voilà typiquement le genre de séquences sur lesquelles on attend Russell dans cette série :
Et le genre de séquences encore trop fréquentes qu’il faudra éviter :
Tyronn Lue n’a pas énormément de secteurs avantageux dans cette série, que ce soit offensivement, ou défensivement. Il va donc falloir jouer parfaitement sur cette force de leur jeu et dans ce cas la série pourrait devenir très excitante. Sans mentionner la force de Kawhi qui peut prendre l’avantage sur presque toutes ses phases en iso bien sûr, mais le jeu de Lue ne peut pas décemment uniquement reposer sur lui.
Quid des role players des Suns ?
Les Suns font trembler leurs adversaires grâce à des noms ronflants articulés autour d’un duo d’attaquant insatiable : Devin Booker & Kevin Durant. Mais une série de Playoffs s’avérant souvent être une bataille tactique, que peut opposer Phoenix à la profondeur des Clippers ?
Torrey Craig et Josh Okogie, un rôle de taille ?
L’arrivée de Kevin Durant a relancé les ambitions des Suns. Mais elle a également coûté deux solides options sur les ailes : Mikal Bridges et Cam Johnson. Dès lors, des role players plus bas dans l’organigramme de la franchise ont vu leur importance décuplées. En l’occurrence, il s’agit de Torrey Craig (55,6% d’eFG cette saison, c’est bien) et Josh Okogie (47,5% d’eFG% cette saison, c’est très faible), deux joueurs aux profils appréciables pour leur engagement défensif, mais qui peuvent tendre, lorsqu’en panne d’adresse, à devenir des non-facteurs en attaque. Leur mission sera de rentrer les tirs ouverts et de profiter des impasses qui seront faites sur eux pour rentrer leurs tirs (grands) ouverts. Si Craig a connu des saisons correctes au tir, ce n’est pas le cas d’Okogie.
Sûrement régulièrement chargés de défendre sur les meilleurs ailiers adverses, leur travail sera très limité en attaque. Mais il s’agira de saisir les opportunités pour ne pas laisser leurs coéquipiers attaquer à 4. D’autant que DeAndre Ayton lui-même, peut avoir tendance à être trop passif en attaque.
Il sera également intéressant de suivre quel impact auront Cameron Payne et Terrence Ross. Le premier après deux bonnes premières saisons avec Phoenix a vu son efficacité chuter lourdement. Tandis que le second, intéressant par ses facultés à scorer en sortie de banc a également paru emprunté depuis son arrivée aux Suns : en témoigne sont adresse à 3pts, seulement 34,7%.
En somme le banc de Phoenix soulève de réelles interrogations. Si Paul George revenait, le surplus de profondeur des Clippers pourrait alors peser sur la série. Mais là, nous sommes dans le monde des hypothèses et la durée de l’affrontement deviendrait alors un véritable facteur.
Qu’attendre de cette série ?
Du spectacle ! Rappelons qu’on retrouve KD et RW et que ces deux-là adorent se défier, donc cette série pourrait donner lieu à quelques séquences de trashtalking assez folles. Ensuite on aurait aimé voir Paul George, son absence risque de couter très cher à LA. Même s’ils ont des armes offensives à n’en pas douter, la défense solide de Phoenix a une cible en moins à gérer et ça devrait se répercuter sur le potentiel offensif de Kawhi Leonard.
Nous n’avons pas mentionné les bancs, car la série devrait se jouer sur des effectifs très resserrés et il est difficile de prévoir ce qui va se passer de ce côté du terrain, mais là encore il y a un point d’optimisme en faveur des Clippers, qui ont un banc plus étoffé et plus qualitatif que celui des Suns.
Lorsqu’on voit cette affiche on pense tout de suite à donner l’avantage à Phoenix, et ce pour des raisons évidentes. Sur le papier cette équipe est largement supérieure du premier coup d’œil. Mais lorsque l’on creuse, on se rend compte que les Clippers ne sont pas si loin que ça, et s’ils réalisent de très sérieux matchs, ils pourraient bien piéger la bande à Monty Williams.
Pour les raisons évoquées plus haut, parce que Kevin Durant, parce que Devin Booker, et parce qu’il faut bien se mouiller, on va donner l’avantage à Phoenix. Mais attention à LA et ce côté underdog qui peut galvaniser les joueurs et nous donner une superbe série à regarder, sans aucun doute.
Phoenix Suns : 60%
Los Angeles Clippers : 40%