Voilà une équipe que de nombreux fans de basket attendent de pied ferme. Evidemment pas pour la voir soulever le trophée Larry O’Brien en fin de saison prochaine – soyons sérieux – mais pour la voir jouer, tout simplement. Et oui, nous parlons bien des Atlanta Hawks. Penser aujourd’hui que les Hawks sont une équipe chiante à voir jouer relève au mieux de l’inconscience, au pire de la bêtise.
Certes, le bilan de la saison 2018-19 n’est pas fameux sur le papier : 12è de la conférence Est, avec seulement 29 victoires à se mettre sous la dent pour 53 défaites. Mais est-ce que ça comptait tant que ça, après tout ? Dans le projet Hawks, pas réellement. L’objectif la saison dernière n’était pas comptable, il était au-delà : il fallait recréer des bases solides et pérennes, après l’adieu des joueurs de la génération Budenholzer et le départ de ce dernier vers Milwaukee. Nouveaux visages sur le terrain et sur le banc, nouvelle identité à créer, nouveau projet à mettre en place, l’objectif était avant tout de créer de la cohésion, de voir se développer une espèce d’alchimie positive. Et de ce point de vue là, on peut dire que le contrat a été rempli.
Trae Young, John Collins, Kevin Huerter, Omari Spellman et consorts ont su développer un jeu enthousiasmant, à défaut d’être efficace en termes de victoire. C’est jeune – bon, ok, si on rajoute Vince Carter un peu moins -, ça court, ça saute, ça bouge, ça shoote, et ça n’a pas peur de grand chose… Sauf de défendre, à vrai dire, mais on y reviendra.
Les Hawks ont été l’une des équipes jouant le plus up-tempo, assez fort logiquement avec l’axe fort que constituait Young et Collins. Ce dernier, dans sa deuxième saison NBA, s’est particulièrement illustré dans un registre de poste 4 certes un peu frêle, mais tout de même efficient dans ce qu’il sait faire. Meilleur marqueur et rebondeur de l’équipe, il a surtout pu profiter des espaces crées par Trae Young. Young, le mystère de la classe de draft 2019, avait pour certains beaucoup à prouver. Il était Celui-Qu’On-Avait-Tradé-Contre-Luka pour beaucoup. Et c’est peu dire que le chétif gamin a assuré. Vista, lecture de jeu balle en main, qualité de passe, de fixation, handle, shoot, le gamin a du ballon, à n’en pas douter, et sait exploiter son talent. Sa seconde partie de saison l’a même fait revenir un temps dans la discussion pour le trophée de Rookie de l’Année, sans parvenir toutefois à faire chuter Luka Doncic de son fauteuil.
L’arrivée de Lloyd Pierce était également un mystère, après des années de coaching made in Budenholzer, le coach rookie avait du boulot et allait devoir mettre sa patte sur cette équipe. Si en attaque on a vu une balle toujours vivante et en mouvement, avec des systèmes de jeu permettant d’optimiser les qualités de chacun, défensivement en revanche… Les choses ont été beaucoup plus compliqué pour Pierce et ses joueurs. Forcément quand vous marquez 120 points mais que vous en prenez 130 tous les soirs, c’est une mission assez délicate que celle de collectionner les victoires.
Les Hawks avaient entamé la saison 2018-19 sans certitudes mais avec un projet. Et l’on peut dire qu’en perspective de la saison 2019-20, les choses semblent aller dans la bonne direction.
Résumé de l’été
Pour le front-office de la franchise, l’été a commencé assez tôt. Avec une flopée de potentiels picks de draft très bien placés, les yeux étaient tournés vers la loterie de la draft. Finalement les fans n’ont pas eu droit au podium de celle-ci, et ont dû se contenter des picks 8 et 10 au premier tour. Le soir de la grande messe venu, les Hawks réussirent à chiper le pick 4 des Lakers, tout en conservant leur 10è choix. Finalement, ce sont De’Andre Hunter et Cam Reddish qui rejoignent le roster d’Atlanta. Le premier a un profil de 3&D parfait pour le roster et le projet de la franchise. Le second n’était pas attendu aussi bas par beaucoup d’observateurs, et c’est finalement un coup idéal pour les Hawks qui récupèrent un jeune joueur à la palette offensive déjà assez complète, mais qui reste un diamant à polir pour pouvoir exploser dans quelques années : ça tombe bien, Atlanta n’est pas pressé.
Quelques jours plus tard, les fans des Hawks étaient prêts à sabrer le champagne quand Kent Bazemore, qui avait plus tôt activé sa player option à plus de 19 millions l’année, était envoyé à Portland. Mais la bouteille fut rapidement remise au frais quand finalement ce dernier fut échangé contre Evan Turner et son année toute aussi chère. Dans le genre contrat chiant, les Hawks eurent également l’honneur de récupérer celui d’Allen Crabbe, en provenance des Nets, échangé contre Taurean Prince.
Tiens, vous en voulez un autre de trade bizarre ? Chandler Parsons débarque de Memphis avec son genou en carton en échange de Solomon Hill, qui n’avait même pas eu le temps d’atterrir à Atlanta en arrivant de la Nouvelle-Orélans, et Mason Plumlee. Dans la foulée, Omari Spellman était envoyé aux Warriors en échange de Damian Jones. Ayant peur que Chandler Parsons se sente trop seul à l’infirmerie durant la saison, les Hawks le prirent en pitié et décidèrent d’offrir un contrat à Jabari Parker, pour deux ans et 13 millions. Pour le reste de l’été, le front-office se concentrait sur des joueurs de seconde zone, plus pour compléter le roster que pour y jouer un vrai rôle.
Ah oui, on allait oublier : à 42 ans, Vince Carter a décidé de rempiler sous le jersey rouge et blanc. 22ème saison NBA pour Vinsanity, qui claque toujours de meilleurs dunks que toi, à 42 ans, à l’échauffement, en claquettes.
Roster
Meneurs : Trae Young – Brandon Goodwin (two way contract)
Arrières : Kevin Huerter – Allen Crabbe – Evan Turner
Ailiers : De’Andre Hunter – DeAndre Bembry – Chandler Parsons – Vince Carter
Ailiers Forts : John Collins – Cam Reddish – Jabari Parker – Ray Spalding
Pivots : Alex Len – Damian Jones – Bruno Fernando
Jeu & Coaching
La saison dernière, les Hawks s’appuyaient sur une attaque tout feu tout flamme, faite de jeu rapide et de jeu en transition rapide. L’accent était clairement mis sur la jeunesse du roster, et les talents de vista de Young sur les situations de pick and roll notamment. Avec un noyau dur conservé, le style de jeu ne devrait pas réellement changer. Il faudra néanmoins que le frêle meneur s’habitue à voir les défenses des 29 autres équipes le cibler, aussi bien en attaque qu’en défense. On le sait, la deuxième saison en NBA est souvent révélatrice pour les ex-rookies, l’effet de surprise s’estompant largement. Le backcourt Young-Huerter offre aux Hawks un très beau spacing, avec deux joueurs adroits, avec potentiellement de gros volumes. L’axe 1-4 Young et Collins devrait être la base de l’attaque d’Atlanta pour les années à venir, et la complémentarité du duo sur pick and roll/pop devra se confirmer dès cette année. L’intégration de Reddish sera à suivre, lui que de nombreux observateurs NCAA dotent d’une superbe palette offensive technique. Si un nouveau scoreur régulier peut pointer le bout de son nez du côté des Hawks dans un registre peut être plus percutant que la paire de shooteurs Young-Huerter, attention…
En bref, offensivement pour Lloyd Pierce le plus gros travail de cette saison à venir est de réussir à construire autour des premières pierres posées la saison dernière, en intégrant les nouveaux venus au projet.
En revanche, défensivement, là où aucune ou peu de bases ont été mise en place, il y a du boulot, et du gros. Quand votre créateur principal et indispensable s’appelle Trae Young, forcément qu’en défense, vous allez en pâtir. Petit, physiquement frêle et sans longueur de bras pour rattraper le coup, le meneur ne peut défendre qu’un poste, et encore. A moins d’une prise de masse monstrueuse et génétiquement douteuse, cette faiblesse sera toujours présente dans le jeu de Young, et c’est à lui et à Pierce de trouver des moyens de passer outre. Pour ce faire, la première solution serait de construire les bases d’une vraie défense collective. Avec l’arrivée d’Hunter sur les ailes, Pierce disposera d’un élément un peu plus consistant dans le domaine défensif que ce qu’il avait sous la main l’an dernier. Mais Hunter ne pourra pas tout faire dès sa première saison, aussi motivé et généreux soit-il. Dans la raquette, le problème défensif est le même, avec aucun joueur réputé pour des habilités dans le domaine. Impossible pourtant pour les Hawks d’avancer de manière sereine dans la construction de leur projet sans défense.
Quel 5 majeur ?
Trae Young – Kevin Huerter – DeAndre Hunter – John Collins – Alex Len
Le backcourt semble établi et le changement peu probable dans le domaine. Pour le poste 3, on préfère faire débuter Hunter même si certains pourraient tenter le pari de faire démarrer Reddish à l’aile dès le départ. La possibilité que ce dernier offre de pouvoir jouer 3 ou 4 dans un système small ball en vogue nous fait préférer l’option de le faire débuter sur le banc en sixième homme. John Collins semble indétrônable également au poste 4, lui qui a tenu la raquette l’an dernier au scoring et au rebond. Au poste 5, c’est un choix par défaut, clairement. Le roster ne disposant d’aucun poste 5 de niveau titulaire NBA fiable, c’est Alex Len qui en profite, à charge pour lui de faire de la place, de récupérer du rebond, de courir de cercle à cercle, de porter des écrans à ne plus savoir quoi en faire, bref, de faire le travail de l’ombre.
Forces du roster
Incarnée par Trae Young, incontournable tête d’affiche du projet Hawks, la jeunesse d’Atlanta est son plus grand atout. Avec les intégrations via la draft d’Hunter et Reddish, Atlanta dispose d’un des rosters les plus jeunes de la Ligue (et encore, il y a Vince Carter qui pourrait être le père de tous ces bambins). Le jeu déployé cette saison devrait s’en ressentir largement : de la course, du jeu rapide, de la fougue et de la fraîcheur. Les jeunes pousses d’Atlanta ne doivent pas avoir peur de grandir et de se frotter les coudes contre les mastodontes de la Grande Ligue.
Mais cette jeunesse est également bien encadrée, et c’est là une autre force du roster des Hawks. On s’est un peu moqué de leurs contrats précédemment, mais les arrivées de joueurs comme Evan Turner ou Allen Crabbe peuvent être précieuses pour des jeunes joueurs comme Huerter, Young, Hunter et compagnie, sans compter la présence de Papy Vince. Cet ensemble de jeunes joueurs et de joueurs confirmés doit permettre aux premiers de prendre du galon et de la confiance sans se croire arriver trop vite. Ça sera toujours ça de moins à gérer pour coach Pierce.
Si l’on parle de jeu pur, la principale force d’Atlanta reste le rythme que ces derniers seront a priori capables de mettre pour emballer un match. S’appuyant sur la jeunesse précédemment citée, les Hawks devraient envoyer du jeu, du jeu et encore du jeu. Dans cette perspective, la vista d’élite de Trae Young sera optimisée à son possible, et les capacités de passes du jeune meneur – si elles se confirment – faciliteront grandement la tâche de ses coéquipiers.
Allez, on met un petit bonus : si la santé tient sur le banc, il faut noter la profondeur dont dispose les Hawks, particulièrement sur les postes 3 et 4. Jabari Parker, Chandler Parsons, De’Andre Bembry, DeAndre Hunter, Cam Reddish, John Collins… ça commence à faire un petit paquet de joueurs. Bon, on sait qu’il y a de fortes chances que Parker et Chandler nous fasse mentir – on le souhaite pas, évidemment -, mais Pierce dispose ici d’un pool de joueurs polyvalents, pouvant évoluer sur 2 postes pour la plupart, qu’il est toujours intéressant d’avoir sous la main.
Faiblesses du roster
Evidemment la défense. Nous l’avons déjà évoqué donc pas besoin de s’étendre en long en large dessus, mais les Hawks partent de très loin défensivement. Si l’apport de certains nouveaux joueurs pourrait permettre de faire quelques progrès, il va falloir beaucoup de patience, de travail individuel et collectif pour arriver à dégager de ces Hawks-là une défense correcte, à défaut d’être bonne. Nul doute que les adversaires d’Atlanta, après avoir réussi à dompter le rythme du match, iront s’en donner à cœur joie pour pilonner cette défense trop frêle.
Autre faiblesse : la légèreté sur les postes 1 et 5. Si Trae Young parait clairement établi pour les années à venir à ce poste en tant que titulaire, derrière c’est le néant. Si on imagine que des joueurs comme Huerter ou encore Turner hériteront de certaines montées de balle, la solution semble peu enviable sur le long terme et même sur une saison complète. Ne faudrait-il pas mieux sacrifier quelques noms sur les postes 3/4 pour s’armer d’un backup digne de ce nom ? On a notre petite idée ici. Sur le poste 5, les choses sont encore plus difficiles, car avec Len, Fernando ou Jones pour tenir la raquette aux côtés de John Collins, comment dire autre chose que c’est un peu léger… Voire carrément faiblard. Ici aussi, on fait confiance au projet step-by-step des Hawks, mais dans le futur, trouver un poste 5 complémentaire à Collins semble une priorité non négociable.
Le joueur clé : Trae Young
En balance dans cette catégorie avec John Collins, le choix se porte sur le chétif meneur à la coupe de cheveux très tendancieuse.
Après une très bonne saison rookie, clôturée avec plus de 19 points et 8 passes de moyenne, mais où il aura surtout impressionné par son sens du jeu, Young va devoir faire face à un nouveau défi de taille : confirmer les espoirs placés en lui. A l’image de tous les rookies, Young a bénéficié pour sa première saison d’un effet de surprise évident. Même si son talent s’est confirmé au fur et à mesure de la saison, pas sûr que les équipes aient pour autant toutes prévues un plan pour contrecarrer Young. Cette saison, la donne devrait être différente. Les défenseurs le colleront de plus près, n’hésitant pas à lui rentrer dans le lard, sans lui laisser un brin d’air pour respirer pour empêcher le lutin de mettre en place le jeu d’Atlanta.
Young va devoir confirmer, trouver du rythme et de l’impact d’entrée de saison. Hors de question d’avoir un temps d’adaptation comme pour la première saison, il va falloir montrer les crocs dès l’opening night. Son rayonnement sur le terrain est primordial pour la bonne harmonie du roster cette année : son entente avec Collins, son feat avec Huerter, sa relation à créer avec Reddish et Huerter, … Young sera la pierre angulaire du système Hawks, à lui de montrer qu’il est de taille même face à une pression croissante.
La problématique de l’équipe : attention à ne pas se brûler les ailes
Jeunesse et problèmes défensifs ne font pas réellement bon ménage. Si on attend beaucoup de fraîcheur sur le terrain côté – et du spectacle ne nous mentons pas -, qu’est-ce que les Hawks ont vraiment dans le ventre ? Ne sont-ils pas encore trop bleus, trop tendres, trop jeunes pour tenir le cap dans les moments chauds et surtout pour le marathon qu’est chaque année la qualification en playoffs ? A vrai dire, sûrement.
Les errances défensives se paieront cash, la jeunesse d’une grosse partie de l’effectif leur fera commettre des erreurs, inévitables mais pourtant frustrantes. Il faudra garder la tête froide, ne pas perdre son sang froid et surtout ne pas mettre à mal la cohésion créée l’année dernière, y compris quand l’équipe traversera les moments de doutes et de flottement qu’une saison à 82 matchs peut offrir.
Le projet mis en place à fière allure et se déroule pour l’instant à la perfection. Mais attention à ne pas vouloir griller les étapes pour ne pas le mettre en péril. Il faudra intégrer Reddish et Hunter de la meilleure des manières, et surtout ne pas attendre d’un groupe relativement jeune monts et merveilles. La route qui mène au succès est un pont fragile (ceux qui ont la référence, vous êtes les meilleurs).
Pronostic
10e à l’Est (entre 32 et 37 victoires)
Allez, on coupe la poire en deux pour les Hawks. L’équipe de QiBasket se décide pour une 10è place à l’Est, soit un brin tout court pour accrocher le wagon des playoffs, notamment à cause des gros points noirs défensifs abordés précédemment. Dans les moments de vérité, les trous d’air défensifs pourraient se payer trop lourdement pour les hommes de Lloyd Pierce, et leur coûter quelques victoires lourdes de conséquences dans le bilan final. Mais avec une dixième place, les Hawks marqueraient une vraie progression, surtout en passant la barrière des 35 victoires. Le projet d’Atlanta autour du duo Trae Young-John Collins doit encore se faire les dents pour pouvoir prétendre aux hauteurs du classement, et nul doute que dans le futur, les aigles voleront plus haut ! Mesdames messieurs fans des Hawks, bonne saison à vous !