Après une intersaison des plus intrigantes, les Blazers suscitaient la curiosité de nombreux observateurs. Portland restait sur un premier tour de Playoffs rapidement expédié, sans espoir face aux futurs champions de Los Angeles, et après une saison en dents de scie. Un départ timide combinée à une difficulté chronique d’enchaîner les bons résultats conduisent la franchise à un bilan décevant lorsque la saison s’arrête pour cause sanitaire.
Frustrant, alors même que les Blazers avaient enfin dépassé le premier tour des Playoffs l’année précédente, se hissant jusqu’en finale de conférence. Finalement, Portland sera l’une des grandes gagnantes de la bulle d’Orlando. A trois victoires des Grizzlies à la reprise, ils affichent une forme spectaculaire sous l’impulsion d’un Lillard élu MVP de cette dernière partie de saison. Le ticket pour la postseason sera validé au cours du play-in face à Memphis, avant de chuter face aux Lakers donc.
Portland entamait donc son intersaison pleine de questions. Le bilan de la saison est décevant, et la franchise semble avoir de nouveau reculé d’un pas, que ce soit sur le plan des résultats ou du jeu. Certes, Jusuf Nurkic a longtemps été blessé et son retour dans la bulle a fait du bien. Mais comment les Blazers pourraient-ils repasser un cran au-dessus ?
Des mouvements intéressants
Le moins que l’on puisse dire, c’est que Neil Olshey et son équipe n’ont pas chômé cet automne. Pas de grandes pertes à déclarer dans le roster, et un besoin clair identifié : densifier les ailes, notamment sur le plan défensif. Portland en a trop souffert la saison dernière, et la franchise a réussi à mettre la main sur Robert Covington dans le cadre d’un trade. Son profil, idéal à côté du backcourt Lillard-McCollum, représentait une vraie plus-value pour Portland. Les Blazers ne se sont pas arrêtés en si bon chemin, mettant la main sur Derrick Jones Jr lors de la Free Agency, ainsi que sur Harry Giles. Le premier arrive de Miami pour amener de la densité à l’aile, et des qualités athlétiques. Giles de son côté est une véritable attraction pour les observateurs : son plafond élevé a pour l’instant été contraint par les blessures, mais son profil semble parfait pour Terry Stotts. Bon défenseur, doté de vraies qualités de playmaker à son poste, il assure une continuité au relais de Nurkic.
Portland débutait donc la saison avec un effectif sur le papier bien plus complet que l’année précédente. Plus de densité, des role players plus adaptés aux cadres en place, et de quoi espérer de belles choses malgré une concurrence attendue féroce à l’Ouest.
Des absents et une défense toujours en chantier
Les Blazers subissent une lourde défaite (100-120) d’entrée de jeu face à Utah. La suite des événements est tout aussi morose pour les hommes de Terry Stotts. Portland n’y arrive pas, et doit ses déconvenues en grande partie à sa piètre défense. Avant d’affronter les Timberwolves le 7 janvier, la franchise est déjà dans les bas-fonds de la ligue de ce côté du terrain. 28èmes au Defensive Rating, les Blazers encaissent des valises de points même lors de la victoire face à des Rockets encore dans la tourmente.
Une folle rumeur fait même son apparition : sous l’impulsion de Lillard, les Blazers tenteraient de recruter Draymond Green. Finalement, un peu de bruit pour rien, mais il n’y a pas de fumée sans feu. Malgré des victoires face aux Lakers et aux Warriors, les signaux envoyés ne sont pas positifs. On s’en remet beaucoup à Damian Lillard, et Nurkic a du mal à lancer sa saison. On sait l’importance du pivot bosniaque dans l’Oregon, et l’impact monstre qu’il peut avoir pour son équipe. A noter qu’avant même la blessure de Nurkic, Harry Giles restait très peu utilisé malgré une bonne présaison.
Les recrues Covington et Jones Jr n’apportent pas encore assez, et l’équipe doit déjà faire sans Zach Collins. L’ailier avait déjà subi une intervention en septembre pour opérer sa cheville gauche, et a du repasser sur le billard fin décembre. Alors qu’un retour sur les parquets était initialement prévu pour la mi-janvier.
Portland profite alors d’une série de matchs face à des adversaires en difficultés pour redresser la barre. Ils enchaînent quatre succès face à Minnesota, Sacramento, à deux reprises, et Toronto qui connaissait un début de saison très compliqué. Le bilan passe de nouveau en positif, mais la saison des Blazers s’apprêtent à vivre un mauvais tournant.
En effet, Terry Stotts perd coup sur coup deux de ses meilleurs éléments, à savoir Jusuf Nurkic puis C.J. McCollum. Le premier se fracture le poignet lors de la lourde défaite face à Indiana. L’arrière subit quant à lui une fracture au pied lors de la rencontre face aux Hawks, et est annoncé out pour quatre semaines. Nous reviendrons sur ces absences, mais le coup est rude pour Portland, qui subit dans la foulée un gros revers face aux Spurs.
Les Blazers alternent le bon et le moins bon malgré ces absences, mais les problèmes défensifs restent évidents. La franchise peut se reposer sur une attaque cohérente, et surtout sur son Franchise Player toujours aussi phénoménal. Mais après la gifle reçue face à Milwaukee (106-134), c’est justement Damian Lillard qui tape du poing sur la table.
“Si l’on conserve ce niveau défensif, on n’a aucune chance de remporter le titre.” Damian Lillard
D’accord, personne ne voit les Blazers remporter le titre cette saison, et la fin de la déclaration a de quoi faire sourire. Mais le meneur avait de quoi être excédé, même s’il est le premier concerné par les problématiques de sa franchise. A ce moment, Portland faisait partie des mauvais élèves dans toutes les statistiques défensives, laissant les portes ouvertes à chaque adversaire qui se donnait la peine d’entrer.
Fort face aux faibles, faible face aux forts
Cette claque donnée par Milwaukee aura le mérite de faire réagir Portland. Les largesses défensives sont toujours d’actualité, mais les Blazers l’emportent face à des Wizards au fond du trou, puis contre les Sixers privés de Ben Simmons. Si une défaite face aux Knicks vient ternir le tableau, les hommes de Terry Stotts entament alors une superbe série de six victoires pour faire exploser leur bilan comptable.
Sur le papier, il y a de quoi se réjouir, et Portland mérite les louanges pour cet excellent passage. Dans le contenu, Terry Stotts doit beaucoup à Damian Lillard… Et à Carmelo Anthony. L’ailier devenue remplaçant a enfin accepté son rôle, après discussions avec son Franchise Player et C.J. McCollum notamment. Intéressant en sortie de banc, il apporte évidemment au scoring, et a largement contribué à la bonne série des Blazers. Avec 17.8pts sur cette période dont un joli 44% derrière l’arc, on retient surtout de Melo sa superbe performance face aux Sixers. Dans un match compliqué où Lillard est étouffé dans le money time, le vétéran prend le jeu à son compte et inscrit 17 de ses 24 pts au cours du 4ème quart-temps. “Old School Melo” permet aux Blazers de signer un succès majeur face à une grosse cylindrée, au cœur de ce qui se trouvera être une série de six victoires.
Mais finalement, Philly est de loin la plus forte adversité qu’ont rencontré les Blazers sur cette période. Sans faire offense aux victimes de Portland, les cinq autres franchises battues combinaient alors un bilan de 64-90. D’ailleurs, les joueurs de l’Oregon n’ont pas franchement roulé sur leurs adversaires, comme le regrettera Lillard (voir ci-dessous). Bien sûr, Portand a le mérite d’avoir remporté ces matchs, et enchaîner autant de succès consécutifs n’est jamais aisé en NBA, d’autant plus avec un back-to-back en sortie de victoire face à Philadelphie. Damian Lillard a été énorme sur cette période, avec plus de 32pts et 10 passes de moyenne. Globalement, le meneur est de toute façon sur un nuage depuis le début de saison, et Portland lui doit grandement son bilan actuel.
En sortie de victoires face aux Pelicans, Enes Kanter encense son meneur. Nul besoin de traduire cet extrait.
“He’s playing like a cheat code”
Mais comme le dit Lillard lui-même, la franchise ne fait pas partie des contenders sérieux, du moins en l’état. Le meneur nuançait alors la série de victoires récentes :
“Même lorsque nous gagnons, ce ne sont pas de larges victoires. Ce sont des victoires dans un mouchoir de poche.”
Car dès que l’adversité est d’un niveau plus élevée, Portland n’y arrive plus. Après cette série, les Blazers ont chuté à trois reprises (à l’heure où ces lignes sont écrites, avant de rencontrer les Lakers) face aux Wizards qui reviennent en force, puis face à deux concurrents directs à l’Ouest : Denver puis Phoenix. De quoi faire ressortir les lacunes évidentes de l’effectif, sur le plan défensif avant tout. Bien sûr, les absences de McCollum et surtout de Nurkic de ce côté n’aident pas. L’arrière est capable de faire tourner l’attaque aux côtés ou en l’absence de Lillard, et surtout de scorer de bien des manières. Nurkic, bien que timide en début de saison, commençait à trouver son rythme. Son profil est irremplaçable, en tout cas pas par Enes Kanter qui est une plaie défensivement et qui n’a pas les mêmes capacités balles en main dans un collectif. Harry Giles a globalement déçu sur le plan défensif. D’ailleurs, Portland s’est faite détruire par Jokic face à Denver.
Rester optimistes
Les lignes écrites jusqu’à présent peuvent paraître sévères à l’encontre des Blazers, qui affichent un bilan très positif de 18-13. Surtout dans le contexte évoqué, avec les absences de deux joueurs majeurs, Portland tient bien la barre en cette première moitié de saison.
Mais si l’on peut souvent excuser une mauvaise passe par les blessures ou le contexte, il faut aussi savoir nuancer de bonnes séries. Le jugement que subira la franchise cette saison sera influencé par les attentes placées en elle. Actuellement à la 5ème place de l’Ouest, les Blazers réalisent un bon travail. Cependant, le plus dur reste à venir. La seconde moitié du calendrier a été dévoilée, et l’adversité va se corser pour Terry Stotts et ses joueurs. Portland rencontrera deux fois plusieurs adversaires directs : Utah, leader de l’Ouest, mais aussi les Suns et les Clippers.
Les retours attendus de McCollum et Nurkic seront le vrai révélateur pour Portland. Le pivot pourrait d’ailleurs voir sa période de convalescence écourtée. Avec son trio en bonne santé, la franchise doit finir en bonne position. Mais cela passera par des ajustements défensifs conséquents. Dans le cas contraire, les Blazers risquent de confirmer leur incapacité à gagner contre les grosses équipes.
Terry Stotts évoquait l’absence de Nurkic et les pépins de Covington et Jones Jr comme des explications aux mauvaises performances défensives. En ce qui concerne le pivot, difficile de le contredire. En revanche, les deux ailiers n’ont manqué que très peu de matchs, et Portland reste la 6ème défense la moins efficace à ce jour. Le coach a d’ailleurs été remis en question plusieurs fois cette saison. Lorsque son effectif sera complet (on espère qu’il le sera dans la durée), Stotts sera scruté de très près.
Portland a tout en main pour réaliser une belle saison régulière, hormis la chance de voir son effectif épargné par les blessures. Pour l’instant, les résultats sont au rendez-vous dans l’Oregon, et il sera intéressant de faire un point dans quelques semaines, avec un roster au complet !