Entre les 29 novembre 2019 et 2 avril 2021 @BenjaminForant et @Schoepfer68, accompagnés ponctuellement par d’autres membres de la rédaction, ont dressé le portrait de certains des acteurs méconnus ou sous-estimés de la NBA. Au total, ce sont 63 articles qui vous ont été proposés : un par année, entre les saisons 1950 – 1951 et 2009 – 2010, avec quelques bonus par-ci, par-là.
Pour cette saison 2, Le Magnéto change de format. Si l’idée est toujours de narrer la carrière des joueurs dont on parle finalement trop peu, il ne s’agira plus de traverser de part en part la si vaste histoire de la Grande Ligue. Désormais, chaque portrait sera l’occasion de braquer les projecteurs sur une franchise en particulier, avec l’ambition d’évoquer l’ensemble des équipes ayant un jour évolué en NBA, mais également en ABA.
Replongez avec nous dans ce grand voyage que constitue Le Magnéto. Dans ce 68è épisode, revenons sur les succès des Bullets de Baltimore et de ceux de Wes Unseld.
Carnet de voyage
Il était une fois dans l’Est
Entre l’Illinois et le Maryland, 1961
Une chose est certaine ; celui qui a un jour énoncé que la vie est un long fleuve tranquille n’avait pas connaissance de l’histoire de celle aujourd’hui appelée “Washington Wizards”. La franchise fut créée en 1961 à la suite de la première expansion de l’ère moderne de la Grande Ligue. Toutefois, si vous consultez les détails de la saison 1961-62, inutile de chercher trace de la ville de Washington, voire de celle de Baltimore. En effet, pour sa première saison dans l’élite, la franchise était implantée à Chicago et portait le nom de “Packers”.
Un bilan catastrophique plus tard, malgré l’immense rookie qu’était alors Walt Bellamy (31,6 points, 19 rebonds de moyenne), voici déjà venue l’heure de changer de nom. Exit les Packers, la NBA possède désormais en son sein les Chicago Zephyrs. Cette seconde saison voit l’éclosion d’un second rookie de l’année, en la personne du plus méconnu Terry Dischinger.
Et c’est pas fini, comme dirait l’autre. Dès l’année suivante, l’équipe quitte Chicago et l’Illinois, direction Baltimore et le Maryland. Les Baltimore Bullets sont nés, mais les résultats collectifs ne décollent toujours pas. Sur l’ensemble des 3 saisons, l’équipe, qui a déjà connu trois coachs différents, n’a remporté que 76 matchs pour aucune incursion en playoffs. Pourtant, sur le papier, l’effectif est prometteur. Au-delà des deux All-stars susmentionnés, on y retrouve également Gus Johnson ou encore le tout jeune et prometteur Kevin Loughery.
Il faut attendre 1964 pour voir les Bullets jouer autre chose que le rôle de plante verte de la Ligue. Pourtant, la saison régulière est à nouveau loin d’être prometteuse, avec 37 victoires pour 43 défaites, malgré le renfort de Bailey Howell. Il n’en demeure pas moins que ce bilan permit à la franchise de disputer la première post-season de son histoire. À la clé, une victoire face aux Hawks d’Atlanta (3-1) et une qualification pour les finales de conférence face aux Lakers de Jerry West et Elgin Baylor. En effet, quand bien même la ville de Baltimore a ses fondations dans l’océan Atlantique, l’équipe était alors placée dans la division ouest.
Il s’en suivra une demi-finale de conférence la saison suivante et puis… plus grand chose. Pourtant, avec le second choix de la draft 1967, le front-office ne s’était pas trompé avec la sélection de Earl Monroe, déjà surnommé “la perle”. Las, c’est à la même position que la franchise se présente à la draft suivante. Le premier pick ? Elvin Hayes, l’homme aux 50 000 minutes en NBA (tout rond, pas une de plus, pas une de moins), sélectionné par les Rockets de San Diego et qui n’allait pas trop tarder à rejoindre les Bullets. Le second choix, encore plus peut-être que le premier, sera déterminant pour l’histoire de Baltimore. En effet, encore une fois, les dirigeants eurent le nez creux. C’est ainsi que le 16 octobre 1968, la NBA vit les débuts d’un joueur aussi large que haut : Wes Unseld.
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Pendant ce temps-là, dans le Kentucky
Le bonhomme aux allures de frigo américain vit le jour le 14 mars 1946 à Louisville, ville qui accueillit brièvement une franchise dont nous aurons l’occasion de reparler dans quelques semaines, lors de l’épisode 78 : les Kentucky Colonels.
Il resta dans son fief de naissance jusqu’à sa draft. C’est ainsi qu’il fit les beaux jours de la Seneca High School en remportant deux fois le titre de l’État, avec des performances qui lui ouvrirent les portes de plus de 100 universités. Casanier, il décida de rejoindre les Louisville Cardinals, faculté qui remporta trois fois le titre NCAA dans son histoire.
Cependant, avec Unseld dans leurs rangs, bien installé sous les cercles, les Cardinals ne dépassèrent pas le stade des Sweet Sixteen. Il n’en demeure pas moins que le pivot, dont le numéro 31 allait être retiré à l’issu de son cursus, réalisa une saison freshman absolument historique. Voire lunaire. En 14 rencontres, celui qui est à juste titre surnommé “le chêne” inscrivit 35,8 points et attrapa 23,6 rebonds de moyenne. Pourtant, Unseld est loin d’avoir le physique type du gobeur de ballons de l’époque, du haut de ses 2m01 (soit exactement la taille de Luka Doncic), alors que la concurrence culminait plus souvent qu’à son tour au-dessus des 2m10.
Les trois saisons universitaires suivantes seront moins fabuleuses du pur point de vue des chiffres, surtout au niveau du scoring. Néanmoins, jamais il ne scora moins de 18,7 points sous les couleurs de Louisville. Il quitta sa faculté après un cursus complet, avec des moyennes de 20,6 points et 18,9 rebonds. Il demeure le 2ème rebondeur de l’histoire de l’équipe et le 10è scoreur, tandis que ses 45 points inscrits au cours de sa saison senior contre Georgetown constituent toujours un record.
C’est sur ces bases, exceptionnelles même pour l’époque, qu’il se présenta à la draft 1968. Son influence sur l’équipe allait se faire ressentir dès le 16 octobre.
Coup de foudre à Baltimore
Un ouragan nommé Unseld
Commençons par une question : à combien estimez-vous le nombre de rookies qui réussirent à intégrer la All-NBA 1st team en fin d’exercice ? Évidemment, ils sont peu nombreux. En réalité, il semblerait qu’ils ne soient que 9 : Alex Groza (1950), Bob Pettit (1955), Elgin Baylor (1959), Wilt Chamberlain (1960), Oscar Robertson (1961), Rick Barry (1966), Larry Bird (1980), Tim Duncan (1998). Parmi ces légendes, en 1969, on retrouve ainsi Wes Unseld. Peut-on dire pour autant que sa place y est méritée ? Nous pouvons formuler ici deux réponses : une fondée sur les chiffres, une autre sur l’impression.
Les chiffres sont sans équivoque. Sur cet unique fondement, qui vaut ce qu’il vaut, le cas “Wes Unseld” semble unique. Nous pouvons le démontrer avec le tableau suivant :
S’il était toujours un rebondeur hors pair (seuls Wilt Chamberlain, Bill Russell et Walt Bellamy affichent une meilleure moyenne que lui pour leur saison rookie dans l’histoire), on s’aperçoit qu’à l’inverse de ses 8 camarades, il s’avère être un scoreur seulement moyen. De surcroît, il ne distribuait pas plus de passes décisives que les autres intérieures et son true shooting % n’est pas spécialement élevé. En conséquence, les statistiques ne tendent pas à démontrer pourquoi Wes Unseld se retrouva dans la meilleure équipe de la Ligue en 1969.
Quid de la réponse formulée sur la base de l’impression ? Pour avoir un ressenti le plus fidèle possible, il faut se rappeler qu’à la fin des années 1960, les distinctions individuelles prenaient largement en compte le bilan collectif du joueur et que, très majoritairement, c’étaient les joueurs qui votaient. Or, on constate qu’avant la draft d’Unseld, les Bullets ont terminé leur saison avec 36 victoires pour 46 défaites. Avec le pivot en son sein, Baltimore affiche le meilleur bilan de son histoire et de la Ligue : 57 victoires pour 25 défaites. Pourtant, parmi les 13 joueurs qui composaient le roster, 10 en faisaient encore partie en 1968-69. De la même manière, l’entraîneur se nommait toujours Gene Shue. En somme, cette amélioration substantielle du bilan collectif porte le numéro 41 et s’appelle Wes Unseld.
Poursuivons avec une seconde question, dont la réponse est très certainement plus connue : combien de rookie furent élus Most Valuable Player de la saison ? Si vous êtes un suiveur relativement assidu de la Grande Ligue et de son histoire, vous savez qu’ils ne sont que deux. Le premier est certainement l’athlète le plus fascinant qui ait un jour foulé les parquets de la NBA : Wilt Chamberlain, en 1960. Le second, vous l’aurez compris, est nul autre que Wes Unseld, en 1969. Et it was not even close, comme on pourrait dire à Baltimore : Avec 310 points, Unseld devance très largement son second, Willis Reed (137 points). Ainsi, le pivot demeure encore aujourd’hui le MVP affichant la plus faible moyenne de points de tous les temps : 13,8 / match.
Les raisons de ce succès ? Encore une fois, le bilan collectif des Bullets. Mettons également en exergue l’influence défensive du “chêne”, qui fit de Baltimore la seconde défense du pays, chose qui était loin d’être gagnée la saison précédente.
Il est de coutume aujourd’hui d’employer le terme “historique” à toutes les sauces, et quand bien même cela n’en vaut pas véritablement la peine. Avouons que nous nous sommes nous-même surpris à galvauder ce terme qui ne devrait pourtant pas l’être. Toutefois, pour évoquer la saison rookie de Wes Unseld, difficile de dire autre chose : il s’agit d’un exercice historique. Ce n’est pas Earl Foreman, propriétaire des Bullets en cette époque, qui énoncerait l’inverse :
“Le contrat d’Unseld est le meilleur parmi ceux qui ont été signés cette année”.
Il faut dire que s’il a été drafté par Baltimore, Unseld a également reçu une offre, bien plus lucrative, en provenance des Kentucky Colonels (ABA). Il n’était donc pas certain de voir le joueur poser ses valises dans le Maryland. Quelque chose nous dit que si le pivot avait été encore plus casanier qu’il ne l’était déjà, c’est tout le visage de la franchise qui en aurait été changé.
Nous ne résistons pas à l’envie d’évoquer quelques performances de cette saison rookie. Il faut dire que pour sa première rencontre, il prit la bagatelle de 22 rebonds sur la tronche d’Otto Moore et ses 2m11 sous la toise. Hormis lui, seuls Chamberlain (28 rebonds) et Bill Walton (24) en ont attrapé autant pour leur grand plongeon. Dans le même registre, mentionnons la date du 15 mars 1969, où les Bullets vinrent à bout des Celtics (futurs champion) sur le score de 99-98. En cette soirée, Unseld a attrapé 32 rebonds (son record en carrière) face à Bill Russell, s’il-vous-plaît.
Et pourtant, malgré toutes ces promesses individuelles et collectives, Baltimore va se faire sweeper au premier tour des playoffs face aux Knicks ! Sur la série (4-0), Unseld affiche 18,8 points et autant de rebonds à 52,6 % au tir. Sauf qu’en face, New York possède en son sein Walt Frazier, Willis Reed, Dave DeBusschere ou encore Dick Barnett. La marche était alors indubitablement trop haute pour le duo Unseld / Monroe.
Il n’en demeure pas moins, a posteriori, que cette saison et cette élimination en demi-finale de conférence constituent la première page de l’ère Wes Unseld chez les Bullets. Et n’ayons pas peur des mots : il s’agit de très loin de la plus belle période de l’histoire de la franchise.
Un franchise player atypique
Nous voici en 1969-70. Sur les 10 saisons à venir, les Bullets s’apprêtent à rejoindre les finales NBA à 4 reprises. Bastion quasi imprenable de la conférence est, Baltimore va pourtant terminer la décennie sur une nouvelle déception. En effet, malgré les 50 victoires remportées, la franchise fut à nouveau éliminée en demi-finale de conférence. Le bourreau est à nouveau New York, mais en 7 rencontres cette fois-ci. Notons qu’au game 3, Unseld termine son match avec 23 points, 34 rebonds et 4 passes décisives, toujours face à Willis Reed, MVP en titre et futur MVP des finales. Des 23 / 34 / 4 en playoffs, on n’en retrouve que 6 dans l’Histoire : 3 pour Chamberlain, 2 pour Russell et 1 pour le “chêne”.
N’épiloguons pas plus sur cette saison 1969-70 pour passer directement à la suivante. Celle-ci commença avec une performance loufoque du pivot : 0 points, 12 rebonds et 7 passes décisives, encore une rareté en NBA (6 occurrences). Il faut dire qu’Unseld a alors raté ses 3 tentatives de la rencontre. En cela, le bonhomme nage à nouveau à contre-courant ; rarissimes furent les superstars qui ont accepté un rôle offensif aussi infime. Parmi les MVP de l’histoire, seuls Steve Nash et Bill Russell n’étaient que peu attirés par le scoring. Toutefois, le premier était un distributeur de génie et avait des responsabilités offensives cruciales. Le second, quant à lui, a toujours pris au moins 12,5 tirs par soir lors de ses saisons de MVP. Finalement, peut-être qu’Unseld est en réalité la star la moins offensive que la NBA ait eu l’occasion d’avoir en son sein.
Cela ne l’empêche pas de mettre la balle dans le panier lorsque c’est nécessaire. Ce ne l’est d’ailleurs pas souvent, puisque le roster des Bullets n’est guère avare en talent offensif : Earl Monroe, Jack Marin, Gus Johnson, Kevin Loughery… Cela n’empêcha pas Unseld d’inscrire 27 points et de prendre 22 rebonds lors de la 6è rencontre de cette saison… face aux Bucks du sophomore qu’était alors Kareem Abdul-Jabbar.
Si la production individuelle du pivot est “standard”, avec 16 points et 17 rebonds tous les soirs, la machine Bullets semble s’être enrayée. Cela n’empêcha pas Unseld de célébrer sa seconde sélection au All-star game (après sa saison rookie) et de s’affirmer, dans les faits, comme le franchise player indubitable de l’équipe. Toutefois, pour la première fois depuis sa draft, il doit batailler pour terminer la saison régulière avec un bilan positif : 42 victoires, 40 défaites et notamment 9 défaites sur les 15 dernières rencontres.
Baltimore décrocha tout de même le dernier ticket pour les playoffs. Le premier tour est disputé face aux 76ers de Billy Cunningham, Archie Clark et du vieillissant Hal Greer. Hormis au game 4, où il a rapidement été mis sur la touche en raison d’un nombre conséquent de fautes, Unseld a fait de la mousseline de la raquette Pennsylvanienne : 12,3 points, 18,3 rebonds de moyenne sur l’ensemble des 7 rencontres… pour une qualification à l’arrachée des Bullets.
En finale de conférence, ce sont à nouveau les Knicks qui se dressent sur la route d’Unseld et consorts. Baltimore s’inclina lors des deux premières rencontres mais parvint à recoller à 2-2. En remportant le game 5 si souvent décisif, New York s’offrit 2 balles de finale NBA. C’était sans compter la combativité des hommes du Maryland et l’immense trouade d’un game 7 haletant. Si Unseld réalisa un match plus que correct sans toutefois parvenir à contenir le talent de Willis Reed, celui-ci fut lâché par Frazier et DeBusschere (8 / 26 au tir en cumulé) et c’est bien les Bullets qui se faufilèrent en finale NBA (+ 2).
Ils y retrouvèrent les Bucks d’Abdul-Jabbar et Oscar Robertson. Peu importe l’issue de la série, le champion allait être inédit. Il n’y aura d’ailleurs pas de suspense. Malgré ses 15 points (39 %) et 19 rebonds, le “chêne” et son équipe furent totalement dépassés par les événements. C’est ainsi que Milwaukee remporta le premier titre de son histoire, sans jamais trembler (4-0).
La saison suivante n’offre pas grand chose de croustillant à se mettre sous la dent, si ce n’est une nouvelle sélection au All-star game et une défaite au premier tour des playoffs face aux Knicks. Le front-office profita de l’intersaison pour transférer Jack Marin en direction de Houston, pour attirer le multiple All-star et All-NBAer Elvin Hayes. Les Bullets alignent désormais une raquette composée des deux premiers choix de la draft 1969, qui promet de poursuivre le chantier entamé dans la conférence est.
Une cohabitation fructueuse
Forcément, lorsqu’un monstre débarque chez vous, il est naturel de se faire plus petit. C’est ainsi que les chiffres de Wes Unseld, pour cette saison 1972-73, vont être les plus faibles tant aux points qu’aux rebonds. Il faut dire que désormais, au-delà même de l’arrivée de Hayes, 3 joueurs du roster inscrivent plus de 18 points par soir : Phil Chenier (sélectionné initialement pour le Magnéto du jour), Archie Clark et Mike Riordan.
La saison régulière du “chêne” sera sans grand coup d’éclat. S’il est convié une nouvelle fois au match des étoiles, il n’atteint plus les sommets de la fin de la décennie précédente. Notons toutefois que lorsqu’il avait la bonne idée de gober plus de 20 rebonds, les Bullets gagnaient presque automatiquement : 11 fois sur 13. De surcroît, cette nouvelle saison marque un tournant dans son jeu. S’il était unanimement reconnu comme un rebondeur et un défenseur élite, voici désormais venu “Unseld le passeur”. Il faut dire que cela faisait désormais plusieurs saisons qu’il distillait plus de 3,5 passes décisives tous les soirs aux copains. Ce chiffra monta à 4,4 en cette saison. Il est donc l’un des 6 joueurs de l’Histoire à terminer une saison avec 16 rebonds et près de 4,5 passes décisives.
Il paraît maintenant être le leader défensif de l’équipe (nous pourrions parler de co-franchise player), laissant les rênes offensives au plus doué Hayes. Dans les résultats, cela ne changea toutefois absolument rien puisqu’après une saison régulière réussie, sans être exceptionnelle (52 victoires), Baltimore chuta au premier tour des playoffs face aux Knicks, évidemment.
Cette défaite marqua la fin de l’aventure de la franchise dans le Maryland. En effet, à l’été, les Bullets de Baltimore devinrent (pour une saison) les Capital Bullets, l’équipe ayant déménagé à Washington D.C, avant de devenir, dès 1974, les Washington Bullets. Cet exercice sous le nom des “Capital” n’apporte aucune véritable nouveauté collective, avec, comme dans un mauvais running gag, une défaite au premier tour des playoffs contre New York. Individuellement, Unseld connut la première blessure de sa carrière et vit, en conséquence, son temps de jeu diminuer. Il en va de même de ses responsabilités offensives, qui fondent comme neige sous cagnard : 5,6 tirs / soir pour 5,9 points de moyenne !
La saison 1974-75 apporta – enfin ! – quelque chose de neuf à raconter. Avec désormais Kevin Porter à la mène, les Bullets ont tout pour redevenir un épouvantail de l’est. C’est ainsi que l’équipe démarra la saison tel un bulldozer sous stéroïdes, avec 11 victoires en 13 rencontres. S’il est toujours réglé comme du papier à musique lorsqu’il s’agit de cueillir les ballons sous les cercles, Unseld fait le yoyo au scoring, sans que cela n’impacte les résultats des siens. Il distribue toujours autant le ballon et il est désormais fréquent de le voir offrir 7 à 8 passes décisives certains soirs.
Lorsqu’arrive le All-star game (le dernier de sa carrière), il inscrit 10 points, prend 15 rebonds et donne 4,2 passes décisives par match. Les Bullets, eux, ont remporté 28 de leur 40 rencontres et semblent lancés pour établir un nouveau record de franchise. Si son apport statistique chuta en fin de saison (6,7 points de moyenne sur les 15 derniers matchs), il n’en demeure pas moins que Washington remporta 60 matchs et s’avance à nouveau comme un sérieux prétendant aux finales NBA. Notez que s’il a su se faire discret sur la feuille de match, Unseld présente un defensive rating de 88. Autrement dit, lorsqu’il était sur le terrain, son équipe n’encaissait que 88 points pour 100 possessions. Seul… Elvin Hayes possède un chiffre moindre dans toute la Ligue (87,6). Et pourtant, jamais le “chêne” ne sera nommé dans une All defensive team, ce qui constitue une véritable anomalie.
En playoffs, Washington croisa d’abord le fer avec les Braves de Buffalo et leur superstar Bob McAdoo, MVP en titre et double meilleur scoreur de la Ligue. D’ailleurs, McAdoo fit la chanson aux intérieurs des Bullets pendant les 7 rencontres de la série : 37,4 points de moyenne. Son game 4, remporté par les siens (pour mener 3-1), est un véritable chef d’œuvre : 50 points, 21 rebonds à 62,5 % au tir. Dites vous que seul Chamberlain (et que 3 fois !) et Elgin Baylor ont un jour claqué un 50 / 21 en playoffs.
Et pourtant, bien que dominés sous les cercles, c’est bien Unseld et Hayes qui se qualifièrent pour le tour suivant, face aux Celtics de Dave Cowens et John Havlicek. En 6 rencontres et tandis que son numéro 41 avala 100 rebonds au total, les Bullets rejoignirent les finales NBA pour la seconde fois de leur Histoire… pour le même résultat : un sweep face aux Warriors de Rick Barry. Pourtant, cette-fois ci, il ne s’agit pas d’un sweep sans contestation possible. Golden State remporta deux rencontres à l’arrachée (+ 1) et jamais un match ne s’est clos avec plus de 8 points d’écart.
Unseld a désormais 29 ans, pour deux défaites en finale au compteur. S’il commence à sauter moins haut et voit son temps de jeu diminuer petit à petit, il reste le chef charismatique et défensif de son équipe (rappelons, en effet, qu’Elvin Hayes avait la réputation d’être particulièrement difficile à supporter dans un vestiaire, malgré tout son talent). Dès lors, opérons un rapide saut dans le temps, pour arriver à l’aube de la saison 1977-78.
Le roster des Wizards est alors composé d’un quatuor : Phil Chenier au poste 2, Bob Dandridge sur les ailes avec Elvin Hayes et Wes Unseld sous les cercles. En saison régulière, cela ne donna… pas grand chose ? 44 petites victoires et peu de certitudes, dirons-nous. Il faut dire que trois des joueurs susmentionnés ont désormais dépassé la trentaine et leur prime paraît être loin derrière eux (d’autant plus que, vous l’aurez remarqué, le prime d’Unseld fut finalement… sa première saison. Idem pour Hayes). Et c’est là, alors qu’on ne les attendait plus forcément, que les Bullets vont enfiler leur costume de super-héros.
Atlanta est sweepé au premier tour (2-0), notamment grâce aux 41 points de l’anonyme Kevin Grevey lors de la seconde rencontre. Unseld, dans son rythme de croisière, attrapa 15 rebonds lors de chaque match. En demi de conférence, il s’agit de se confronter aux Spurs de George Gervin. Grâce à un roster plus homogène et à un Elvin Hayes en grande forme, les Bullets s’imposèrent en 6 rencontres, alors que le “chêne” fut loin de réaliser sa meilleure série de playoffs. Peu importe, finalement. Voici désormais venus les 76ers de Philadelphia, qui possèdent dans leur rang Julius Erving, Doug Collins, World B. Free et George McGinnis, excusez du peu. L’armada des 76ers n’y fit rien et, sur le même score (4-2), c’est Washington qui rallie, une nouvelle fois, les finales NBA. Toujours aussi peu scoreur, Unseld fut déterminant de son propre côté du terrain. Comme si Claude François avait écrit “Comme d’habitude” en pensant au numéro 41 de la capitale.
Pour – enfin ! – remporter ne serait-ce qu’un match en finale NBA, il va falloir venir à bout des Supersonics de Seattle, composés de Dennis Johnson, Jack Sikma (rookie) et Fred Brown. Après une défaite inaugurale, c’est chose faite. Au finale, en 7 rencontres souvent serrées (sauf le game 6, remporté par Washington + 35), ce sont… les Bullets qui soulevèrent le Larry O’Brien trophy !
Et devinez qui fut élu MVP des finales ? Nul autre que Wes Unseld. Sur le papier, pourtant, cela prête à discussion. Avec 9 points, 11,7 rebonds et 4 passes décisives, le “chêne” semble effectivement avoir largement moins contribué à la victoire des siens qu’Elvin Hayes, meilleur scoreur et rebondeur de son équipe. Toutefois, Hayes fut éjecté de la 7è et dernière rencontre en raison de son comportement. De surcroît, comme nous l’avons déjà mentionné, l’influence d’Unseld sur son équipe ne se voit pas dans les chiffres, à l’instar d’un Dennis Rodman dans ses grandes œuvres. Général en chef des siens sur le parquet et ayant toujours une attitude irréprochable, contrairement à son compère de draft, Wes Unseld entra donc dans la caste des MVP et MVP des finales par la porte dérobée. Si l’on regarde son profil, il constitue encore une fois une anomalie dans ce groupe… comme s’il ne décrochait ses plus grands succès qu’en prenant à contre-pied les standards établis de la NBA.
Washington ira à nouveau en finale NBA la saison suivante, pour une revanche face aux Sonics. Toutefois, une fois n’est pas coutume, après avoir remporté le premier match, Washington s’inclina lors des 4 suivants pour sceller la 3ème défaite en finale NBA de Wes Unseld.
Dans son style si caractéristique, celui-ci joua encore 2 saisons sous le maillot des Bullets, pour prendre sa retraite à l’issue de la saison 1980-81. Trop souvent oublié lorsqu’il s’agit d’établir un classement des meilleurs pivots de tous les temps, notamment en raison de son apport offensif très limité et d’une influence qui ne se traduit pas en chiffres, Wes Unseld est un OVNI de l’histoire de la Grande Ligue. Dans celle des Bullets – devenus Wizards en 1997 -, il est par contre une légende.
La place au box-office des Bullets / Wizards
Si l’on excepte les franchises de ABA que nous traiteront à l’avenir, rares seront les cas où nous dresserons le portrait d’un joueur pouvant légitimement être considéré comme le meilleur de sa franchise. En effet, les joueurs de cette trempe sont souvent connus et reconnus et bien loin de l’esprit du Magnéto. À notre sens, ce n’est pas le cas d’Unseld. Pourtant, le tableau ci-dessous le démontre avec acuité, son influence sur l’histoire des Bullets est incomparable :
Ajoutez à cela un titre de MVP (le seul remporté par un joueur des Bullets / Wizards), un MVP des finales (idem, forcément) et surtout une bague, l’unique de la franchise à ce jour. Dès lors, quand bien même Elvin Hayes fut statistiquement bien plus impactant sous le maillot de la capitale, quand bien même la légitimité de ce titre de MVP est susceptible d’être débattue, personne n’atteint la cheville de Wes Unseld dans le microcosme de la franchise actuelle de Bradley Beal.
Quelque chose nous dit d’ailleurs qu’il risque de demeurer la figure numéro 1 de la franchise pendant des décennies encore. Peut-être est-il même à jamais intouchable. Yes Unseld.
Les précédents épisodes et portraits du Magnéto :
- Saison 1 : l’intégralité des articles ;
- Saison 2 : Dave Cowens (Boston Celtics), Buck Williams (Brooklyn Nets), John Starks (New-York Knicks), Maurice Cheeks (Philadelphia 76ers).