Depuis 1946 et la création de la National Basketball Association, quelque cinq mille joueurs ont foulé les parquets de la Grande Ligue. Certains d’entre eux ont laissé une empreinte indélébile qui ne sera jamais oubliée. D’autres sont restés bien plus anonymes. Entre les deux ? Des centaines de joueurs, qui ont tour à tour affiché un niveau de jeu exceptionnel, mais dont on oublie bien souvent la carrière.
Dès lors, @BenjaminForant et @Schoepfer68 ont décidé de dresser – littéralement – le portrait de certains de ces acteurs méconnus ou sous-estimés. Au total, ce sont 60 articles qui vous seront proposés : un par année, entre les saisons 1950 – 1951 et 2009 – 2010. Pour chaque saison, un joueur a été sélectionné comme étendard, parfois en raison d’une saison particulièrement réussie, d’une rencontre extraordinaire ou encore d’une action historique …
Chaque portrait s’inscrira dans une volonté, celle de traverser l’Histoire de la NBA de manière cohérente. Ainsi, ces portraits (hebdomadaires) seront publiés dans un ordre précis : un meneur, un arrière, un ailier, un ailier-fort, un pivot. Au bout de cinq semaines, c’est donc un cinq majeur qui sera constitué. Les plus matheux d’entre vous l’aurons compris : au final, ce seront douze équipes, toutes composées de joueurs ayant évolué au cours de décennies distinctes, qui auront été composées.
A vous de déterminer lequel de ces cinq majeurs sera le plus fort, le plus complémentaire, le plus dynastique.
Vous trouverez en fin d’article les liens vous permettant de (re)consulter les articles précédents.
La jaquette
Pour chaque article, @t7gfx vous proposera ses créations. Vous y retrouverez une illustration du joueur présenté (en tête d’article) ainsi une présentation de chaque cinq majeur projeté (chacun avec une identité visuelle propre).
Le synopsis
Lors de ces 28 premiers articles du Magnéto, nous avons abordé toutes sortes de profils. De la légende des années 50 au What-If des 90’s, en passant par le lieutenant de la décennie 1970, tout y est passé. Seulement, un aspect du basketball nord-américain n’a, pour l’heure, pas été mentionné.
En effet, entre les années 1968 et 1976, la NBA n’était pas la seule reine de balle orange du pays. A côté du mastodonte que devient la National Basketball Association, une ligue, plus petite, voit le jour : la ABA. Pendant une bonne partie des années 70, de nombreux monstres ne rejoindront pas l’institution que nous connaissons aujourd’hui et offriront leurs talents aux franchises de la ligue concurrente. C’est le cas notamment de Rick Barry, Moses Malone, Julius Erving, David Thompson ou George Gervin. C’est également le cas de Dan Issel.
Daniel Paul Issel est un ailier fort, pouvant de temps à autre dépanner au poste de pivot, qui naquit dans l’Illinois, le 25 octobre 1948. Mesurant plus de 205cm et remuant une carcasse de plus de 105kg, celui que l’on surnommera Horse entre parfaitement dans les codes physiques de son poste.
A la suite d’une carrière universitaire plus que convaincante du côté des Wildcats de Kentucky (plus de 25 points de moyenne sur les 4 saisons passées lui ayant permis de décrocher le titre de Consensus All Américain lors de deux saisons), Issel est promis à un grand avenir au sein d’une des ligues majeures du pays. En effet, certaines de ses performances ont fait du bruit : le 7 février 1970 par exemple, lors de la dernière saison de son cursus, il inscrira 53 points lors d’une large victoire face aux Rebels d’Ole Miss, université située dans le Mississippi. Cette performance reste encore, à l’heure actuelle, comme le plus gros carton individuel de l’Histoire de l’université.
Issel s’inscrit donc à la draft 1970 en ayant pour objectif final d’intégrer la NBA. Mais comme bien souvent, si ce n’est pas toujours, rien ne se passera comme prévu.
Action !
Lorsque nous évoquons les plus grandes drafts de l’histoire, les cuvées 1996, 2003 et 1984 sont forcément les premières à apparaître dans nos esprits. Néanmoins, il serait malvenue de sous-estimer la sélection de 1970. Entre Pete Maravich, Dave Cowens, Bob Lanier, Nate Archibald ou Calvin Murphy, celle qui sera la 24è édition peut aisément se placer dans un top 10 des meilleures drafts de tous les temps.
Dan Issel, alors âgé de 22 ans, n’est pas un prospect attendu, malgré ses excellentes performances universitaires. Il sera sélectionné en toute fin de soirée, en 122è position par les Pistons de Detroit. Cependant, il ne posera jamais les pieds dans le Michigan. En effet, alors qu’il aurait pu former une raquette exceptionnelle avec Bob Lanier, l’ailier fort rookie, qui souhaite avant tout du temps de jeu, est obligé d’aller voir ailleurs. Il semble en effet qu’on ne lui offrira pas sa chance à Détroit.
Dès lors, il retourne dans le Kentucky et signe un beau contrat (pour un rookie) avec les Kentucky Colonels, franchise créée quatre ans auparavant lors du lancement de la nouvelle ligue qui fait sensation outre-Atlantique : la ABA. Depuis maintenant plusieurs saisons, cette “association” propose une forte concurrence à la NBA, en proposant des contrats bien plus intéressants aux différents joueurs afin qu’ils rejoignent leurs rangs. Rick Barry, pourtant exceptionnel en NBA, a ainsi fait le choix de rejoindre la Ligue voisine, signant à l’occasion ce qui était alors le contrat le plus juteux de l’histoire.
A l’aube de la saison 1970-1971, la ABA compte 11 franchises, parmi lesquelles on retrouve les Pacers d’Indiana, les Nets de New Yorks ou les Rockets de Denver, qui deviendront quelques années plus tard les Nuggets.
Issel, revanchard de ne pas avoir pu prouver sa valeur en NBA, va passer sa frustration sur ses adversaires. Et cela dès sa saison rookie.
Son premier pas sur les parquets professionnels aura lieu le 15 octobre 1970, face aux Pacers d’Indiana. Dans une très lourde défaite (-32), il inscrit néanmoins 15 points. Cette belle entrée en matière lui permet de se mettre dans de formidables dispositions pour la suite de la saison. Et attention, spoiler, ça pique les yeux. Sur les deux rencontres suivantes, Issel monte en puissance : 25 points – 8 rebonds, puis 30 points. Dès le quatrième match de la saison, le Horse explose les compteurs : 43 points lors d’une défaite de 5 points face aux Floridians.
Il enchaînera les excellentes performances. Contrairement à des dizaines et des dizaines d’autres jeunes joueurs, il ne connaîtra pas le fameux rookie wall, cette période au cours de laquelle les débutants, bien que talentueux, butent sur leur manque d’expérience. Sur toute sa première saison professionnelle, il marquera seulement 12 fois moins de 20 points.
Mieux que ne pas faiblir, l’ailier-fort réitéra même ses excellentes performances du début de saison : en témoignent ses 45 points et 23 rebonds du 13 décembre 1970, dans une défaite face à Pittsburgh. Le jersey 44 de Louisville inscrira à 11 reprises plus de 40 points lors de cet exercice, dont deux fois plus de 50. Époustouflant pour un joueur qui, rappelons-le, a été sélectionné au 8è tour de la draft NBA.
Voici donc, en vrac, quelques une de ses plus belles lignes statistiques :
- 02 janvier 1971 vs Indiana : 44 points dans une défaite (-2),
- 07 février 1971 vs Utah : 48 points dans une victoire (+12),
- 28 mars 1971 vs Carolina : 51 points dans une défaite (-6),
- 30 mars 1971 @ Pittsburgh : 51 dans une défaite (-17).
Le moins que l’on puisse dire, c’est que la ABA s’est vue dans l’obligation de déclarer un avis de tempête, et que celle-ci portait le nom “Issel”. Surtout que les apparences sont trompeuses : la saison collective des Colonels est plutôt bonne. La franchise finit la régulière avec un bilan de 44 victoires pour 40 défaites, s’emparant la seconde place de la division Est par la même occasion.
D’un point de vue individuel, aucun suspens : la saison d’Issel fût tout bonnement exceptionnelle : 29,9 points, 13,2 rebonds, plus de 2 passes de moyenne un peu plus de 39 minutes/match. Si elle avait été disputée en NBA, cette saison aurait un solide dossier pour être considérée comme le meilleur exercice rookie jamais vu. Le joueur est nommé co-rookie de l’année, meilleur scoreur de la saison et auréolé d’une place au sein de la All Second ABA Team. Il a bien évidemment également été convié au All-star Game, comme lors de toutes ses futures saisons ABA.
Premier exercice professionnel pour notre sujet du jour, et premières joutes printanières. Et comme pour son arrivée en ABA quelques mois auparavant, Danny ne manquera pas le coche.
Les demi-finales de divisions verront s’affronter les Colonels et les Floridians. Issel se met rapidement en jambe, en inscrivant 26 points lors des deux premières rencontres, soldées par autant de victoires. Une petite baisse de régime lors des rencontres suivantes permet aux pensionnaires de Miami de revenir à hauteur, avant de voir Kentucky reprendre les devant, grâce notamment aux 27 points et 11 rebonds d’Issel lors du game 6 (+9).
Les finales de division finiront sur le même score que le tour précédent : 4-2 pour la franchise de Louisville. Cependant, cette fois-ci, Issel avait un message à faire passer à la Ligue et plus particulièrement aux Squires de Virginia. En effet, comme nous avons eu l’occasion de le dire, l’ailier fort a été nommé co-rookie de l’année. Le second nommé est Charlie Scott, arrière des Squires tournant à plus de 27 points/match lors de cet exercice.
Le Colonel est revanchard, et cela se ressent dès la première rencontre, terminée avec 46 points sur la tête des intérieurs adverses, et la victoire au bout. L’opposition entre les deux rookies est exceptionnelle : les rencontres à plus de 30 points pleuvent. Scott finira la série en scorant 28 points de moyenne, alors qu’Issel en inscrira lui plus de 33. Le duel individuel est remporté par l’ailier fort, tout comme l’affrontement collectif.
Le rookie dispute alors ses premières finales ABA après moins de 100 matchs dans le monde professionnel. Ils tombent nez à nez avec les Stars d’Utah, mené par un Zelmo Beaty en état de grâce. Les Finals sont accrochées. Dan inscrira à deux reprises plus de 40 points, dont un pic à 41 points dans le game 7 décisif. Malheureusement, les 36 points de Beaty font la différence et les Colonels doivent s’incliner de 10 points. Kentucky et son franchise player rookie doivent laisser filer le titre.
Issel est dépité. Mais son jeune âge laisse présager les plus belles choses pour l’avenir. Tous les regards sont donc tournés vers octobre 1971, et le début de sa saison sophomore.
L’oscar de la saison 1971 – 1972
Initialement, nous aurions dû parler de Dan Issel il y a quelques semaines. A la place, nous avions évoqué la carrière du très méconnu Gus Johnson. Néanmoins, rares sont les joueurs aussi forts que lui et dont on parle aussi peu. Dès lors, saisissant l’occasion de parler – pour une fois – de la ABA, nous avons finalement décidé de nous concentrer sur la saison 1971 – 1972, qui est très supérieure à l’immense majorité des 28 exercices dont nous avons parlés depuis le premier épisode.
L’arrivée brutale de Dan Issel au sein de la ABA a redistribué les cartes d’outsiders. En effet, il a, en quelques mois, placé les Colonels dans la catégorie des équipes dont il convient de se méfier. De plus, la courte défaite en finale créée, encore, un sentiment de revanche. La question que tout le monde se pose est alors de savoir si The Horse va réussir à faire aussi bien que lors de son exercice rookie. La question est vite répondue.
Dès le premier match de la saison, le 16 octobre 1971, Issel remet les pendules à l’heure et rappelle qui est le patron de la ligue : 26 points – 14 rebonds dans une victoire à New York (+9). Il continuera sur sa lancée en faisant, comme lors de sa première saison, un carton lors du 4è match de l’exercice : 44 points (à 60% au tir) et 9 rebonds dans une victoire face aux Floridians (+6).
La saison commence sur les chapeaux de roues. Après quelques rencontres de rodage, Kentucky passe la seconde vitesse, puis la troisième et la quatrième. Après la défaite du 31 octobre face aux Nets, au cours de laquelle Dan inscrira néanmoins 42 points, les Colonels réaliseront tout au long de la saison des incroyables séries de victoires, toutes faisant preuve d’une incroyable domination sans partage sur la division Est : 6 victoires consécutives, puis 4, puis de nouveau 6, puis 10 etc.. et ce jusqu’à la fin de la régulière.
Il faut dire qu’un ajout de taille à intégrer la franchise de Louisville quelques semaines auparavant : Artis Gilmore, future légende des Bulls est venu former avec Issel une jeune raquette incroyablement complexe à manœuvrer.
Dan Issel domine outrageusement la ligue. Il enchaîne les rencontres à plus de 30 points inscrits, cumulant cela avec des dizaines de rebonds gobés, malgré le fait que le meilleur rebondeur de la Ligue … se trouve dans sa propre raquette. Doté d’un tir mi-distance faisant des ravages, il dominait également dans la peinture grâce à un jeu tout en finesse et à un footwork qu’Hakeem Olajuwon ne renierait pas. Capable de s’appuyer sur son physique quand il est dos au panier pour profiter d’une mismatch, il semble être un prototype de l’intérieur moderne :
Seul petit attirail qui manque à son jeu : il n’est pas franchement passeur. Pourtant, vu son QI Basket hors norme, il aurait surement pu, dans une ère plus contemporaine, distribuer plus de caviars aux coéquipiers. Ce n’était toutefois pas le rôle des intérieurs à cette époque, où seul Wilt Chamberlain pouvait se muer au serial-passeur.
Revenons-en à cet exercice 1971 – 1972 et aux performances de mastodontes du numéro 44 des Colonels : sur toute la saison, celui qui est désormais en course pour le titre de MVP ne descendra qu’à 4 reprises sous les 20 points. Le joueur réalisera des séries exceptionnelles au scoring, inscrivant notamment 30 points au minimum sur 10 des 11 rencontres se déroulant entre le 04 février et le 20 février 1972 (seule une petite performance en 28-18 est à signaler). Ce type de série fait maintenant partie du quotidien du joueur. Voici les meilleures d’entre elles sur la saison régulière :
- 08 décembre 1971 @ Carolina : 41 points dans une victoire (+10),
- 23 décembre 1971 @ Virginia : 44 points dans une victoire (+16),
- 30 décembre 1971 @ Floridians : 42 points, 13 rebonds et 4 passes dans une victoire (+23),
- 16 février 1972 vs Pittsburgh : 37 points à 67%, 14 rebonds et 2 passes dans une victoire (+24),
- 05 mars 1972 vs Pittsburgh : 39 points à 55% au shoot, 20 rebonds et 2 passes dans une victoire (+10).
Ces statistiques confirment l’impression initiale : la saison fantastique d’Issel et des Colonels d’un point de vue individuel ou collectif. Kentucky finira la saison avec un bilan exceptionnel : 68 victoires pour 16 défaites, soit un 81% de rencontres remportées. Solides. The Horse, quant à lui, améliorera sa ligne statistique personnelle, pourtant bien fournit lors de son premier exercice, en tournant alors en 30,6 – 11,2 – 2,3.
Avec de tels résultats, il peut alors légitiment prétendre à plusieurs titres : l’étoile d’All-star, qu’il obtiendra fort logiquement, la place au sein de la All ABA First Team, qu’il intégrera aux côtés de son coéquipier Gilmore, de Rick Barry, Donnie Freeman et Bill Melchionni.
Il peut également aspiré à des plus grandes prétentions. Tout d’abord, il est candidat au titre de meilleur scoreur, qu’il ratera de peu, doublé par son rival de Charlie Scott (qui tourne alors à une moyenne de 34,6 points). Il n’obtiendra donc pas ce titre pour une deuxième saison consécutive.
Enfin, et c’est surement le plus important, avec de telles statistiques et un tel bilan, il est un candidat tout naturel pour le titre de MVP. Néanmoins, il ne sera pas sacré, battu par…Artis Gilmore, son coéquipier rookie. Il faut dire que le 23 points, 17 rebonds et 5 contres le pivot a marqué les esprits, d’autant plus que son arrivé dans le Kentucky a fait exploser le bilan collectif de la franchise.
Toutefois, lequel des deux intérieurs méritait réellement le titre de MVP ? On vous laisse libre de faire votre choix.
Quoi qu’il en soit, les Colonels se présentent remplis de certitudes en playoffs. Un rookie auréolé d’un titre de MVP, qui forme un one-to-punch de folie avec son ailier fort tournant à plus de 30 points de moyenne, un meneur remplissant parfaitement son rôle de scoreur d’appoint et distributeur (Louis Dampier tourne alors en 16-6), tout semble réunit pour écraser sur la concurrence.
Face aux Nets menés par un duo Barry – Melchionni, Kentucky sera réellement mis en difficulté. Les Colonels tombent face à un mur, leurs faisant perdre leurs deux premières rencontres assez largement (-14 et -15). Issel n’est pas au niveau. Du moins pas à SON niveau. Pour tout joueur, scoré 26, puis 22 points en post-season est une performance considérable, mais ce n’est pas suffisant pour Danny. Mais, plus la série avance, plus The Horse est en difficulté : la victoire dans le game 3 porte le sceau du au double-double-double de Gilmore (25-22), alors que l’ailier-fort reste loin de ses standards (19 points inscrits).
La 4è rencontre le voit revenir à son réel niveau. 28 points et 12 rebonds en 48 minutes, qui se solderont malheureusement par une défaite. Il faut dire qu’en face, Rick Barry a littéralement prit feu, réduisant les deux légendes de Kentucky au rang de joueurs de secondes zones.
Cette défaite est un coup dur pour les Colonels. Malgré un sursaut d’orgueil lors de la cinquième rencontre, les favoris au titre ABA sortent par la petite porte lors d’une ultime rencontre où Issel n’aura marqué que 13 petits points.
Cette équipe était programmée pour le titre. Il n’en fût rien. Les joueurs sont encore jeunes et pensent avoir toute une carrière pour atteindre le graal. Mais ils ne se doutent pas qu’un danger se rapproche non pas d’eux, mais de la ABA, dont la fin de vie approche à grand pas.
Le générique de fin
Dans la première moitié des 70’s, comme vous avez pu le lire quelques lignes plus haut, le roster des Colonels était assez exceptionnel. La franchise compte donc capitaliser sur cet effectif pour réaliser un coup et, enfin, accrocher une bannière de champion au plafond.
La régulière 1972 – 1973 fut légèrement moins bonne que la précédente. Issel ne scorera “que” 27 points de moyenne, et Kentucky ne remportera “que” 66% de ses rencontres, terminant second de sa division. Issel, lui, réalisa de nombreux gros matchs, multipliant les rencontres à plus ou moins 30 points et 15 rebonds. Le fait marquant de cet exercice restera le 44 – 18 déposé sur la tête de Charlie Scott et des Squires le 09 janvier 1973. Il obtiendra une nouvelle sélection au sein de la All ABA Second Team, la seconde en trois saisons au plus haut niveau.
Dan a faim. Il le fait sentir dès les premiers instants où il pose un pied en playoffs : 43 points, toujours contre Virginia. Cette performance pose le décors. La post-season de l’ailier-fort sera tout bonnement incroyable ; il y inscrira 30 points ou plus à 9 reprises en 19 rencontres. En éliminant consécutivement les Squires et les Cougars de Carolina, les Colonels compostent un nouveau ticket pour les ABA Finals.
L’histoire est un éternel recommencement. Nouvelle défaite en 7 matchs, cette fois-ci face aux Pacers d’Indiana de Gus Johnson et surtout de Georges McGinnis.
La saison suivante sera semblable aux précédentes, avec une très bonne saison régulière (53 victoires), des statistiques individuelles de superstars (plus de 25 points et 10 rebonds de moyenne), mais toujours un blocage psychologique lorsque la post-season arrive. Cette fois-ci, se seront les Nets de Julius Erving, futurs champion, qui sweeperont violemment Gilmore, Issel et leur troupe.
Pour The Horse, ça fait beaucoup. Lassé de perdre, il cherche des solutions pour passer le cap qui les feraient basculer dans l’autre dimension : celle des champions.
Ce déclic, la franchise le trouvera. A l’aube de l’exercice 1974 – 1975, Issel a alors 26 ans et est alors en pleine force de l’âge. Il comprend que le salut de son équipe passe obligatoirement par un changement de statut : de franchise player, il doit devenir lieutenant de luxe, laissant la place d’arme principale à Artis Gilmore. Il passe alors de 25 points de moyenne à 17,7, et prend pour la première fois de sa carrière moins de 10 rebonds par match. La franchise joue donc avec un franchise player, Gilmore et deux lieutenants de choix, Issel et Lampier.
La sauce semble prendre. les Colonels termineront premier de leur division. La baisse de responsabilités offensives de l’ailier fort ne l’empêche pas, de temps à autres, de réaliser de gros cartons, comme au bon vieux temps. Ce ne sont pas les Nets qui viendront soutenir l’inverse : 38 points et 10 rebonds (+31).
Kentucky est en mission et rien n’arrêtera la franchise. Memphis puis Saint-Louis se feront gentiment balayés. Pour la troisième fois en cinq ans, les Colonels se retrouvent en finale ABA. Jamais deux sans trois ? Que nenni. Cette fois-ci sera la bonne. Issel, en bon lieutenant, soutiendra Gilmore de tout son talent, permettant aux siens d’enfin remporter le titre. Sa finale est cependant plus que correcte : 21,6 points et 12 rebonds de moyenne.
Dan Issel est enfin champion. Après quatre saisons de désillusion, il est désormais au firmament collectif.
Tout comme sa grande sœur, la ABA reste un business. Que la franchise soit insatisfaite du travail du joueur ou que le front office souhaite renouveler l’effectif, aucun joueur n’est à l’abri d’un transfert. Dan Issel l’apprendra à ses dépends, en étant tradé à Baltimore, avant d’être envoyé dans la foulée à Denver, qui évoluait également en ABA à cette époque.
Au sein d’un effectif de haute volée comprenant, entre autres David Thompson et Ralph Simpson, Issel retrouve une place qu’il connait bien, et qu’il apprécie : celle de lieutenant. Après une baisse statistique en 1974-1975, récompensée par un titre ABA, il redépasse la barre des 20 points de moyenne, inscrivant alors plus de 23 points tous les soirs. Sans oublier les 11 rebonds qu’il prend également l’habitude d’attraper.
Même si le Horse sur-dominant de 1971 et 1972 n’existe plus, le joueur peut, sur un coup de sabot, facilement dépasser la quarantaine de pions. Et ce fût le cas à trois reprises lors de cet exercice 1976 (41, 42 puis 44 points).
Entre les 23 points de moyenne d’Issel, les 26 de Thompson et les 18 points – 7 passes de Simpson, la machine Denver est lancée. La franchise des Rocheuses termina 1ère de sa division, plaçant Simpson dans la All ABA First Team et ses deux compères dans la Second Team.
Après avoir éliminé en sept rencontres ses anciens coéquipiers de Kentucky, Issel et tout le Colorado retrouvent les Nets d’Erving en finales. Malgré les 30 points du cheval lors du game 6 décisif, Dr J et ses 31 points – 19 rebonds envoient les Nuggets en vacances, sans bague au doigt.
Issel vient alors de perdre sa troisième finale en 6 années au sein de la ABA. Sans sa magnifique bague de 1975, le joueur aurait un abonnement premium au club de la Fédération Américaine de la lose.
Pour d’autres raisons, cette saison 1975 – 1976 est historique. En effet, après de dures négociations entre les deux ligues, La ABA fusionnera avec la NBA et est donc vouée à disparaître. Dan Issel en est donc, à tout jamais, le second meilleur scoreur et le sixième meilleur rebondeur. Rappelons qu’il a été drafté en 122è position. C’est donc cela, un steal.
Quatre franchises vont alors faire le trajet entre les deux Ligues : Indianapolis et ses Pacers, San Antonio et ses Spurs, New York et ses Nets et, bien sûr, Denver et ses Nuggets.
Après une longue période loin de son rêve, Issel va enfin pouvoir goûter à la NBA. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que les Nuggets vont faire une entrer fracassante dans celle que l’on surnomme désormais “la Grande Ligue” : 22,3 points, 8 rebonds, 50 victoires, et une première place au sein de la Midwest Division.
Lors de cette saison, nous nous rapprochons du prime de Thompson, qui est alors l’un des meilleurs joueurs de la Ligue. Mais cette réussite collective n’existerait pas sans Issel, qui, en temps que joueur expérimenté, sait faire le liant sur le terrain entre tous ses coéquipiers. Il sera alors All-star pour la dernière fois de sa carrière.
Auréolé de leur titre de champion de division, les Nuggets entrent en post-season lors des demi-finales de Conférence, après avoir été exempts au premier tour. Et comme souvent, Issel tombe sur plus fort que lui. Cette fois-ci, c’est un Bill Walton en mission qui stoppe les ardeurs de celui qui joue maintenant pivot.
Danny a encore de beaux jours devant lui. Alors âgé de 29 ans, son objectif est clair : une seconde bague dans la seconde Ligue. Mais les années commencent à se ressembler et les éliminations en playoffs se succèdent, comme celle concédée face aux Sonics (4 – 2) en finale de conférence. De leur histoire en NBA, jamais les Nuggets ne dépasseront ce stade de la compétition.
Rebelote la saison suivante. Le pivot passe pour la seconde fois de sa carrière sous la vingtaine de points par rencontre et l’ex-franchise ABA doit alors jouer un first round de playoffs pour la première fois depuis son arrivée en NBA. Ils tombent alors sur les Lakers d’un certain Abdul-Jabbar. Après Bill Walton deux années plus tôt, Issel se retrouve avec KAJ en confrontation directe. Malgré un excellent game 1 où le pivot inscrit 30 points, gobe 10 rebonds et distribue 4 passes (avec une victoire de 5 points au bout), sa franchise pliera face au meilleur scoreur de l’Histoire (32 – 12 lors du game 2, puis 29 points, 16 rebonds, 8 passes décisives et 6 contres lors du game 3).
L’effectif commence à s’essouffler, Denver n’est plus aussi croustillant qu’il y a quelques années. S’en suivent deux exercices compliqués, soldés sans participation aux playoffs. Issel fera ses statistiques (23, puis 21 points de moyenne) mais le bilan collectif n’est plus suffisant.Ces deux saisons seront les seules sans post-season de sa longue carrière.
Pour relancer la machine, il fallait de la fraîcheur. Et qui de mieux qu’Alex English et Kiki Vandeweghe pour accompagner nos deux compères de Denver dans cette nouvelle tentative d’accrocher les playoffs.
Entre 1982 et 1990, Denver jouera tous les jouera chaque année, sans jamais pouvoir réellement prétendre au titre. L’effectif est solide, mais pèse peu face aux armadas que représentaient les C’s, les Lakers ou les 76ers.
Issel est désormais au crépuscule de sa carrière. Il jouera encore trois saisons à haut niveau, distillant toute son expérience à ses nouveaux partenaires. Ce rôle de troisième voire quatrième option ne l’empêche pas cependant de tourner à plus de vingt points de moyenne. Cela n’empêche pas Denver de constamment tomber sur plus fort que soit : les Suns de Johnson en 1982, puis par le Jazz de Dantley l’année suivante, et les Spurs de Gervin ensuite.
L’exercice 1984 – 1985 sera son dernier. Il finit avec des moyennes plus qu’honorables pour un vétéran de 36 ans : 12 points et 4,3 rebonds. Il enverra même 27 points lors de cette saison, montrant que même s’il n’était plus le joueur qu’il fût, il restait toujours une option offensive à ne pas sous-estimer.
Comme un symbole, Denver fit l’une de ses meilleures campagnes de playoffs en 1985. Après avoir pris une revanche contre les Spurs et le Jazz, avec notamment une rencontre à 24 points face à ces derniers, Issel se retrouve en finales de conférence. Mais c’est un roc, un pic, un cap, que dis-je un monstre qui se dresse face aux Nuggets. Les Lakers d’Abdul-Jabbar et Magic Johnson. Malgré un game 2 où il marquera 22 points, permettant alors de remettre les deux franchises à égalité, les Purple and gold ne firent qu’une bouchée des pauvres joueurs de Denver.
Dan prendra donc sa retraite sur une défaite face aux Lakers. Il quittera les terrains avec un palmarès à la hauteur de ses accomplissements :
- All-star, à 7 reprises, (6x en ABA, 1x en NBA),
- Champion ABA,
- All-ABA, à 5 reprises
- Rookie of The Year ABA,
- Membre de la prestigieuse ABA All Time Team,
- Deuxième meilleur marqueur de l’Histoire de la ABA,
- Hall-of-famer.
Au moment de prendre sa retraite, si l’on tient compte de ses passages dans les deux Ligues, seuls 3 joueurs ont inscrit plus de points que lui dans leurs carrières : Julius Erving, Wilt Chamberlain et Kareem Abdul-Jabbar.
Après quelques années de repos bien mérité, Issel décida de revenir sur les parquets. Il fera deux passages de coach dans sa franchise, les Nuggets. Dans un premier temps, il accédera aux playoffs 1994, mettant fin à une période collectivement dramatique. Il sera néanmoins remplacé dès la saison suivante par Gene Littles. Il retrouvera ensuite les bancs NBA, entre 1999 et 2001, avec moins de succès cette fois-ci car il n’atteindra plus jamais la post-season.
Il décide alors de mettre fin à sa carrière dans le basket, et de se reposer, chose qu’il n’avait pas faite depuis bien longtemps.
Crédits et hommages
“La personnalité de Dan est sa meilleure qualité”
Voilà comment Gene Littles, son assistant lors de son premier passage en tant que coach à Denver, décrivit Dan Issel. Effectivement, nous avons passé sous silence les qualité de meneur d’hommes que possédait The Horse. Il faisait partie de la caste de ces joueurs qui n’ont peur de rien, qui assument tous leurs faits et gestes et portent les responsabilités des échecs de leur équipe sur leurs propres épaules.
“Il sait comment critiquer sans être négatif”, Gene Littles.
S’il n’est pas complètement un sain (il fût suspendu en raison d’une déclaration douteuse vis-à-vis des supporters mexicains), Issel reste dans l’esprit populaire comme l’une des plus grandes légendes de la seconde Ligue de basket-ball du pays, et un joueur éminemment important de l’histoire des Nuggets.
Nous vous avons déjà dit qu’il est un 122è choix de draft ?
Les précédents épisodes et portraits du Magnéto :
- Cinq majeur #1 : Penny Hardaway (1994/95), Manu Ginobili (2007/08), Terry Cummings (1988/89), Jerry Lucas (1964/65), Nate Thurmond (1974/75),
- Cinq majeur #2 : Jason Kidd (1998/99), Tracy McGrady (2004/05), Rick Barry (1966/67), Elvin Hayes (1979/80), Neil Johnston (1952/53),
- Cinq majeur #3 : Isiah Thomas (1989/90), David Thompson (1977/78), Paul Arizin (1951/52), Tom Gugliotta (1996/97), Yao Ming (2008/09),
- Cinq majeur #4 : Baron Davis (2006/07), Bill Sharman (1958/59), Chet Walker (1963/64), Gus Johnson (1970/71), Jack Sikma (1982/83),
- Cinq majeur #5 : Tiny Archibald (1972/73), Dick Van Arsdale (1968/69), Bernard King (1983/84), Jermaine O’Neal (2003/04), Larry Foust (1954/55),
- Cinq majeur #6 : Fat Lever (1986/87), Richie Guerin (1961/62), Grant Hill (1999/00), Dan Issel (1971/72),