Depuis 1946 et la création de la National Basketball Association, quelque cinq mille joueurs ont foulé les parquets de la Grande Ligue. Certains d’entre eux ont laissé une empreinte indélébile qui ne sera jamais oubliée. D’autres sont restés bien plus anonymes. Entre les deux ? Des centaines de joueurs, qui ont tour à tour affiché un niveau de jeu exceptionnel, mais dont on oublie bien souvent la carrière.
Dès lors, @BenjaminForant et @Schoepfer68 ont décidé de dresser – littéralement – le portrait de certains de ces acteurs méconnus ou sous-estimés. Au total, ce sont 60 articles qui vous seront proposés : un par année, entre les saisons 1950 – 1951 et 2009 – 2010. Pour chaque saison, un joueur a été sélectionné comme étendard, parfois en raison d’une saison particulièrement réussie, d’une rencontre extraordinaire ou encore d’une action historique …
Chaque portrait s’inscrira dans une volonté, celle de traverser l’Histoire de la NBA de manière cohérente. Ainsi, ces portraits (hebdomadaires) seront publiés dans un ordre précis : un meneur, un arrière, un ailier, un ailier-fort, un pivot. Au bout de cinq semaines, c’est donc un cinq majeur qui sera constitué. Les plus matheux d’entre vous l’aurons compris : au final, ce seront douze équipes, toutes composées de joueurs ayant évolué au cours de décennies distinctes, qui auront été composées.
A vous de déterminer lequel de ces cinq majeurs sera le plus fort, le plus complémentaire, le plus dynastique.
Vous trouverez en fin d’article les liens vous permettant de (re)consulter les articles précédents.
La jaquette
Pour chaque article, @t7gfx vous proposera ses créations. Vous y retrouverez une illustration du joueur présenté (en tête d’article) ainsi une présentation de chaque cinq majeur projeté (chacun avec une identité visuelle propre).
Le synopsis
Lorsque l’idée de rédiger les soixante épisodes de cette série nous a traversé l’esprit, plusieurs problématiques se sont dressées devant nous, tel un gigantesque mur. Nous savions qu’avec l’internationalisation de la NBA et la médiatisation de celle-ci, traiter des 90’s et des décennies suivantes serait plutôt simple. Nous nous doutions également qu’en fouillant un peu, nous pourrions facilement aborder des joueurs fabuleux ayant évolué durant les années 70 ou 80. Cependant, nous avions quelques réserves concernant la partie obscure de cette vieille Ligue.
En effet, les deux premières décennies d’existence de la NBA sont assez paradoxales. D’un côté, certains noms reviennent en boucle et en boucle, comme des mythes antiques faisant foi du passé glorieux de l’association. Mais ces personnes se comptent sur les doigts des mains : Bill Russell, Wilt Chamberlain, Kareem Abdul-Jabbar, Bob Pettit et Oscar Robertson sont les principaux intéressés et très peu d’autres noms sont médiatisés.
Mais ces mastodontes ne nous intéressent pas. Nous voulions des joueurs inconnus, méconnus ou mésestimés, suffisamment forts pour mériter plus de 3 000 mots mais pas assez pour avoir déjà eu cet honneur. Quelle fût notre surprise, lorsqu’au détour d’une recherche sur BasketBall Reference, nous rencontrions notre portrait du jour, Richie Guerin.
Richard Vincent Guerin est né le 29 mai 1932 dans le quartier populaire du Bronx, à New York, ville plus que propice au développement de qualités basketballistiques. Mais le jeune extérieur aura à peine le temps de poser ses premiers dribbles que la plus importante des missions lui sera confiée : défendre sa patrie. A cet égard, il intégra les Marines en 1947, juste après la seconde Guerre Mondiale.
Il termina sa carrière plus de vingt années plus tard, en tant que multiple All-Star, Hall-of-famer, des saisons à plus de 20 points au sein de la franchise mythique des Knicks. Que demander de plus ? Pas grand chose. Montez donc à bord, et en avant pour ce 27è épisode du Magnéto.
Action !
Alors qu’il n’était que réserviste chez les Marines, Richie décide de rejoindre l’Iona College de New York. Il y passera quatre saisons. Malheureusement, comme vous vous en doutez, il ne reste que très peu de traces de celles-ci. Seule la ligne statistique de l’exercice 1953 – 1954 est disponible sur internet, et elle vaut le coup d’œil : 24,7 points à 42% au tir.
A la fin de son cursus universitaire, il se présente, comme beaucoup de jeunes prospects, à la draft annuelle. il sera alors sélectionné, en 17è position (second tour pour l’époque) par la franchise de sa ville de toujours : les Knicks. Après avoir grandi dans Gotham et réalisé ses études dans cette même mégalopole, Richie continuera son petit bout de chemin dans New-York.
Cependant, le futur jersey 9 de Big Apple ne rejoindra pas immédiatement Manhattan, et attendra encore un peu avant de connaitre ses heures de gloires au sein de la Grande Ligue. Étant toujours considéré comme militaire, malgré sa draft, Guerin est réquisitionné pour garder durant deux années l’école des Marines, situé à Quantico, en Virginie.
Après cette petite pige loin des parquets, le guard revient mort de faim et peut enfin débuter sa carrière professionnelle. Lui, qui, depuis petit, s’amuse continuellement sur les playground de la ville, va connaitre le privilège de porter le maillot mythique des Knicks.
Pour sa première rencontre au Madison Square Garden, les Knickerbockers s’inclinent face aux C’s de Boston. Le rookie, qui se trouvait encore au fond de la rotation, ne scorera que deux petits points. Il faut dire que sa première année ne fût pas simple. L’effectif regorgeait de meneurs ou ailiers pouvant remplir les missions que l’on demande normalement à un arrière, Richie est cantonné à un rôle de troisième, voir quatrième couteau.
Cet exercice 1956 – 1957 sera compliqué. Collectivement, les new-yorkais ne sont pas au niveau. Ils finiront la saison avec un bilan de 36-36, les plaçant quatrième de leur division, ratant la qualification en playoffs. Individuellement, Guerin ne brillera pas. Il jouera en moyenne un peu moins de 25 minutes par match (temps de jeu pas si important que ça pour les profondeurs de rosters de l’époque), pour 9,7 points inscrits, 2,5 passes distribuées et 4,5 rebonds attrapés. Mais les observateurs sentent, sur quelques coups d’éclats, que l’arrière n’est pas un simple joueur de rotation :
- 14 février 1957 vs Minneapolis : 26 points dans une défaite (-2),
- 19 février 1957 vs Boston : 35 points dans une défaite (-2),
- 28 février 1957 vs Boston : 25 points dans une victoire (+1).
Bien souvent, les sophomores ne sont pas pris en compte dans la course à la meilleure progression de l’année, tant le gap entre la première et la deuxième saison professionnelle est importante. Le moins que l’on puisse dire c’est que Richie Guerin ne fait pas figure d’exception. D’une régulière à l’autre, l’arrière change complètement de catégorie. De jeune joueur de rotation, il devient l’une des armes les plus efficaces de son effectif.
La preuve de ce nouveau rôle n’est nulle autre que sa ligne statistique flamboyante : 37,6 minutes jouées (+13), 16,5 points inscrits (+6,8), 5 passes décisives (+2,5) et 7,8 rebonds (+3,3). Cette fulgurante ascension lui permettra de décrocher sa première étoile d’All-star.
Cependant, il faut bien émettre quelques bémols à cette montée en puissance. Tout d’abord, il manque encore de régularité. Alors âgé de 25 ans, il passe encore à côté de trop nombreux matchs pour un joueur que l’on veut considérer en première ou seconde option offensive (16 matchs avec 11 points inscrits ou moins). De plus, si l’on veut être tatillon(s), on peut noter que sur 36 minutes, cette seconde saison n’est pas tellement meilleure que la première. Néanmoins, on le sait, ces comparaisons sur 36 minutes ne sont pas forcément fiables : tous les joueurs ne parviennent pas à endosser un costume plus large. Chose que Guerin est parvenu à faire, malgré son statut de sophomore. Enfin, cette amélioration statistique n’a absolument rien changé aux résultats collectifs des Knicks : 35 victoires pour 37 défaites, bilan une nouvelle fois synonyme de vacances anticipées.
Richie sait alors sur quels angles il doit travailler, pour que cela profite à son équipe.
Sur un aspect purement personnel, il fera encore mieux que la saison précédente. Le numéro 9 inscrira plus de 18 points de moyenne et maintiendra ses statistiques au rebonds et à la passe. Il dépassera même pour la première fois de sa carrière la barre des 40 points, en inscrivant 41 pions le 25 janvier lors d’une défaite à Saint Louis. Cette saison lui permettra d’obtenir sa première sélection au sein d’une All-NBA Team. Mais au delà d’un plafond qui semble ne pas encore atteint, son palier, lui, ne cesse d’augmenter.
Les contre-performances sont en effet de plus en plus rare pour l’arrière (29 rencontres à 20 points ou plus), et cela se ressent sur le bilan collectif : les Knicks terminent la régulière avec un bilan positif (39-32) et filent vers les premières joutes printanières depuis la draft de son jeune extérieur.
Malheureusement, les combats tant attendus n’auront pas lieu. Pour être plus précis, ce ne seront pas des combats, mais des balayettes simples et efficaces. Les Nationals de Syracuse exécutent les Knicks en deux petites rencontres pour se qualifier aisément pour le tour suivant (+6 au game 1 ; +16 au game 2). Guerin réussira son entrée en matière avec une belle performance (24 points) mais coulera comme le reste de son effectif lors de l’ultime défaite (seuls 6 petits points inscrits).
Les new-yorkais ont enfin franchis un cap. Il faudra néanmoins en franchir de nombreux autres pour espérer exister collectivement dans une Ligue alors dominer par les Celtics de Boston. L’aventure est cependant en marche.
Vous le savez désormais : les choses ne se passent jamais comme prévues.
Richie Guerin, comme depuis le début de sa carrière, continuera d’améliorer sa ligne statistique. Saison après saison, celui qui est maintenant dans son quatrième exercice est un All-star confirmé. Il inscrira cette fois-ci plus de 20 points de moyenne pour la première fois de sa carrière (21,8 exactement), maintiendra sa haute performance au rebond (6,8) et améliorera considérablement son nombre de passes décisives par rencontre (6,3). Il glanera également sa troisième étoile cette même année ainsi que sa seconde sélection au sein de la Second All-NBA Team.
Mais 1959-1960 est une mauvaise saison pour les Knicks. Mauvaise est même un euphémisme, tant la marche ratée par les résidents du Madison Square Garden est haute : 27 victoires, 47 défaites, pas de playoffs.
Les fans de la Ligue, encore peu nombreux à l’époque devaient se dire que cet exercice complètement raté était une erreur de parcours qui allait être immédiatement corrigé. Hélas, le marasme collectif ne se cantonna pas au dernier exercice des années 1950.
L’exercice suivant est ainsi semblable en tout point au précédent : un bilan collectif cataclysmique (21 – 58), un effectif plus que moyen et un Richie Guérin, qui, en compagnie de l’ailier Willie Nauls, fait de son mieux pour éviter à son équipe de définitivement se noyer.
Pour imager ces propos, voici quelques une des plus grosses performances du numéro 9 new-yorkais cette saison :
- 26 novembre 1960 vs Detroit : 35 points, 12 rebonds, 8 passes dans une victoire (+8),
- 20 décembre 1960 vs Syracuse : 21 points, 15 rebonds, 17 passes dans une victoire (+10),
- 20 janvier 1961@ Detroit : 35 points dans une défaire (-4),
- 27 janvier 1961 vs Philadelphie : 42 points, 10 rebonds, 12 passes dans une victoire (+11),
- 11 février 1961 @ Boston : 40 points, 8 passes dans une victoire (+22),
- 5 mars 1961 vs Cincinnati : 30 points, 18 rebonds et 4 passes dans une défaite (-6).
Ces quelques lignes de stats permettent de voir plusieurs choses. Tout d’abord, Guerin fait partie de cette caste des monstres numériques et pourtant inconnu du grand public. Bien entendu, l’époque compte énormément dans cette méconnaissance. Les résultats des Knicks (une fois est coutume, pourrait-on dire) n’aident d’ailleurs pas non plus. Notons toutefois que son triple double du 20 décembre, par exemple, est l’une des 40 performances où un joueur a scoré plus de 20 points, délivré plus de 15 passes et gobé plus de 15 rebonds. Parmi ces performances, 15 ont été réalisés par Oscar Robertson, 5 par Russell Westbrook et 6 par Wilt Chamberlain, ce qui vous permet de classer le bonhomme.
Pour continuer avec ces comparaisons, sa rencontre du 5 mars face à Cincinnati est également hors norme. A 23 reprises seulement, un extérieur a attrapé plus de 18 rebonds en scorant 30 points ou plus. Sur ces 23 reprises, Robertson en comptabilise à lui seul 14 (dont de nombreux triple-double en prime), et les autres heureux élus sont Jordan, Doncic, Gervin ou Drexler.
Voilà donc la catégorie dans laquelle joue Richie Guerin. Celle des hall-of-famer. Celle des meilleurs joueurs de leur ère.
Enfin, ces quelques matchs choisis minutieusement montrent une dernière chose : sans un énorme arrière, les Knicks ne gagnent que très peu. Sur les 21 victoires de cette saison catastrophique, Guerin dépassa les 25 points inscrits à 10 reprises.
L’arrière est trop esseulé, et malgré ces 21,8 points de moyenne (exactement comme la saison précédente), New-York n’y arrive pas. Il sait donc qu’il devra tripler, voire quadrupler d’efforts pour sortir sa franchise de toujours du pétrin dans lequel elle se trouve enfoncée. Et c’est ce qu’il fera la saison suivante.
L’oscar de la saison 1961 – 1962
Nous l’évoquions rapidement la semaine passée. La saison 1961 – 1962 est unique, statistiquement parlant. Wilt Chamberlain tournait en 50 points et 25 rebonds de moyenne. Oscar Robertson, lui, terminait la première saison de l’Histoire avec un triple-double de moyenne. Elgin Baylor n’était pas en reste, avec quelques 38 points et 18 rebonds. Et, malgré un casting incroyable, c’est Bill Russell qui termina MVP, avec ses 23,6 rebonds par soir. Voici la jungle dans laquelle évoluait Richie Guerin.
Lorsque nous évoquions sa saison sophomore, en pointant du doigt son augmentation statistique qui lui aurait potentiellement permis de se retrouver dans la course au MIP, il était dur d’imaginer qu’il parvienne à rééditer la performance.
A l’instar d’un Giannis Antetokounmpo, qui, après avoir obtenu le titre de Most Improved Player en 2017 fut de nouveau dans la course lors des années suivantes, Richie va réussir, lors de cette saison 1961 – 1962, un exercice tout bonnement sensationnel. Lors de l’année précédente, il marquait un peu moins de 22 points en moyenne. Ce ne sera pas trois points supplémentaires qu’il inscrira. “Not four. Not five. Not six”, aurait dit LeBron James. Mais bel et bien sept points supplémentaires par rencontre. C’est bien celui qui était considéré comme l’arrière irrégulier des Knicks, au début de sa carrière, qui scorera 29,5 points lors de cette saison.
Mais revenons en au départ. Après avoir conté ses quatre premiers exercices au sein de la NBA, détaillons un peu le style du joueur. Mesurant 193cm pour 88kg, Richie est considéré comme l’un des meilleurs arrière passeurs et playmakers de cette génération. En effet, lorsqu’un arrière tourne à plus de 6 passes décisives par rencontre, c’est qu’il est altruiste. En plus d’un scoring outrancier dans une époque dominée par les intérieurs, Guerin est l’un des meilleurs arrière rebondeur des prémisses de la Grande Ligue. Années 50 et 60 oblige, le Knicks était réputé pour ses capacités de pénétrations plus que pour son tir extérieur.
Retournons en octobre 1961. A l’aube de cette nouvelle saison, les new-yorkais sont loin d’être les favoris de leur division. Les Celtics de Russell, les Nationals de Schayes et les Warriors de Chamberlain semblent considérablement en avance sur la ville qui ne dort jamais.
Mais il ne faut pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir battu. Le début de saison des hommes de Manhattan est bon. Après 6 rencontres, le bilan est de 4 victoires pour 2 défaites. Sur cette période, Guerin chauffe tranquillement et enchaîne les rencontres aux alentours des 30 points (dont un premier pic à 35).
Mais cette période d’euphorie ne durera pas. Sur les 15 rencontres de novembre, New York en remportera que 3. Cependant, s’il y a bien une chose qui reste constante dans le positif sur cette période, ce sont les énormes coup de chaud de l’arrière. Sur le mois, il dépassera 2 fois la quarantaine (47 et 42 points), inscrira également 38 points contre Boston et 37 contre Syracuse. Il finira le mois de la Toussaint à plus de 31 points de moyenne.
L’arrière, plutôt habitué à scorer une vingtaine de points, commence à s’habituer aux sommets de la ligue. Même si ses statistiques sont en légère baisse sur le mois de décembre (“seulement” 27,6 points de moyenne), le Knicks survole le niveau de jeu auquel il nous avait habitué.
Certes il propose des statistiques au scoring ahurissante, mais ce serait lui manquer de respect que d’oublier son côté all-around. Il réalisera au minimum 6 triple-double sur cet exercice, en sachant que toutes les statistiques ne sont pas disponibles. L’un d’entre eux attire particulièrement notre attention, nous y reviendrons.
Lorsque l’année civile 1962 débute, les Knicks en sont à 12 victoires pour 23 défaites. Alors que les Knicks viennent d’enchaîner deux victoires consécutives, Richie enfile de nouveau sa cape de super-héros et détruit Détroit en inscrivant 37 points.
Malheureusement, cette série de trois victoires sera la meilleure de la seconde partie de calendrier des new-yorkais. Le collectif est toujours aussi dramatique, et le 9 des bleu et orange ne peut pas tout faire tout seul. La franchise conclut cette nouvelle saison avec un bilan dramatique : 29 victoires pour 51 défaites. L’ours a bel et bien été battu.
Si, une nouvelle fois, il n’y a pas grand chose à redire sur les prestations collectives, revenons sur les plus gros cartons de cette seconde partie d’exercice de Guerin :
- 30 janvier 1962 vs Philadelphie : 46 points, 4 rebonds et 6 passes dans une victoire (+6),
- 14 février 1962 vs Boston : 51 points, 10 rebonds et 6 passes dans une victoire (+13),
- 25 février 1962 @ Philadelphie : 50 points, 11 rebonds, 13 passes dans une victoire (+14),
- 06 mars 1962 vs Boston : 40 points dans une victoire (+7).
Première observation : Son triple-double réalisé face à Phily est sensationnel. Seuls 14 rencontres se sont concluent par un triple-double à plus de 50 points. Les autres étant, entre autres, détenues par Harden et Westbrook (plusieurs fois chacun), Abdul-Jabbar ou Chamberlain.
Ces quatre rencontres permettent de voir qu’une énorme performance du joueur était synonyme de victoire pour sa franchise, malgré l’adversité. Ainsi, Guérin ne faisait aucun complexe à l’heure de rencontrer Sam Jones, légendaire arrière des Celtic’s. Tel un véritable baromètre, il dicte la pluie, mais surtout le beau temps pour son équipe.
Avec cet exercice à plus de 29 points de moyenne, ses 6,9 passes décisives et 6,4 rebonds, il vient de réaliser une saison individuelle historique. Il est l’un des deux seuls Knicks de l’histoire à avoir inscrit plus de 29 points de moyenne sur un exercice (le second étant Bernard King avec ses 32,9 points en 1984 – 1985). Il fait donc mieux que Willis Reed, Walt Frazier, Carmelo Anthony ou Patrick Ewing à ce niveau là.
Mais sa saison n’est pas unique qu’au niveau de la franchise new-yorkaise, elle l’est également pour la NBA toute entière. Nous ne retrouvons trace d’un 29 – 6 – 6 qu’à 20 reprises depuis la création de la Grande Ligue, voilà plus de 70 ans : Oscar Robertson (x7), Michael Jordan (x3), LeBron James (x3), James Harden (x3), Larry Bird, Jerry West et Russell Westbrook. Seuls 8 joueurs ont donc réussit cet exploit. Ce ne sont que des légendes de notre sport, membres incontestable des top 100 all-time qui foisonnent aujourd’hui sur la toile. Absolument tous. Sauf un : Richie Guerin, l’arrière oublié des New-York Knicks.
On le retrouve au sein de la All-NBA Second Team de l’époque, pour la troisième fois de sa carrière. Malgré ses performances ahurissantes, impossible de viser plus haut pour lui tant les résultats collectifs sont décevants.
Voici donc comment s’achève sa magnifique saison. Isolé, pyromane et soliste majestueux, il a réalisé l’une des plus belles saisons individuelles effectuées sous le maillot légendaire des Knicks. Mais, déjà âgé de 30 ans, le crépuscule de sa carrière pointe le bout de son nez. Maintenant que son pic individuel est passé, il n’a plus qu’un seul objectif : enfiler une bague à son doigt.
Le générique de fin
Nous l’avons dit, l’histoire d’amour entre New York et Guerin commença très tôt. Mais l’idylle prit fin en 1963. En effet, après une dernière saison plus que correcte individuellement (21 – 4 – 4) marquée par un nouveau bilan honteux (21 victoires – 58 défaites) dans son fief de toujours, l’arrière est transféré aux Hawks contre de l’argent et un second tour de draft.
Pour la première fois de sa carrière, il doit donc poser ses valises ailleurs que dans sa ville natale. Néanmoins, si la saison précédente était encore digne d’un All-star, les suivantes furent témoins de son déclin. Malgré quelques fulgurances (une rencontre à 29 points, une autre à 28 et une dernière à 25), le joueur vieillit et voit son importance diminuer au sein de sa nouvelle franchise. Il ne dépassera plus jamais la barre des 15 points inscrits par match de moyenne (13,1 pour l’exercice 1963-1964).
Son transfert lui apporte cependant une chose auquel il n’avait que très peu goûté : des matchs de playoffs. Effectivement, les Hawks de Saint-Louis, titrés en 1958 aux termes d’une finale exceptionnelle, restent une équipe plus que solide, possédant notamment Lenny Wilkens à la mène, Cliff Hagan sur l’aile et Bob Pettit dans la raquette.
A l’issue d’un combat acharné, les faucons élimineront les Lakers. Guerin sera plus que décisif dans la série, avec plus de 16 points de moyenne. Âgé de 31 ans, il passe le premier tour des playoffs pour la première fois de sa carrière, après huit saisons NBA. Un modèle qu’au suivi, cinquante ans plus tard, un joueur tel que DeMarcus Cousins. Malheureusement, malgré de nouvelles très belles performances (19,6 points de moyenne sur la série, dont 32 points lors du game 1), les Hawks se feront éliminés en 7 rencontres par les Warriors.
Les deux saisons suivantes seront du même acabit : une moyenne de points oscillant en régulière entre 14 et 15, une qualification assez aisée pour les joutes printanières, une hausse conséquente de niveau de jeu lors de ces matchs à enjeux (respectivement 17,3 points en 1965, 20,6 points en 1966) mais, au final, une élimination qui fait mal.
L’exercice 1966-1967 marquera le début de la fin. Les statistiques continuent de diminuer et le joueur commence à se faire vieux (34 ans). Il n’est désormais plus capable d’être une pièce majeur d’un effectif qui va loin.
Cela sera encore plus net lorsqu’il ne fut pas protéger par sa franchise lors de la draft d’expansion de 1967, qui fit suite à l’intégration des Rockets et des Supersonics dans la ligue. Seattle saute alors sur l’occasion, souhaitant s’attacher les services du vétéran. Mais le natif du Bronx a du caractère. Manifestement sans trop de justifications, ou peut-être parce qu’il était entraîneur-joueur des Hawks depuis 1964, le joueur décide de prendre sa retraite avant même de poser le pied sur le parquet de sa nouvelle franchise.
Sans plus d’explications sur les différents sites traitant de la vie du joueur, Seattle renvoie le joueur aux Hawks, qui ont déménagé à Atlanta. Guerin sort alors de sa retraite pour finir sur deux petites saisons insignifiantes statistiquement (35 matchs cumulés sur les deux exercices). Il remportera tout de même le titre de coach de l’année en 1968. Si Bill Russell est parvenu, l’année suivante, à remporter le titre NBA en tant qu’entraîneur-joueur, Guerin reste l’unique “double-casquette” a avoir obtenu le titre d’entraîneur de l’année.
Il conclura sa carrière de joueur, lors d’une défaite comptant pour les playoffs 1970 en inscrivant la bagatelle de 31 points, rappelant ainsi à toute la ligue l’exceptionnel joueur qu’il a été.
Néanmoins, il ne restera pas loin des parquets. Maintenant retraité, il peut pleinement se concentrer sur le coaching de cet effectif. Il restera encore deux saisons sur les parquets à mettre en place divers systèmes avant de quitter définitivement le monde NBA, après plus de 16 ans de bons et loyaux services.
Son palmarès reflète, en quelques lignes, toute la carrière de ce magnifique joueur : un exceptionnel talent personnel, trop isolé lors de ses belles années à New York lui empêchant de décrocher le Graal :
- All-star, à 6 reprises,
- All-NBA team, à 3 reprises,
- Hall-of-famer, intronisé en 2013,
- Coach of The Year (1968).
Crédits et hommages
Comme beaucoup avant lui, surtout lorsque l’on évoque les décennie 50 et 60, il est très complexe de trouver les hommages rendus à Richie Guerin. Peu médiatisé, pas assez marquant pour faire partie de la caste suprême des anciens joueurs passés à la postérité, il n’en fallait pas moins pour que le légendaire Knicks finisse aux oubliettes. Comme d’habitude, on vous laisse avec une petite vidéo diffusée lors de son introduction au hall-of-fame :
En plus d’avoir obtenu la distinction suprême pour tout basketteur, Guerin a également intégré, en 2004, le Marine Corps Sport hall-of-fame. Une preuve que, malgré son oublie dans l’esprit populaire, il a marqué à tout jamais ceux pour qui il s’est battu.
Les précédents épisodes et portraits du Magnéto :
- Cinq majeur #1 : Penny Hardaway (1994/95), Manu Ginobili (2007/08), Terry Cummings (1988/89), Jerry Lucas (1964/65), Nate Thurmond (1974/75),
- Cinq majeur #2 : Jason Kidd (1998/99), Tracy McGrady (2004/05), Rick Barry (1966/67), Elvin Hayes (1979/80), Neil Johnston (1952/53),
- Cinq majeur #3 : Isiah Thomas (1989/90), David Thompson (1977/78), Paul Arizin (1951/52), Tom Gugliotta (1996/97), Yao Ming (2008/09),
- Cinq majeur #4 : Baron Davis (2006/07), Bill Sharman (1958/59), Chet Walker (1963/64), Gus Johnson (1970/71), Jack Sikma (1982/83),
- Cinq majeur #5 : Tiny Archibald (1972/73), Dick Van Arsdale (1968/69), Bernard King (1983/84), Jermaine O’Neal (2003/04), Larry Foust (1954/55),
- Cinq majeur #6 : Fat Lever (1986/87),